L’Île n’est pas au milieu de l’Océan, mais dans une ville, un composite entre Bruxelles et Paris, c’est un quartier de maisons vides promises à la démolition que gardent de redoutables vigiles. Mais le chantier traîne, pourquoi ? Est-ce lié à cette valise pleine de billets ? Un homme venu quelques jours dans l’hôtel-restaurant qui borde les palissades, y fait allusion et demande à Jacquot, la petite fille de la maison, de le prévenir si un homme claudiquant à la mine patibulaire venait à se présenter ici.
On retrouve l’enfant (Jacquot pour Jim), l’équivalent de Billy Jones et de Long John Silver, et la plupart des personnages marquants du Stevenson de Treasure Island, mais dans un contexte qui n’est pas celui de Pirates des Caraïbes.
Le scénariste Sylvain Venayre, historien spécialiste du XIXe Siècle et en particulier de la mystique coloniale [1] s’est attaché à transposer le récit de Stevenson pour mieux en démontrer la modernité.
En fait, mieux vaut oublier la référence initiale et y revenir en seconde lecture pour découvrir le chemin initiatique de la petite Jacquot qui découvre la réalité des hommes, leur cupidité et leur absolue violence : " En dessinant le premier meurtre, je me suis rendu compte que c’était la première fois que j’en dessinais un. Même dans Déogratias, on ne voit pas les meurtres proprement dits. C’était une sensation étrange pour moi, vaguement triste et désagréable" nous dit Jean-Philippe Stassen.
Stassen et Venayre se sont rencontrés à Charleroi en 2005 à l’occasion de l’exposition Le Remords de l’homme blanc dont l’historien était le commissaire. Depuis, ils ne se lâchent plus. Ils ont fait un album ensemble chez Futuropolis, une version illustrée de Au Cœur des ténèbres de Joseph Conrad, une petite merveille.
Avec ce nouvel album, Venayre publie sa première BD. Cela donne un livre étrange, très référentiel, auquel le dessin de Stassen imprime une distance qui renforce l’effet métaphorique.
(par Didier Pasamonik - L’Agence BD)
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