Edmond-François Calvo (1892-1958). Cet auteur, tombé un peu dans l’oubli aujourd’hui, est pourtant considéré par le monde du neuvième art comme l’une des figures de proue de la bande dessinée française. Jean-Pierre Mercier, conseiller scientifique du CIBDI [1] évoque son influence sur des auteurs comme Albert Uderzo : « Le jeune Uderzo passait des heures à regarder Calvo dessiner dans son atelier parisien. »
Edmond-François Calvo avait commencé son parcours professionnel comme caricaturiste pour le Canard Enchaîné en 1919. Après quelques années déconnectées du monde de la bande dessinée, où il exerça différents métiers, dont celui d’aubergiste, il revint en 1938 au dessin pour le groupe de presse Offenstadt avec des collaborations dans différentes revues : Fillette, L’Épatant et Junior.
Mais c’est à la fin de la Seconde Guerre mondiale que cet auteur va réellement percer dans le neuvième art avec un récit pour enfants intitulé La Bête est morte !. Sur un scénario de Zimmerman et Dancette, cette satire animalière en deux volumes sur la guerre et sur la chute d’Hitler avait été réalisée de manière très discrète pendant l’Occupation. Calvo y avait retranscrit les Allemands par des loups, les Anglais par des bouledogues et les Français par des lapins.
Influencé par le style de Walt Disney et par les illustrateurs du XIXème siècle comme Gustave Doré, Calvo dessina encore de nombreuses séries animalières entrées dans les annales de la bande dessinée, dont Moustache et Trottinette, Coquin le petit cocker, Cricri souris d’appartement, pour ne citer qu’elles. Une carrière qui s’interrompit trop brutalement, puisque Edmond-François Calvo décéda en 1958. Malgré une réédition de La Bête est morte ! par les éditions Futuropolis en 1970 puis par Gallimard, ce monument de la bande dessinée n’est toujours pas sorti de l’oubli dans lequel il est tombé jusqu’ici. Une situation qui va peut-être changer avec l’initiative de son petit-fils de confier une partie de son travail au musée d’Angoulême.
Superbe cadeau de Noël
Vendredi 12 décembre, malgré le froid hivernal et la neige, la journée des membres du CIBDI s’est ensoleillée lorsqu’ils ont reçu de la main de Franck Laborey, 900 œuvres originales signées par Calvo. Si le petit-fils de l’auteur reste clairement le propriétaire de cet énorme fond, ce sera au musée de la Bande dessinée d’Angoulême de le gérer et de l’exploiter au mieux. Franck Laborey a expliqué son choix : « Pour des raisons de conservation, mais aussi pour permettre au public de découvrir le travail de mon grand-père, j’ai donc décidé de mettre en dépôt une grande partie de son œuvre, ici à Angoulême. Elle y est bien mieux que dans mon armoire. »
On trouve dans ce fond ses premières illustrations pour Le Canard Enchaîné, un grand nombre de planches originales des histoires de Moustache et Trottinette, de Robin des Bois ou du Voyage de Marco Polo, ainsi que l’intégralité des aventures de Rosalie, réalisées en couleur directe dans les années 1945-46. Des couleurs parfaitement conservées. « Elles nous montrent que Calvo était un auteur de talent mais aussi un coloriste génial », témoigne Gilles Ciment, le directeur de la CIBDI.
Jusqu’ici seules quelques planches de La Bête est morte ! étaient exposées à la Bibliothèque <nationale de France. Les choses devraient donc évoluer pour cet auteur de renom, puisque son patrimoine devrait trouver tout naturellement sa place lors de l’ouverture du musée prévue pour juin 2009, au sein des expositions permanentes.
Un come-back qui risque d’autant mjeux de réussir, qu’une adaptation par Matthieu Kassovitz de La Bête est morte ! pour le cinéma d’animation est en cors de développement.
(par Olivier Wurlod)
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Découvrez La Bête est morte, il y a soixante ans
[1] Cité Internationale de la Bande Dessinée et de l’Image.
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