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Amères Saisons, par Etienne Schréder - Casterman

Par Charles-Louis Detournay le 26 janvier 2008                      Lien  
Entre le rouge qui tâche et le rouge qui saigne, entre les bleus qui cognent et les bleus à l’âme, un drame en noir et blanc d’un homme enfoncé dans l’alcool.

« Je m’appelle Étienne et je suis alcoolique…” Ainsi commence le soliloque de cet homme qui revient sur son histoire et ses souvenirs. En une phrase, tout est dit, ou presque. Bruxelles, été 1979. Dans la prison où il travaille, Étienne boit. Perdu, comme il l’avoue, “sur une mince frontière entre ordre et désordres”. En délicatesse avec sa hiérarchie, il est contraint à la démission. Très vite, c’est la dégringolade, la chute sans fin. Étienne rejoint les exclus de la rue, ponctue de semi-rémissions et de cuites répétées cette errance presque immobile, cette lente dérive. Toulon, Marseille, Paris. Se saboter par la boisson, obstinément. Ce livre retrace son naufrage intime, son no man’s land à lui.

Amères Saisons, par Etienne Schréder - Casterman

L’alcoolisme est un fléau qui touche des milliers de personne dans une Europe qui préfère toujours croire à ces vertus sociales qu’à sa définition de drogue, même douce. Difficile de traiter d’un sujet qui évoque alors souvent le tabou, et la déchéance. Parce qu’il y a une réalité qu’on ne peut romancer, Étienne Schréder nous livre son vécu, son voyage jusqu’au bout de la vie, jusqu’au bout de l’envie.
Mais, « parce qu’un livre n’est pas un égout », il fait alors preuve à la fois de retenue et d’abandon dans un mélange rare de pudeur et d’indécence. Les scènes les plus dures nous sont donc cachées, mais la puissance des mots les évoque d’une telle façon que leur présence nous heurte, comme l’onde de choc d’une explosion dont on n’aurait pas perçu la détonation.

Si la progression du récit est manifeste, certains passages sont parfois récurrents, ou trop longs, et alourdissent le rythme. Mais il est difficile de critiquer quand l’authenticité sert la délivrance face à ses anciens démons. Comment choisir de sucrer tel passage alors qu’il a été tellement important pour l’auteur ? On prend alors le tout, buvant le calice jusqu’à la lie, car la sincérité touche, et excuse les quelques fautes littéraires.

Préfacé par François Schuiten, Amères Saisons est un livre dur, mais pas insurmontable. Par la pertinence du propos et la pudeur utilisée pour se dévoiler, il marquera pour longtemps le roman graphique autobiographique.

(par Charles-Louis Detournay)

Cet article reste la propriété de son auteur et ne peut être reproduit sans son autorisation.

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Toutes les illustrations sont © Etienne Schréder/Casterman

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