Rien ne se serait fait sans une grande dame : Henriette Zoughebi. C’est elle qui eut la responsabilité de lancer dans une municipalité alors communiste ce salon pour défendre le livre jeunesse et au-delà : « Bernard Pivot consacrera-t-il prochainement une émission au livre de jeunesse ? » écrivait-elle dans le dossier de presse de la première édition. La légitimité qui commençait à porter ses fruits pour la bande dessinée restait à conquérir pour le Livre pour enfants.
Pourtant, des éditeurs, des auteurs et des illustrateurs talentueux avaient déjà droit de cité, mais il fallait un événement qui leur offre chaque année un coup de projecteur pour que cette part de la créativité éditoriale ait une visibilité justifiée. Ce sera le Salon de la Seine-Saint-Denis.
Il y a trente ans, 50 éditeurs répondaient présent, ils sont 450 aujourd’hui. 2000 nouveautés étaient publiées chaque année ; elles sont plus de 6000 aujourd’hui. La force du Salon est d’avoir travaillé depuis trois décennies avec les éditeurs de livre et de presse jeunesse, les bibliothécaires, les enseignants, les animateurs, les travailleurs sociaux… mais aussi avec les enfants et leurs parents pour soutenir la création nationale et internationale, commerciale ou alternative.
Le CA de l’édition jeunesse est en recul de 3% en 2013, avec 2 687 millions d’euros de chiffre d’affaires qui constituent 13,4% du marché du livre, lui aussi en recul de 3,4% en 2013. Est-ce la faute au livre numérique ? Pas sûr, mais peut-être car, de plus en plus, les jeunes sont connectés aux écrans : "La vente du livre numérique représente 2,3% du marché grand public et 4,1% du chiffre d’affaires des ventes de livres des éditeurs. Le secteur de l’édition numérique a engendré 105,3 M€ en 2013, tous supports et catégories éditoriales confondus, soit une augmentation de 28,6%. La part de marché de l’édition jeunesse atteint 2,8%, un score certes modeste mais qui a connu une progression de 204,5% !" dit un communiqué du Syndicat National de l’Édition.
Un 10e art ?
Suivant les traces de la bande dessinée qui s’est arrogée la 9e place des BeauxArts en 1964, la littérature jeunesse prétend désormais à la 10e : "La littérature jeunesse, et pas seulement l’album, abrite une langue artistique qui n’est ni celle de la littérature, ni celle de la bande dessinée, déclare Sylvie Vassalo, la directrice du Salon. Un vocabulaire unique, des écritures originales qui, en combinant à l’infini mots et illustrations, ouvrent un horizon singulier pour l’imaginaire et la construction de sens. Une sorte d’espace-temps particulièrement fertile. Un terrain de création, d’initiation, de dialogues où la liberté d’interrogation et d’interprétation de chaque lecteur est à l’œuvre. Le débat est ouvert." Qu’en pensent nos lecteurs ?
En tout cas, les meilleurs dessinateurs marquent cette année exceptionnelle : le génial Quentin Blake, le formidable Blexbolex, Carll Cneut, Philippe Corentin, Serge Bloch, Elzbieta, Wolf Erlbruch, Jean-François Martin, Kveta Pacovska... accrochent près de 300 œuvres originales aux cimaises.
Plus de 150 auteurs sont invités dont 19 auteurs de bande dessinée parmi lesquels Alfred, Julien Neel ou Clément Oubrerie et un certain nombre de labels alternatifs présents dans l’habituel Pôle BD agencé par l’association Fremok.
(par Didier Pasamonik (L’Agence BD))
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Salon du Livre et de la Presse jeunesse
Du 26 novembre au 1er décembre 2014