Charlie Hebdo à nouveau dans les kiosques

Annoncé avec un tirage de 2,5 millions d’exemplaires, Charlie titre à raison :« - C’est reparti » pour son retrour en kiosque !

Et effectivement, dans ce 1179e numéro, un chiot tenant la feuille satirique du mercredi dans la gueule se trouve poursuivi par une meute de bestiaux où l’on reconnaît un jihadiste la kalachnikov entre les dents, Marine Le Pen, Nicolas Sarkozy, un financier, le pape François, et d’autres "emmerdeurs" comme les surnomment Riss, le nouveau patron de l’équipe de Charlie Hebdo, qui s’est enrichie de deux nouveaux collaborateurs : le dessinateur algérien Ali Dilem et le vétéran René Pétillon.

Ali Dilem, une nouvelle plume pour Charlie Hebdo

Photo : D. Pasamonik (L’Agence BD)

Ali Dilem, 47 ans, est un habitué du combat contre l’obscurantisme religieux. Travaillant pour le quotidien algérien Liberté, Dilem est dans la ligne de mire des radicaux islamistes depuis 2001. Il a dû quitter son pays, l’Algérie, pour venir habiter en France en raison d’une loi faite pour lui, "l’amendement Dilem", qui réprime le dessin d’humour et qui prévoit jusqu’à un an de prison pour « offense envers le président de la République » ou envers ses représentants.

Membre de l’association Cartooning For Peace, c’est un personnage exubérant qui n’a pas sa langue, ni son crayon dans sa poche. Il sera, à n’en pas douter, à la pointe du combat satirique contre les intégristes et les extrémistes de tout poil.

René Pétillon, 69 ans est bien connu des amateurs de bande dessinée qui apprécient depuis des années son personnage de Jack Palmer et ses enquêtes diverses en Corse ou dans le milieu de l’art contemporain. Grand Prix d’Angoulême en 1989, il rejoint Le Canard Enchaîné en 1993 où il s’avère être une des plumes les plus incisives avec ses airs de ne pas y toucher.

René Pétillon

Photo : D. Pasamonik (L’Agence BD)

Charlie Hebdo, il l’a dit à plusieurs reprises, n’était pas son type d’humour, lequel n’est ni agressif, ni franchement engagé. Mais les circonstances sont ce qu’elles sont. Il fallait que ce talent, qui a côtoyé celui de Cabu dans le Canard pendant des années, vienne soutenir ce qui est devenu le symbole de la liberté d’expression en France.

Avec ses 250 000 abonnés et sa nouvelle aura internationale, avec les millions récoltés par ses ventes (le dernier numéro a vendu plus de huit millions d’exemplaires, un record historique pour la presse française), Charlie Hebdo a de quoi voir venir, notamment face aux quelques téméraires qui se risqueraient à lui faire un procès.

Mais les enjeux et les menaces sont multiples : le nouveau directeur de la rédaction, Riss, est d’ores et déjà menacé d’une fatwa. Le péril ne vient d’ailleurs pas seulement de là, mais plutôt d’un Charlie Hebdo fantasmé par des millions de lecteurs qui ne le fréquentaient guère. Le contenu des prochains numéros sera scruté à la loupe et il pèsera sans doute lourd sur les épaules des "survivants" : sera-t-il à la hauteur des dessinateurs disparus, tant artistiquement (avec Luz, Willem, Catherine, Riad Sattouf, Jul..., on ne s’inquiète pas) qu’idéologiquement ?

Leur subite aisance financière, si elle leur donne un bol d’air, va être aussi l’objet de toutes les attentions, les convoitises, les jalousies... De la part de tous les emmerdeurs que symbolise la meute de cette couverture, en somme.

Nous souhaitons au journal renaissant la plus belle des réussites.