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Alain Dary (Gaspard et le phylactère magique) : "La BD est un médium très motivant pour faire entrer les élèves dans le monde de l’écrit."

Par Patrice Gentilhomme le 31 décembre 2012                      Lien  
Scénariste d'une bande dessinée expliquant les secrets de la création de la BD à la destination d'un jeune public, Alain Dary est enseignant. Il nous raconte sa démarche.
Alain Dary (Gaspard et le phylactère magique) : "La BD est un médium très motivant pour faire entrer les élèves dans le monde de l'écrit."
Gaspard et le phylactère magique de Alain Dary, Mickaël Roux et Dawid
Ed. Emmanuel Proust

Vous êtes le scénariste de cet album, comment est né ce projet ?

L’idée vient d’abord de Bruno Genini (directeur de BD Boum) qui souhaitait accompagner notre démarche éditoriale en coéditant un album citoyen ou pédagogique. C’est donc lui qui a eu l’idée de réaliser un album à destination du jeune public de 7 à 12 ans pour expliquer les différentes étapes de la réalisation d’une bande dessinée.

Au-delà de l’aspect pédagogique, il y a tout de même une histoire…

C’est une fiction. Mais à travers cette fiction, l’enfant va apprendre à découvrir les codes de la BD ; on voulait absolument que ce soit une BD pas ennuyeuse pour que l’enfant, à la fin, se rende compte qu’il a appris plein de choses sur la création d’une bande dessinée et qu’il puisse le faire en pleine autonomie.

De gauche à droite : Dawid le coloriste, Alain Dary et le dessinateur Mickaël Roux.

Vous êtes enseignant, comment se répartissent les parties pédagogiques et celles relevant de la narration ?

Je dirai plutôt 50 - 50. Le côté pédagogique est certes important, mais le côté ludique, c’est ce qu’on essaie de faire tous les jours en tant qu’enseignant : intéresser ses élèves, quel que soit le moyen utilisé que ce soit par le jeu ou par l’histoire, afin de faire passer des notions tout en s’amusant.

Comment est né ce scénario, s’agit-il d’idées venant de vos élèves, une expérience de classe ?

L’idée de base vient de Sébastien Duforestel , le responsable pédagogique du festival. Au départ, il était prévu d’écrire le scénario à deux, le synopsis et le découpage ont donc été réalisés en commun. Ayant cogité chacun de notre côté, on a essayé de faire un mélange des deux en essayant de rendre compte du pour et du contre de chaque version. On a fait une synthèse, on s’est mis d’accord pour arriver à un plan détaillé de tout l’album. Par exemple, cette idée de fantôme qui guide Gaspard, c’est Sébastien qui l’a eue. J’ai trouvé ça original et on est parti là-dessus. C’est moi qui ai pris en main le récit définitif, la période d’écriture s’est faite pendant celle du festival de l’an dernier, Sébastien n’était pas très disponible, c’est aussi la raison pour laquelle j’ai hérité du découpage et de l’écriture du scénario.

L’album est sorti pour l’édition 2012 de BD Boum, c’est avant tout une coproduction...

En effet, le festival est coéditeur , ce n’est pas notre vocation, ni notre métier ! On a donc eu besoin d’un professionnel ayant pignon sur rue. On s’est donc associé avec Emmanuel Proust. Il fallait bien évidemment le sortir en avant-première à l’occasion de BD Boum.

Dans votre pratique quotidienne d’enseignant, vous restez persuadé de l’impact de la BD pour l’acquisition de connaissances. Comment cela se manifeste-il ?

C’est un médium très motivant pour faire entrer les élèves dans le monde de l’écrit. On peut associer la partie dessin et le texte pour rentrer dans l’écriture. Bien souvent les enfants pensent d’abord au dessin et à ses contraintes mais là, on commence par les sensibiliser au travail d’écriture. Cela reste donc une très bonne entrée pour leur faire produire des textes et des histoires.

Vous avez vous même une expérience dans l’écriture de scénario...

Oui, j’ai déjà écrit des scénarios, celui-ci est le premier qui est édité mais j’écris en parallèle plus pour un public adulte. J’aime beaucoup l’histoire, j’ai besoin des deux. Mon travail en classe ne se limite pas à cet album ; je fais écrire aussi des scénarios par mes élèves. Je ne me borne pas à un domaine. J’ai pris beaucoup de plaisir avec Gaspard, le travail avec Mickael et Dawid était évidemment très intéressant.

Mickael Roux, vous êtes en charge de la mise en images de cet album, comment entre-t-on dans un scénario à vocation pédagogique ?

Comme disait Alain, c’est un mixte : il y a autant de pédagogie que d’aventure donc, au final, on prend autant de plaisir à le faire qu’avec un album traditionnel. il n’y a pas de technique particulière parce qu’il y a de la pédagogie derrière !

On vous connait pour avoir déjà produit d’autres bandes dessinées autour de l’enfance avec les Passeurs (Carabas) et Jeux de gamins (Bamboo), par exemple.

L’univers de l’enfance est assez intéressant , ça peut-être assez noir ou assez léger mais il y a toujours cette touche de naïveté, de légèreté tout en étant cruel. Le mélange de toutes ces choses là est intéressant.

Y a-t-il des contraintes particulières sur ce type de projet ?

Non, comme d’habitude, chacun a ses méthodes de travail. Là, comme ailleurs, il faut adopter une méthode qui va correspondre à chacun, avoir du plaisir ensemble. Bien entendu, avec Alain, on est parfois tombé sur deux, trois trucs posant problème, mais on est toujours arrivé à un accord. J’interviens souvent dans des écoles, c’est quelque chose qui ne me gêne pas, le côté pédagogique ; pour moi, ça fait partie de notre travail et c’est quelque chose que je connais depuis très longtemps.

Quels autres projets après cette expérience ?

L’idée c’est d’aller dans des directions différentes. Courant janvier, j’ai un album chez Ankama qui tourne autour des confessions d’un canard sex-toy, donc rien à voir avec ce projet-ci, un monde différent (rires) Quand on est auteur de BD, on aime raconter des histoires il n’y a pas de registre graphique ou narratif interdit. On doit être capable de tout faire. C’est ce qui est riche et intéressant en bande dessinée, cette manière de raconter toutes les histoires du monde.

Dawid, vous êtes le coloriste sur Gaspard, comment cela se passe-t-il ?

Ca fait pas mal d’année que nous travaillons ensemble Mickaël et moi. Comme d’habitude, il m’a envoyé ses pages, j’ai essayé de montrer aux enfants (c’est un thème important abordé dans l’album) que ce n’est pas uniquement « du coloriage », les couleurs sont au service du récit. On a eu des échanges décisifs concernant la couverture car c’est bien évidemment un élément important. On a un peu passé en revue les couleurs de l’arc en ciel ! On a visité toutes les variantes !

Quand les enfants font de la BD, la couleur n’est peut-être pas leur première préoccupation …

Non, et puis c’est souvent laborieux, ils font ça souvent dans la douleur. Dans les ateliers, comme ici à Blois, on leur montre les possibilités offertes par le numérique… Ils adorent ça et prennent ça en main très rapidement la palette graphique. Comme beaucoup ils ignorent que les couleurs en bande dessinée sont faites sur ordinateur. Au début des couleurs sur informatique, il y a eu des abus, des excès, des essais en tout genre par lesquels je suis passé moi aussi. Au début, on trouvait ça un peu froid, un peu systématique, mais maintenant, on atteint des effets très fins, proches de l’aquarelle. Cela reste aujourd’hui un outil incontournable et finalement très souple.

Le statut de coloriste en bande dessinée…

Pour une fois, je suis content : mon nom est sur la couverture, il est vrai qu’il rarement reconnu comme auteur, alors qu’il apporte quelque chose au récit, il reste encore sous-estimé, comme l’a été à une époque le scénariste ! Je pense que ça devrait évoluer dans le bon sens..

Propos recueillis à Blois par Patrice Gentilhomme.

(par Patrice Gentilhomme)

Cet article reste la propriété de son auteur et ne peut être reproduit sans son autorisation.

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Pour télécharger les dossiers pédagogiques, voir les sites de l’éditeur Emmanuel Proust ou de BDBoum.

© Alain Dary, Mickaël Roux et Dawid, Emmanuel Proust 2012

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Photos : Patrice Gentilhomme et BD Boum 2012.

 
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