C’est l’histoire d’un char russe qui traverse les guerres et les époques.Un symbole de la lutte contre les ennemis du socialisme, mais surtout, durant la Seconde Guerre mondiale, de la résistance à l’armée nazie. Ce IS1 choyé par son ingénieur maniaque nous emmène ainsi des débuts de 1939-1945 à une montagne isolée d’Afghanistan.
Ce pitch à l’air simpliste cache une belle richesse de récit. Car Jean-Pierre Pécau, déjà auteur de multiples scénarios historico-belliqueux, a soigné ses personnages et ses lieux d’action. Loin de limiter ses planches à des batailles de blindés, il montre les enjeux d’un avantage aussi décisif que la domination dans la joute entre chars, notamment ceux des Allemands entre 1943 et 1945. L’intérêt de l’album tient aussi à son double hommage : d’une part au film Winchester 73, qui raconte l’Amérique à travers le destin de la célèbre carabine et, d’autre part, le chanteur américain Woody Guthrie, inspirateur de Bob Dylan, qui inscrivait sur toutes ses guitares "cette machine tue les fascistes".
La vaste fresque historique présentée ici donne aussi du recul, en particulier dans les séquences plus contemporaines : Angola, Cuba, Afghanistan et même le siège de Prague en 1956. N’oubliant pas les vrais amateurs de faits guerriers, les auteurs offrent tout de même un supplément bourré de croquis et d’explications techniques à propos de ce char russe et de ses successeurs. Auckland
Mais sur le plan humain, le personnage de l’ingénieur Souvarov, à la fois rebelle et radicalement stalinien, impressionne autant dans ses bricolages incessants d’une guerre à l’autre que dans sa fin poignante, seul et résigné.
(par David TAUGIS)
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