Nous avions laissé Buddy et la famille Baker brisée et perdue après la conclusion tragique du crossover « Nécromonde » [1] : la mort de Cliff, le fils de notre héros. Séparé de sa femme et de sa fille, Buddy tentait de faire le point sur sa vie lorsqu’une nouvelle menace fit son apparition, sous les traits de Brother Blood, chef d’une secte qui désire conquérir le Sang, forçant Buddy à reprendre le costume qui avait apporté le malheur à sa famille. [2]
Dans ce quatrième tome, les événements et les actes de bravoures s’enchaînent sur un excellent rythme et nous mènent à grande bataille se déroulant dans le Sang, opposant Brother Blood et ses minions à ses habitants, soutenus évidemment par leurs champions : Maxine et Buddy Baker.
Cette invasion, violente et sanglante, permet également à la famille Baker de se reconstruire. Séparée de ses parents, Maxine se trouve prise au piège dans le Sang, traquée par les fidèles de Brother Blood. Cette situation de crise fait prendre conscience à ses parents que c’est ensemble qu’ils sont forts, et c’est un Buddy Baker qui embrase véritablement son triple rôle, celui de mari, de père et de super-héros, que se jette dans cette mêlée final.
Avec ce tome, la série s’achève donc, car annulée aux États-Unis, comme cela arrive souvent aux séries « confidentielles », et cela en dépit d’une critique US fort élogieuse à son propos. Cependant Jeff Lemire a pu aller au bout de ce qu’il avait à raconter. Les différentes intrigues trouvent donc leur résolutions, de façon satisfaisantes auprès du lecteur, ne le laissant pas sur un goût inachevé comme cela arrive souvent dans l’univers du Comics mainstream.
Le dernier épisode nous propose un épilogue centré, évidemment, sur la famille Baker et sur ce qu’ils ont traversé. La forme prend celle d’un conte narré par Maxine, dessiné par Lemire lui-même, dont le style particulier, assez éloigné des standards mainstream fait merveille. Une très belle façon de conclure une série qui aura su conjuguer une passionnante dimension mythologique et épique, typique à l’univers des super-héros, à une seconde, plus intime et familiale, relevant du « héros du réel ». Une alchimie parfaitement maîtrisée et réussie de bout en bout.
Du côté du dessin, la série a été illustrée par de nombreux artistes : Travel Foreman, John Paul Leon, Steve Pugh, Timothy Green II, Alberto Ponticelli et Cully Hamner, apportant chacun leur touche personnelle. Souvent cette inconstance de style graphique se trouve critiquée, à la fois parce qu’elle nuit à la cohérence graphique de l’œuvre, mais aussi parce que tous les artistes y participant ne seraient pas à la hauteur, baissant ainsi la qualité de l’œuvre.
De notre avis, et dans le cas de ce run d’Animal Man, cette alternance d’artistes ne nous est pas apparue comme problématique. Ces changements, cette mue régulière du graphisme, s’inscrit au final assez naturellement dans le thème métaphosphorique de l’œuvre.
C’est Rafael Albuquerque, collaborateur bien connu de Scott Snyder sur American Vampire qui illustre en grande partie ce dernier tome, et plus précisément les épisodes 24, 25, 27 et 28, y apportant son sens indéniable de la vie en fureur. L’épisode 26 est quant à lui signé Cully Hamner, tandis que le 29, le dernier, est co-illustré par Travel Foreman et Jeff Lemire.
C’est donc sur ce quatrième tome que se conclut ces nouvelles aventures de Buddy Baker, alias Animal Man, un héros mal connu, souvent peu considéré, mais dont les aventures auront su marquer sans aucun doute le lecteur qui aura pris le temps de les suivre. Jeff Lemire y a accompli un travail qui n’a pas à rougir à celui qu’avait réalisé Grant Morrison sur ce même personnage à la fin des années 1980.
La série d’Animal Man est donc terminée mais pas ses aventures sous la plume de Jeff Lemire. En effet le défenseur de la vie, après l’annulation de sa série, s’est trouvé intégré à la nouvelle série créée par l’auteur canadien : Justice League United ! Les amateurs pourront ainsi continuer à suivre Buddy Baker. Voilà en quelque sorte la magie des Comics : la fin d’une série ne signifie pas celle d’un personnage, qui continue sa route ailleurs, confirmant ainsi l’adage selon lequel les héros sont immortels.
(par Guillaume Boutet)
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Animal Man T4. Par Jeff Lemire (scénario & dessin), Rafael Albuquerque (dessin), Cully Hamner (dessin) & Travel Foreman (dessin). Traduction Benjamin Rivière. Urban Comics, collection "DC Renaissance". Sortie le 5 décembre 2014. 144 pages. 15,00 euros.
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Animal Man sur ActuaBD :
Lire la présentation de Jeff Lemire, accompagnée de la chronique du tome 3.
[1] rappelons que ce crossover est narré dans le troisième tome de la série Swamp Thing.
[2] Les épisodes contenus dans Animal Man Tome 4 : L’évolution ou la mort sont :
Animal Man #24-29 (octobre 2013 à mars 2014).
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