Depuis 1992 -mais en réalité déjà bien avant comme le rappelle Wolinski en préface, une tribu d’irréductibles journalistes s’entête à résister contre la paresse intellectuelle et la soumission volontaire au pouvoir en place. Depuis sa relance autour de Cavanna, Cabu et Philippe Val il y a 19 ans, Charlie Hebdo est parvenu à maintenir son indépendance financière et intellectuelle chaque semaine, dépassant aujourd’hui le cap des 1.000 numéros.
Un chiffre symbolique qui, hormis une double page dédiée, n’a pas donné lieu à un numéro spécial de l’hebdomadaire pour sa millième édition du 17 août dernier. La raison ? Charb nous a confié qu’il était contre l’idée d’un numéro spécial par trop "marketing". L’hebdo ne dispose que de 16 pages et l’actualité est prioritaire, pas cet anniversaire, se justifie-t-il.
Du coup, ce sont les éditions Les Échappés qui s’y collent avec un lourd pavé de plus de 300 pages reliées. Une somme qui réunie les 1.000 couvertures de l’hebdo satirique... ou presque. Exit les numéros 61 et 78 illustrés par un certain... Siné qui a refusé de donner son autorisation de publication. Exit aussi le numéro 164 qui, de l’aveu de l’équipe, a disparu dans les limbes de l’oubli. Trois absences qui n’enlèvent rien au plaisir de découvrir, ou de redécouvrir, ce regard irrévérencieux sur ces 19 dernières années. Une sorte de pense-bête contre l’oubli des atrocités de l’actualité et des errements de nos gouvernants.
Pour ponctuer cette succession de unes, Charlie Hebdo a convié ses membres et ses amis à commenter l’actu de chaque année. On y retrouve les signatures de Noël Mamère, Clémentine Autain, Bernard Thibault, José Artur et autres sympathisants.
Tiré à 20.000 exemplaires, Les 1.000 Unes de Charlie Hebdo était déjà référencé dans tous les réseaux de distribution et quasi vendus avant même sa date de sortie le 22 septembre dernier. Les piles ont descendu en quelques jours. Un retirage est déjà en cours et les éditions Les Échappés s’attendent à écouler 45.000 exemplaires à terme.
Cette somme de toutes les luttes arrive au moment où la rédaction de Charlie débute son nouveau millénaire par le déménagement de son siège historique. Finis les beaux quartiers du 3ème arrondissement de Paris, direction les quartiers populaires de la Porte de Montreuil. La crise est passée par là. Elle avait déjà fait monter le prix de l’hebdo de 2€ à 2.50€ l’an dernier. Cette semaine, elle force Charlie Hebdo à réduire son loyer par trois. Une contrainte qui, finalement, devrait rapprocher l’hebdo du peuple qu’il défend.
Pour célébrer l’évènement, l’équipe a organisé un pot dans ses locaux jeudi 22 septembre. On y croisait pêle-mêle Cavanna, Wolinski, Cabu, Charb, Willem, Riss, Luz, Jul, Tignous, Honoré et autres collaborateurs. Mais aussi Clémentine Autain, directrice très médiatique du magazine Regards et Dominique Sopo président de SOS Racisme. L’occasion aussi d’y croiser Clotilde Maillard représentante de l’association RESF (Réseau Education Sans Frontières) qui lutte contre l’expulsion des sans papiers, une des grandes causes de Charlie Hebdo. On pouvait également y rencontrer Allain Bougrain Dubourg de la LPO (Ligue pour la Protection des Oiseaux), nouvel associé de Charlie dans la protection des animaux avec un ouvrage de 160 pages à venir le 20 octobre prochain : Du Goudron et des plumes.
L’aventure Charlie Hebdo n’est pas prête de s’arrêter. Comme l’écrivait Charb dans le numéro 1.000 : "Personne de l’équipe de 1992 ne s’est dit qu’on ferait mille numéros de Charlie... Et aujourd’hui, personne ne se dit qu’on va vers le numéro 10.000, notre objectif n’est pas d’entrer dans le Guinness Book des cons. (Et pourtant, on y va, vers le 10.000 !)"...
(par Dominique Molinaro)
Cet article reste la propriété de son auteur et ne peut être reproduit sans son autorisation.
Participez à la discussion