L’histoire se déroule à la fin des années 1960 et, comme son titre l’indique, on suit la vie de Laurie (le Spectre soyeux) avant son entrée chez les Watchmen et les événements qui ont marqué la série éponyme. Ou plutôt, c’est ce qu’on pouvait en attendre, les auteurs ayant malheureusement préféré raconter une mini-aventure très creuse.
Petite parenthèse sur le point fort de l’ouvrage : le dessin fin et détaillé et la colorisation vive donnant vie aux années hippies dans lesquelles s’ancre notre histoire. La mise en scène permet également de bien appuyer la narration. Ce n’est malheureusement pas ce qui sauve le volume d’un désintérêt presque total.
Le récit met en scène la jeunesse du futur Spectre soyeux en se concentrant sur la rivalité qu’entretient l’héroïne avec sa mère. le problème résidant dans le scénario qui sert de base pour développer cette relation, prétexte à l’initiation de Laurie.
En dehors des relations entre Laurie et sa mère, nous nous trouvons face à une intrigue curieuse : une pâle copie d’Al Capone, magnat de l’industrie du disque, veut droguer les jeunes de San Francisco pour forcer les hippies anti-matérialistes à retrouver les voies de nos chères grandes surfaces. En voilà un enjeu de qualité ! Sa drogue enverra bien évidemment plusieurs protagonistes de l’histoire tout droit à l’hôpital, histoire de rappeler aux lecteurs et lectrices que la drogue, c’est pas bien...
Ajoutons un méchant peu effrayant qui reste assis dans un fauteuil en grillant cigarette sur cigarette, cliché convenu de parrain de la pègre, que Laurie vient visiter dans son tripot en tabassant ses gardes à trois reprises, sans même qu’il s’en affecte. Situations absurdes dans la catégorie poids lourd...
Si l’on ajoute des personnages secondaires plus creux les uns que les autres qui sont là pour illustrer les méfaits de la drogue d’Al Capone-bis ou encore ce Gurustein, gourou "manipulateur" au patronyme transparent qui effraie à coup de sourires, on est servi ! L’idée du gourou pour insister sur le côté sixties est une intention louable, mais s’il ne sert pas à faire avancer l’histoire, autant mettre un mini-van bariolé en Flower Power.
La conclusion de cette histoire est elle aussi très décevante et ne repose que sur la débilité d’Al Capone-bis : c’est simple, quand il voit quelqu’un qui ressemble -j’insiste sur le "ressemble"- à un policier, que fait-il, lui qui s’est signalé par sa passivité tout au long de ces pages ? Il quitte la ville et tue tous ses associés ! Non seulement c’est idiot et absurde, mais en plus c’est aussi la pire des facilités pour conclure un scénario.
Quand on se remémore la polémique qu’avait créé le préquelle à son annonce, Alan Moore ayant appelé à boycotter le projet, on peut désormais appréhender concrètement la vertu prophylactique du mandement moorien...
(par Vladislav JEDRECY)
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