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Astérix et l’affaire du Papyrus

Par Didier Pasamonik (L’Agence BD) le 23 octobre 2015                      Lien  
Finalement, on l'a lu le fameux "Astérix, Le Papyrus de César". Et c'est un bon album, qui a fait l'objet hier soir d'une soirée de lancement à Auteuil, en présence d'Albert Uderzo, d'Anne Goscinny et des auteurs de l'album : Jean-Yves Ferri et Didier Conrad.
Astérix et l'affaire du Papyrus
Promoplus, éditeur de César

L’album, d’abord, est-il réussi ? On peut dire oui. Les auteurs ont pris leur sujet en mains. Mieux ficelé, plus subtil que le précédent, ce volume met en scène César en train d’écrire ses Commentaires sur la Guerre des Gaules. Il y relate évidemment son échec face aux irréductibles Gaulois. Mais son très puissant conseiller en communication, Promoplus, une caricature de Jacques Séguéla, lui suggère de retirer ce chapitre peu reluisant. Hélas, l’un des scribes épris de vérité en récupère une copie pour la donner à un "lanceur d’alerte" de Colporteur sans frontières, Doublepolemix, inspiré par le fondateur de Wikileaks, Julian Assange.

Cet album est meilleur que le précédent car Jean-Yves Ferri a mieux réussi la caractérisation de ses personnages en interaction avec son histoire. À commencer par Promoplus, omnipotent dans les coulisses du pouvoir, expert en modes de communication (et ils sont nombreux ici), portant une version antique de la Rolex (qu’il faut avoir avant 50 ans, comme on sait...), et allergique à l’herbe verte. Mention spéciale aussi au vieux sage de la Forêt des Carnutes, Archéoptérix, le maître de Panoramix.

Un papyrus censuré par le conseiller en communication de César.

Il est mieux réussi aussi parmi qu’il a mieux posé, exercice difficile, la trame des running gags. Ainsi cette histoire d’horoscope au début qui lui permet de mieux impliquer Obélix, ou encore Bonemine et Abraracourcix, dans les différentes scènes d’action de l’album. Il y a enfin une véritable réflexion sur l’économie interne des personnages de la série, une meilleure intelligence de l’univers d’Astérix et notamment cette capacité de mêler l’air du temps à l’histoire antique.

Quant au dessin de Didier Conrad, il est meilleur que jamais. On voit qu’il a eu le temps de peaufiner l’album, que les personnages sont de mieux en mieux dans sa main. Il reste cependant quelques scories. Par exemple, le nombre de rayures du pantalon d’Obélix est curieusement réduit par rapport à la version d’Uderzo et le dessin de Madame Agécanonix, ce n’est pas encore tout à fait cela. Le "pont aux ânes" pour un dessinateur d’Astérix reste la scène de bagarre et c’est, là encore, plutôt réussi.

Un exercice difficile : la bagarre.

Banquet gaulois à Auteuil

Hier, c’était la soirée officielle de lancement de l’album. Le tout-Paris de la BD et d’ailleurs se pressait dans un restaurant de la Porte d’Auteuil, privatisé pour la circonstance. Les auteurs, Jean-Yves Ferri et Didier Conrad, accompagnaient Albert Uderzo et Anne Goscinny. Ces derniers n’ont pas tari d’éloges pour ce nouvel opus. Albert Uderzo a été agréablement surpris par l’accueil critique : "Vous avez été mieux reçu que lorsque j’ai repris moi-même le scénario d’Astérix", fit-il remarquer. "J’espère qu’il y a une bonne bibliothèque là haut et que mon père pourra l’y lire, dit de son côté la fille de René Goscinny, avant d’ajouter : je pense que mon père serait fier de cet album."

Albert Uderzo, hier soir, cerné par ses personnages.
Centurion, vestales et aigle imérial étaient de la fête...

Un centurion romain fit irruption dans la salle, tenant sur son poing un aigle royal, à l’œil et au bec redoutables. L’aigle fit un grand vol pour aller se poser à quelques centimètres des auteurs. Heureusement, Astérix et Obélix, également présents en chair et en latex, étaient là pour veiller au grain. Aucun incident à déplorer.

D’autres volatiles ont circulé dans la soirée, où l’on pouvait distinguer, parmi d’autres têtes d’oiseaux, Thomas Langmann, le producteur des films d’Astérix, Louis Clichy, le réalisateur du Domaine des Dieux qui nous annonce qu’il travaille en ce moment sur un nouveau film d’Astérix, le prochain scénariste de Lucky Luke, Jul,...

Tous convergeaient vers les héros du jour pour les saluer dans une soirée "bon enfant", telle que la qualifiait Uderzo. Effectivement, nous sommes tous des enfants quand sort un nouvel Astérix.

Echange de compliments entre les auteurs. De g. à dr. : Albert Uderzo, Jean-Yves Ferri, Anne Goscinny et Didier Conrad, sous le regard d’un centurion de César.

(par Didier Pasamonik (L’Agence BD))

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17 Messages :
  • Astérix et l’affaire du Papyrus
    23 octobre 2015 10:21, par Oncle Francois

    "Par exemple, le nombre de rayures du pantalon d’Obélix est curieusement réduit par rapport à la version d’Uderzo et le dessin de Madame Agécanonix, ce n’est pas encore tout à fait cela."
    Dans la magnifique scène de bagarre reproduite dans l’article, il est clair qu’il y a un flagrant problème au niveau du nombre de rayures du pantalon d’Obélix. Elles sont bien trop larges, comment se fait il que Conrad ait laissé passer ce défaut ? Quant à Madame Agécanonix, Uderzo en avait fait astucieusement la plus jolie femme du village, les autres ressemblant plus à de simples ménagères sans grand intérêt visuel ; il avait raison, car on sait que les jolies femmes apprécient la valeur de l’expérience et la douceur d’un âge avancé. Dommage donc que Conrad n’ait pas réussi à bien la saisir, je suis sûr qu’il va s’en mordre les doigts, arf arf !°)

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    • Répondu par Yo le 24 octobre 2015 à  11:51 :

      car on sait que les jolies femmes apprécient la valeur de l’expérience et la douceur d’un âge avancé.

      Des fois, je me demande si vous ne vivez pas dans un monde où Adolphe Thiers est encore président !

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    • Répondu par Philippe Peter le 25 octobre 2015 à  11:15 :

      "on sait que les jolies femmes apprécient la valeur de l’expérience et la douceur d’un âge avancé"
      c’est ce que l’on doit se dire, pour se rassurer, lorsque l’on est d’un âge avancé et animé d’idées sexistes d’un autre siècle

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  • Astérix et l’affaire du Papyrus
    25 octobre 2015 10:54, par Liaan

    Pour moi, j’en ai lu quelques extraits dans la revue "Casemate" :
    bin, il est sûr que je n’achèterais pas ce "travail de faussaire" !
    Le dessin, c’est déjà pas ça.
    Mais le lettrage des phylactères ! Catastrophique !
    Uderzo, l’amoureux des beaux lettrage ne dit rien ?
    Bon, le scénario, je l’ai pas lu, j’en dirais rien.

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    • Répondu par Gill le 25 octobre 2015 à  13:10 :

      Le summum du snobisme :

      - "un travail de faussaire" puis "le dessin et le lettrage ne sont pas pareils" : il faudrait savoir !

      - "je n’ai pas lu le scénario, je n’en dirai rien" : c’est donc exclusivement le dessin qui a motivé ce refus catégorique... C’est vrai qu’il est horrible.

      - "un travail de faussaire", parce que ce ne sont plus les auteurs originaux qui sont aux manettes. Franquin ou Tome et Janry n’auraient pas dû reprendre Spirou.

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      • Répondu par Liaan le 25 octobre 2015 à  18:23 :

        J’attendais, bien sûr, ce genre de réaction.
        Lorsque j’emploie, à tort, sans doute, le terme de "travail de faussaire", je voulais dire que l’on faisait du travail "à la Uderzo", mais M.Uderzo a quand même pas mal de métier derrière lui. C’est une mauvaise copie, c’est fait "à la façon de", c’est pour cela que j’écris "faussaire", comme le ferait un peintre qui copie servilement un autre peintre, et veux faire croire que c’est du peintre original qu’il s’agit.
        Quitte à faire du "Uderzo", autant le faire bien.
        Je trouve que le lettrage des ballons est très médiocre.

        Quant à Spirou : le personnage appartient aux éditions Dupuis, et non au dessinateur. Chacun à apporté son savoir faire dans ce personnage, le tout sur environ 75 années et quelques. Votre exemple est mal choisi.
        Faire du "Astérix", d’accord, quoique, mais de deux choses l’une : ou on fait du "Uderzo" de qualité, ou on interprête le personnage à sa façon. Vous aimez des exemples ? Celui des "Tuniques Bleues" est un bon exemple d’évolution du dessin, après Salvérius, Lambil a "enrichi" le graphisme.

        Ce que je regrette, c’est que l’on se serve de ces personnages de bandes dessinées pour ne faire que du vulgaire commerce ! Voir les affligeants Lucky Luke, Boule & Bill, Talon (là, c’est le pompon du mauvais goût !), et désormais Corto.

        Non, je veux de la création, et c’est possible.
        Imaginez vous des musiciens qui feraient encore du Mozart ou du Mahler ad vitam aeternam ?

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        • Répondu le 26 octobre 2015 à  05:58 :

          "Quant à Spirou : le personnage appartient aux éditions Dupuis, et non au dessinateur". Certes, mais quant à Astérix : le personnage appartient aux éditions Hachette,et non plus au dessinateur(et scénariste).

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        • Répondu par Gill le 26 octobre 2015 à  11:59 :

          - "Quitte à faire du "Uderzo", autant le faire bien" : personne, à part Conrad, ne pouvait dessiner Astérix aussi bien.

          - "... ou on interprète le personnage à sa façon" : la réaction des fans aurait été pire ! (ex : votre avis sur Achille Talon)

          - "du vulgaire commerce" : Astérix Le Gaulois, c’était déjà du "vulgaire commerce", comme toute BD qui est vendue. Le commerce, c’est ça : s’il y a des gens qui demandent quelque chose, on le leur vend, leur satisfaction avant tout. Uderzo a fait ce choix, et il était le seul habilité à le faire. Il n’y a pas plus de "vulgaires commerces" que de "vulgaires condamnations".

          - "Non, je veux de la création, et c’est possible" : moi aussi. Mais surtout pas d’interdictions (surtout "morales" !)

          - "du Mozart ou du Mahler ad vitam aeternam ?" : c’est pourtant bien ce que font les musiciens classiques. Faut-il le leur interdire ? N’y a t-il pas un public ?

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          • Répondu par Liaan le 26 octobre 2015 à  14:38 :

            Ah, la mauvaise foi lorsque l’on veut critiquer un avis.
            1.- Votre assertion à propos du dessinateur Conrad est bien péremptoire.
            2.- Interprétation du personnage : Encore faut-il de la qualité. Les "Spirou" se sont amélioré au fil des ans, suf plus récemment, à mon humble avis. (Mon avis sur Achille Talon est justifié : on a détruit le personnage. Mon exemple sur les Tuniques Bleue est toujours valable (ce que vous oubliez de signaler).
            3.- "Vulgaire commerce". Il faut bien sûr du commercial, puisque ce sont des produits destinés à la vente, mais sans excès, et toujours avec une meilleure qualité dans le temps. Le fait de continuer de cette horrible manière Astérix est, à mon sens, très regrettable.
            4.- Lorsque je parle de musique, c’était dans un exemple de "fabrication d’œuvres". Si un musicien qui ne "créait" que du Mozart, du Mahler ou du Debussy, nous n’y trouverions aucun intérêt. Je ne visais aucunement l’interprète qui fait son boulot d’interprète. Ma comparaison avec la musique était mal choisie.

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            • Répondu le 26 octobre 2015 à  19:05 :

              Alors considérez Conrad sur Astérix, l’ambulance sur les tuniques bleues, Carrère sur Achille talon, comme des interprètes. Et il peut y avoir de grands interprètes (cf Glen gould).

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              • Répondu par Liaan le 26 octobre 2015 à  20:25 :

                Glen Gould est très décrié dans le milieu musical (interprétation trop rapide), mais Glen Gould, ainsi que La Callas, ont dit une chose qui m’a fait plaisir : c’est que Mozart n’est pas mort assez tôt (sous entendu que sa musique dégénérait).
                Mais n’y voyez aucune allusion sur la bande dessinée. Sinon, où irait-on ?

                Je n’aurais vraiment pas dû faire de comparaisons entre la musique et la bande dessinée, ces deux "médiums" n’ont strictement rien à voir entre eux.

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            • Répondu par Gill le 26 octobre 2015 à  20:00 :

              "Encore faut-il de la qualité" : encore faut-il oser tenter quelque chose, pour espérer avoir de la qualité !

              Je résume : c’était bien de reprendre Spirou ou Les Tuniques Bleues, mais ce n’était pas bien pour Lucky Luke, Boule & Bill, Achille Talon, Corto Maltese ou Astérix.

              Sur quel critère à priori ? On ne le sait pas. Sur quel critère à posteriori ? La "qualité". Qualité que vous êtes capable de juger sans avoir lu l’album. Ma mauvaise foi vous dit bravo !

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              • Répondu par Liaan le 26 octobre 2015 à  20:46 :

                Ah, entre mauvaise foi de chacun, on devrait pouvoir s’entendre.
                "oser quelque chose", certes, mais plus discrètement, ne pas s’attaquer à un "phénomène" comme Astérix. Ou alors, très bien le faire, ce qui est loin d’être le cas.
                Lucky Luke, Boule & Bill, Corto, et ce pauvre Achille Talon, etc. : non. Comme pour Astérix,il faut dépasser le Maître.
                Le cas de Clifton (Macherot) est un cas extraordinaire : la reprise par Degroot et Turk est un véritable sans faute. Plus tard, par d’autres, je trouve que c’est plus mitigé.
                De toutes façon, l’économie, comme partout, a pris le pouvoir, et c’est désastreux pour "l’Art" de la bande dessinée. On ne produira que des valeurs sûres, de qualité vraiment inégale. (J’aime la reprise de Blake et Mortimer, par exemple, c’est dans l’ensemble, assez réussi (sauf le tout dernier "Le bâton de Plutarque" qui est discutable).
                Heureusement que, pour l’instant, ni Tintin, ni Gaston Lagaffe, ni Gil Jourdan (n’est-ce-pas, Gill ?) ne seraient pas repris. (pour les amateurs du graphisme de Maurice Tillieux, lisez les aventures de Jacques Gipar par Delvaux et Dubois). Place à de nouveaux talents, cela ne manque pas.
                Bon, pour conclure, je n’achèterai pas cet album d’Astérix.

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                • Répondu par Gill le 27 octobre 2015 à  00:49 :

                  Oui, concluons. Je n’ai toujours pas compris pourquoi certaines séries pourraient être poursuivies et pas d’autres.

                  Il faut donc ajouter Clifton et Blake et Mortimer aux bonnes reprises (à posteriori), et Tintin, Gaston Lagaffe ou Gil Jourdan à ne surtout pas reprendre (à priori).

                  Ah, si : "ne pas s’attaquer à un "phénomène"".

                  Il faudrait donc compter sur le poids économique d’une série pour définir si on la poursuit ou pas (heu... Gil Jourdan ?). Peut-être un paragraphe à ajouter aux droits d’auteurs : "au-delà de x Millions d’exemplaires parus (+ Gil Jourdan), la série ne pourra pas être reprise par de nouveaux auteurs" ?

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                • Répondu par francois d le 29 octobre 2015 à  18:05 :

                  Heureusement que, pour l’instant, ni Tintin, ni Gaston Lagaffe, ni Gil Jourdan (n’est-ce-pas, Gill ?)

                  Gil Jourdan a été repris du vivant de Tillieux par Gos. Il faut revoir vos classiques !

                  fd

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  • Astérix est bien vivant
    29 octobre 2015 08:46, par RDevelder

    Formidable cet album, un vrai plaisir de lecture, Conrad y a fait graphiquement un travail exceptionnel, il fallait au moins son génie pour succéder au génie d’Uderzo.

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    • Répondu par Pirlouit le 31 octobre 2015 à  11:55 :

      Conrad avait déjà repris avec succès le style Morris (Kid Lucky) et le style Franquin-Batem (Marsu Kids). Actuellement à son sommet avec Uderzo pour Astérix, quelle sera sa prochaine cible ?

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