"La crève" [1] est une étrange maladie affectant exclusivement les adolescents. Transmise par voie sexuelle, elle mutile les corps et provoque d’étranges mutations. Dans une bourgade américaine, les "malades", contraints de vivre en marge de la société, se regroupent dans la forêt avoisinante…
Dans Black Hole, Charles Burns met en place une narration fine et subtile qui utilise notamment les récits des personnages à la première personne, pour mélanger passé et présent. Si le dessin est noir, le récit est limpide. L’auteur développe une œuvre forte et déstabilisante qui ausculte les malaises de l’adolescence dans une Amérique loin d’être triomphante. Si le trait et le noir et blanc utilisés par Burns sont d’une grande douceur, c’est pour mieux les opposer aux destins tragiques et à la putréfaction qui déborde de ses cases. La jeunesse décrite par l’auteur se complaît dans la drogue, les fugues, le suicide et la cruauté. La maladie aspire irrésistiblement ces teenagers vers le trou noir et le néant.
Sombre et cru, cet album est à l’image des tourments et angoisses vécus à cette période où l’on cherche à rentrer dans le monde adulte. Prises de conscience, découverte de la sexualité, langueur adolescente façonnent cette histoire où la jeunesse américaine crie son désespoir. Une grande claque graphique et scénaristique. Magistral.
(par Laurent Boileau)
Cet article reste la propriété de son auteur et ne peut être reproduit sans son autorisation.
Commander cet album sur Internet
[1] "The Bug" en V.O.
Participez à la discussion