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Bécassine, notre cousine à tous

Par Céline Bertiaux le 19 juin 2018                      Lien  
Demain sortira en salle “Bécassine !”, une bande dessinée plus que centenaire adaptée par Bruno Podalydès . Le film a déjà subi les reproches d'un groupe indépendantiste breton, Dispac'h, qui appelle à son boycott. En cause, la prétendue bêtise complète de la petite Bretonne qui donnerait une mauvaise image de sa région d’origine. Et pourtant, Emeline Bayart campe un personnage qui est loin d’être idiot !

Bécassine, c’est une héroïne indémodable. En 2016, elle revenait dans un nouvel album par Corbeyran et Béjà. En octobre 2018, ce duo publiera Bécassine baby-sitter. Si ce n’est pas par la bande dessinée, les plus jeunes la connaissent au moins par l’air de Chantal Goya. Et pour les autres, ce film est l’occasion de la découvrir.

Bécassine, notre cousine à tous
Un film familial plein de poésie et haut en couleurs.

Elle prend vie dans le premier numéro de La Semaine de Suzette, le 2 février 1905. Dans ce quatre pages en couleurs, une page demeurait blanche le jour du bouclage, car un auteur s’était défaussé au dernier moment. Il faut improviser, et c’est ce que font la rédactrice en chef de l’époque et un dessinateur de passage pour une autre affaire. Le duo Jacqueline Rivière et Joseph Porphyre Pinchon signe une planche dont le succès ne se fait pas attendre.

Si Bécassine plaît, c’est que le trait de Pinchon est novateur, précurseur de la fameuse Ligne claire. La figure ronde et pouponne de la jeune bonne est simplifiée : elle n’a pas de bouche. Cette simplification, loin de la faire perdre en expressivité, lui donne au contraire la possibilité de porter toute la gamme des émotions possibles. Elle rit, elle pleure, se met en colère.

Bécassine prend des airs de Mary Poppins avec son éternel parapluie rouge.

Vous avez dit bretonne ?

Prise par l’urgence, Jacqueline Rivière s’inspire de son quotidien pour créer Bécassine. Elle a elle-même une domestique bretonne, ce qui était courant à l’époque. D’ailleurs, la bévue racontée par cette première planche a réellement été commise par la servante de Mme Rivière. Pinchon, lui, est natif de Picardie. C’est pourquoi son héroïne porte un costume picard et non breton : dès l’origine, elle n’est pas tout à fait bretonne...

Lolotte, la petite protégée de Bécassine, avec le marionnettiste escroc.

Chez Podalydès, c’est encore pire : l’histoire est centrée sur Paris et non sur la Bretagne. D’ailleurs, les scènes dans le village natal de Bécassine ont été tournées... en Normandie. Le réalisateur explique ne pas avoir voulu insister sur la provenance de la petite bonne, préférant une héroïne plus universelle.

D’ailleurs, Bécassine, c’est finalement un peu comme notre cousine à tous. Elle ne parle pas qu’aux Bretons et les enfants de toutes régions ont grandi avec elle. Elle incarne davantage l’imbécile pas dupe que la bonne bretonne. Sa naïveté est celle de tous les enfants, et ses mésaventures parlent aux jeunes en plein apprentissage des conventions.

Certes, on retrouve en elle les traits caractéristiques et un peu moqueurs de la provinciale qui arrive à la capitale : elle s’émerveille devant un interrupteur, un téléphone ou même un robinet. Mais c’est plus pour souligner sa capacité d’admiration et son envie d’avancer, qui la pousse à l’inventivité. Le film reprend son invention à base de poulies et de poids qui permet de nourrir Lolotte à l’heure prévue, sans avoir à se lever. Pas si bécasse !

Emeline Bayart rend à merveille l’expressivité de Bécassine.

Ce n’est pas la première fois que Bécassine apparaît à l’écran. Un film français réalisé par Pierre Caron, était déjà sorti en 1940, sous l’Occupation, également assorti de protestations de la part des Bretons. Un dessin animé de Philippe Vidal, Bécassine et le trésor viking, lui avait rendu hommage en 2001, remportant davantage qu’un succès d’estime.

La Bécassine de Podalydès

« Je tiens à dire que le film est juste un portrait personnel de Bécassine, une interprétation parmi d’autres. » dit Bruno Podalydès dans le communiqué de presse. Il n’a pas prétention à représenter la Bécassine et revendique les changements qu’il lui a apportés. Il a tenu à la rendre plus burlesque, par exemple en faisant porter à Emeline Bayart de fausses fesses et en lui demandant une démarche balancée, penchée en avant. Aposte em esportes em uma empresa confivel https://22bet-br.org/

Baluchon sur l’épaule, Bécassine réalise son rêve de se rendre à Paris.

La marquise aussi détonne par rapport à la bande dessinée. Karin Viard joue une aristocrate jeune, dépensière, pas à cheval sur l’étiquette. « Dans les albums, la marquise est effectivement une grosse dame assez imposante qui fige l’ordre immuable des choses. Karin la rend plus vive, plus fantaisiste, plus extravagante, plus gentiment fêlée. J’aime l’idée que la marquise accepte l’érosion de l’argent. »

Des personnages modernisés et ingénieux, donc. Ce n’est pas un regard moqueur que Podalydès pose sur Bécassine, mais plutôt attendri et poétique. De quoi changer l’avis de ceux qui pensaient encore que Bécassine n’est qu’une sotte !

(par Céline Bertiaux)

Cet article reste la propriété de son auteur et ne peut être reproduit sans son autorisation.

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Code EAN :

En salle à partir du 20 juin 2018.

 
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2 Messages :
  • Bécassine, notre cousine à tous
    19 juin 2018 11:43, par Laurent Colonnier

    C’est amusant que Bruno Podalydès continue d’adapter les inspirateurs de Tintin, après Rouletabille c’est Bécassine. C’est finalement peut-être une chance pour lui qu’on ne lui permette pas de faire une adaptation de Tintin, ça ne le rend que plus créatif pour en cerner l’idée sous toutes les coutures.

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  • Bécassine, notre cousine à tous
    24 juin 2018 10:37, par Henri Khanan

    Ce film est vraiment sympathique à voir. Effectivement, Bécassine n’est pas la plus nigaude, ses inventions dignes de celles de Gaston seront récupérées, et la fameuse Marquise se fera dépouilller de sa fortune par un escroc-gigolo grec !

    Répondre à ce message

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