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Albert Uderzo vend Astérix à Hachette

Par Didier Pasamonik (L’Agence BD) le 13 décembre 2008                      Lien  
En acquérant 60% de la société Albert René, les éditions Hachette, déjà éditrice des 24 premiers titres de la série, prennent le contrôle de l’exploitation de l’univers d’Astérix. C’est la fin d’une époque.

On l’apprend par un communiqué d’Hachette Livre : « Hachette Livre achète à Albert Uderzo sa participation de 40% dans les Éditions Albert René, détenue via la société SYADAL, et à Anne Goscinny, fille de René Goscinny, sa participation de 20%  ». Ce faisant, le premier groupe français d’édition qui était déjà l’éditeur des 24 premiers tomes de la série, prend le contrôle des droits éditoriaux d’Astérix ainsi que de l’ensemble des droits dérivés liés au personnage, y compris les droits audiovisuels.

Depuis la création de la série en 1959, près de 325 millions d’albums ont été vendus, les droits dérivés générant chaque année plusieurs millions d’euros. Le dernier titre avait tiré à 8 millions d’exemplaires vendus dans 27 pays. Selon Livres Hebdo cité par l’AFP, la société d’édition avait généré 11,3 millions d’euros de chiffre d’affaire en 2007.

Nous ne sommes pas surpris par cette annonce. Lorsque le 9 septembre 1998, à l’issue d’un long procès, Albert Uderzo récupère les 24 premiers titres d’Astérix jusque là publiés chez Dargaud, il ne les donne pas à Albert René, la société d’édition qu’il a créée en 1977 pour exploiter les droits d’Astérix, il les donne à… Hachette. Pourquoi ? Parce que la fille de René Goscinny détenait 20% de cette société et que l’apport de ces titres à cette entité risquait de rompre les équilibres entre les ayant-droits et les actionnaires. Par ailleurs, Hachette était déjà le diffuseur-distributeur d’Albert-René.

Albert Uderzo vend Astérix à Hachette
Albert Uderzo créa Astérix avec René Goscinny en 1959. Pour ses 50 ans, il change de propriétaire.
Photo : D. Pasamonik (L’Agence BD)

Transmission d’entreprise

Il faut toujours compter avec Albert Uderzo. Déjà, en 1977, lors de l’enterrement de René Goscinny au cimetière de Montparnasse, Georges Dargaud avait commis la gaffe suprême, il avait déclaré : « Goscinny est mort, Astérix est mort ». Uderzo s’est senti humilié. Non seulement il a accompli le vœu de Goscinny d’éditer Astérix lui-même, mais il en a en plus publié neuf albums de mieux, cumulant des ventes bien plus importantes que celles que René Goscinny avait connues au cours de sa vie. A cette exploitation, il faut ajouter un Parc Astérix qui a réussi à rester tout au long de ces années, substantiellement bénéficiaire et quelques films qui ont crevé les plafonds du box office. Le tableau serait parfait si l’entreprise qu’il avait entre-temps confiée à sa fille unique, Sylvie Uderzo, n’avait créé entre elle et lui des frictions qui, au fil des ans, sont devenues inconciliables, au point que la gestion de la société lui avait été retirée il y a 18 mois.

C’est finalement une décision sage de la part du créateur, 81 ans aux chanterelles, que de confier son œuvre à un opérateur neutre, mais compétent et puissant, qui en assure la gestion sur le long terme et le rayonnement international. « À mon âge, déclare Uderzo à l’AFP, il était temps de songer à l’avenir de l’œuvre que j’ai créée avec mon ami René Goscinny ».

C’est aussi la fin d’une époque, celle où les pionniers de la bande dessinée contrôlaient la gestion de leurs droits patrimoniaux. Depuis plusieurs années, avec la disparition de leurs créateurs, la plupart des grandes séries qui ont fait la gloire de la bande dessinée franco-belge : Tintin, Blake & Mortimer, Lucky Luke, les Schtroumpfs, le Marsupilami, Boule & Bill, Achille Talon, Cubitus… sont animées par d’autres talents que leurs créateurs d’origine et exploités par des grands groupes d’édition. La vente des éditions Albert René et des droits d’Astérix à Hachette, au-delà des très humaines questions familiales et patrimoniales, n’est jamais finalement qu’une banale question de transmission d’entreprise.

(par Didier Pasamonik (L’Agence BD))

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Asterix ✏️ Albert Uderzo
 
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14 Messages :
  • Albert Uderzo vend Astérix à Hachette
    13 décembre 2008 00:40, par François Pincemi

    Bonsoir Cher Didier.
    Une petite rectif, vous faisiez évidemment allusion à Boule et Bill (simple coquille).
    Ceci dit, je n’ai jamais compris comment les éditions Albert-René avaient pu vendre plus d’albums que Dargaud.
    Cordialement

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    • Répondu par Didier Pasamonik (L’Agence BD) le 13 décembre 2008 à  09:29 :

      Ceci dit, je n’ai jamais compris comment les éditions Albert-René avaient pu vendre plus d’albums que Dargaud.

      Ce n’est pas ce que j’ai écrit. C’est vous qui affirmez cela.

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      • Répondu par François Pincemi le 13 décembre 2008 à  13:09 :

        "mais il en a en plus publié neuf albums de mieux, cumulant des ventes bien plus importantes que celles que René Goscinny avait connues au cours de sa vie."

        De plus, il me semble avoir lu (içi ou là) qu’un Asterix proposé par Albert-René se vendait en France bien plus que les derniers édités par Dargaud

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        • Répondu par Didier Pasamonik (L’Agence BD) le 13 décembre 2008 à  13:45 :

          "mais il en a en plus publié neuf albums de mieux, cumulant des ventes bien plus importantes que celles que René Goscinny avait connues au cours de sa vie."

          Oui, ne faites pas semblant de ne pas l’avoir vu. Nulle part j’ai écrit que Dargaud aurais vendu plus ou moins qu’Albert René.

          De plus, il me semble avoir lu (içi ou là) qu’un Asterix proposé par Albert-René se vendait en France bien plus que les derniers édités par Dargaud

          Il est certain que la mise en place de 2007 est supérieure à celle de 1977. Mais pour le cumul du fonds, ce serait étonnant que Dargaud ait vendu moins qu’Albert René. En revanche, comme je l’ai écrit, il est clair qu’Uderzo a vendu plus d’albums que Goscinny de son vivant, ce qui est logique.

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    • Répondu par Flocon le 15 décembre 2008 à  12:35 :

      Minute Papillon !
      Si je comprends bien, désormais c’est Hachette qui détient les droits d’auteur d’Astérix.
      C’est donc Hachette qui décidera de l’avenir d’Astérix comme pour la création de nouveaux albums ?
      Youpiie !
      Vive Astérix !

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      • Répondu par mutin le 16 décembre 2008 à  00:51 :

        Non, Hachette ne détient pas les droits d’auteur d’Astérix. Mais seulement (ce qui n’est pas si mal) les droits éditoriaux et les droits dérivés. Les droits d’auteurs continuent d’appartenir à Uderzo et à Anne Goscinny, dans la proportion de 50 / 50 pour les albums scénarisés par Goscinny et de 75 / 25 pour ceux entièrement réalisés par Uderzo.

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        • Répondu par Flocon le 16 décembre 2008 à  12:08 :

          Zut alors !
          Droits éditoriaux et droits dérivés englobent ou pas la création de nouveaux albums ou c’est simplement le merchandising ?
          Uderzo et Goscinny enfin leurs héritiers possédent toujours le contrôle de la destinée d’Astérix ou récoltent seulement l’argent ?
          C’est délicat

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          • Répondu par Mutin le 16 décembre 2008 à  16:36 :

            Les droits éditoriaux, comme leur nom l’indique, ce sont les droits d’édition. Pour Astérix, ce sont les droits que Dargaud a longtemps détenus (pour les albums scénarisés par Goscinny), avant de les perdre, suite à un procès. Hachette les a repris, et possède aujourd’hui ces droits sur l’intégralité des albums.

            Quant aux droits dérivés, c’est ce qu’on appelle en anglais le merchandising.

            Les droits d’auteur n’ont rien à voir avec cela.

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      • Répondu par Dominique le 17 décembre 2008 à  00:44 :

        Voilà exactement ce que je ne souhaite pas. Quand on voit les différentes reprises de personnages anciens par des faiseurs plus ou moins inspirés (le pire exemple étant l’usine Jacques Martin qui va de pire en pire), je pense que le mieux est d’arrêter à un moment. Astérix n’était déjà plus lui-même à la fin, les derniers volumes de Goscinny étaient déjà fort faibles et il ne serait pas raisonnable de poursuivre cette entreprise pour faire encore du volume comme les Talon, Lucky Luke, Schtroumpfs. Il vaut mieux relire les albums historiques, tout comme on relit un Gaston ou une Rubrique-à-brac pour lesquels il n’y a jamais eu de continuateurs, fort heureusement. Et puis attendre quelqu’un qui aura le même esprit, mais autrement, et qui nous plaira comme lorsque l’on avait dix ans.

        Voir en ligne : http://champignac.hautetfort.com

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        • Répondu par Flocon le 17 décembre 2008 à  12:49 :

          Bon, rappellez nous ça quand Uderzo aura signé un "renoncement aux droits" à Hachette.
          Pour ce qui est de J Martin, j’approuve à 100% sa décision.
          Si certains lecteurs préfèrent les vieilleries c’est une disposition tout ce qu’il y a de respectable mais ce n’est pas la mienne.
          Si certains albums des aventures des personnages de J Martin sont ratés , hé bien il suffira de procéder à leur refonte dans quelques années.
          Hergé à procédé à de multiples refontes des albums des aventures de Tintin alors....

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          • Répondu le 20 décembre 2008 à  14:11 :

            Le droit d’auteur est inaliénable. On ne peut y renoncer. C’est la loi française et c’est la meilleure façon de protéger les auteurs conte eux-mêmes. Par contre aucune loi n’interdit à un auteur de publier des œuvres de moins en moins bonnes. Et comme les éditeurs et les critiques ne font pas toujours très bien leur travail. Il faudrait une pour obliger les éditeurs à faire plus attention à leurs directeurs littéraires qu’à leurs gens du marketing... hihihi !

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  • Albert Uderzo vend Astérix à Hachette
    16 décembre 2008 22:59, par David

    Et pour la "Grande collection" ? Elle continuera ?

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  • Albert Uderzo vend Astérix à Hachette
    19 décembre 2008 17:43, par Laurent "laissez les héros de BD reposer en paix" Willame

    Dargaud avait raison le jour de l’enterrement de Goscinny . Ce pauvre village gaulois traverse le désert depuis .

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