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Chère Patagonie - Par Jorge Gonzàlez (Traduction : Thomas Dassance, Lettrage : Philippe Glogowski) - Dupuis

Par David TAUGIS le 10 septembre 2012                      Lien  
On trouvera peu d'exemples d'un ouvrage aussi radical publié chez un grand éditeur. Un album plein d'ambition, d'une forme de générosité, de violence. L'auteur y évoque la Patagonie, une région d'Amérique du Sud ancrée dans l'histoire. Énorme pavé aux choix graphiques peu consensuels, il fait, et fera débat dans notre communauté bédéphile.

Perdue dans le sud de l’Argentine, la Patagonie incarne la nature, les racines, un espace à la foi libre et authentique. Dans son monumental album, Gonzàlez l’illustre avec un esprit totalement personnel. Il semble se moquer de perdre bon nombre de lecteurs dès les premières pages. Car ces épisodes qui se succèdent, dont certains scénarisés avec Altuna, Hernan Gonzàlez, Alejandro Aguado, sont surtout l’occasion d’expérimentation et d’expression directe. Brouillons, croquis, crayonnés, aquarelles tantôt soignées, tantôt massives et uniformes, on ne sait à quoi s’attendre d’une page à l’autre. Chère Patagonie - Par Jorge Gonzàlez (Traduction : Thomas Dassance, Lettrage : Philippe Glogowski) - Dupuis

Et même si certains thèmes précis se rattachent précisément à l’histoire de l’Argentine, le style enfouit le contenu, le réduit à un matériau réinterprété. Même la façon de placer les phylactères, qui fusionnent presque avec les dessins, impose aux scènes dialoguées un rôle secondaire. Et régulièrement, ces apparitions de ciels aux teintes à peine différentes... Sur le fond, ce chaos organisé parvient peu à créér l’émotion. Mattotti, avec Stigmates, y était lui parvenu, dans un genre certes différents, mais esthétiquement comparable.

Et la Patagonie dans tout ça : une impression, des bribes d’histoire... L’appendice de fin d’ouvrage s’avère ainsi plus qu’instructif...

Jorge Gonzàlez fait de l’art. Il ne se fixe pas de limites. Là ou Bandonéon, son précédent album, gardait une trame, des personnages bien charpentés, Chère Patagonie vise constamment le contre-pied, l’allégorie graphique, l’illustration la plus proche de l’organique, pour tenter toucher au plus profond. Une forme de poésie pour les uns, d’auto-complaisance pour les autres, dont je fais partie. Chère Patagonie par González (Jorge) © Dupuis 2012

Notez que l’éditeur annonce une réimpression après épuisement du premier tirage.

(par David TAUGIS)

Cet article reste la propriété de son auteur et ne peut être reproduit sans son autorisation.

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Dupuis
 
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5 Messages :
  • aie aie aie ! Ils veulent nous refaire le coup de "Portugal"...

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    • Répondu par Sergio Salma le 12 septembre 2012 à  09:45 :

      "Ils" ?! Portugal est sorti il y a pas 2 ans. L’éditeur est vite allé chercher un autre auteur , ils lui ont commandé un pavé de je ne sais combien de pages pour vite " refaire le coup de Portugal". Quelle remarque idiote.

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  • Merci et bravo d’avoir indiqué les noms du traducteur et du lettreur. Ce sont des professions qui passent souvent sous le radar et dont l’importance pour la lecture est pourtant capitale.

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  • Je trouve que, loin d’être un pur objet formel, Chère Patagonie est au contraire un livre fortement politique. Il parle de la manière dont l’Argentine refoule son passé précolombien, comment elle cherche à domestiquer sa part sauvage et libre, comment elle s’occidentalise et s’uniformise. Un livre qui part à la recherche des traces d’une civilisation en voie de disparition : film anthropologique oublié, témoignages, vieux cimetières indiens. Un livre sur la mémoire familiale. Superbe.

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  • Cet album monumental aux allures de pavé a attiré mon attention en librairie. J’ai donc lu la première histoire debout (je suis un bon client...). Trait et couleurs superbes, par contre je n’avais pas bien tout compris. Heureusement figure à la fin de l’ouvrage un ensemble de notules qui explicitent le tout (je connais mieux l’histoire de la France que celle de la Patagonie, que l’on n’enseigne guère en lycées). Et là, par miracle, tout s’éclaire !

    Je sens que je vais retourner voir mon libraire sympa, votre article m’a convaincu dans mon intention d’achat. Dupuis n’est pas que l’éditeur de la gentille soupe populaire tout-public des scénarios de Raoul Cauvin, avec ce beau livre, il démontre qu’il peut faire aussi audacieux (et plus superbe)que bien des labels indés (style l’Asso, Cornélius ou Rackham). J’ai remarqué que la maquette était signée de celui qui nous a fourni les magnifiques Intégrales Gil Jourdan...et mon libraire m’a dit que le livre serait bientôt réimprimé (et oui, la qualité se vend, même en temps de crise).

    Bon, pour finir, ce livre me semble posséder toutes les qualités pour être nominé à Angougou. On parie ?

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