Perdue dans le sud de l’Argentine, la Patagonie incarne la nature, les racines, un espace à la foi libre et authentique. Dans son monumental album, Gonzàlez l’illustre avec un esprit totalement personnel. Il semble se moquer de perdre bon nombre de lecteurs dès les premières pages. Car ces épisodes qui se succèdent, dont certains scénarisés avec Altuna, Hernan Gonzàlez, Alejandro Aguado, sont surtout l’occasion d’expérimentation et d’expression directe. Brouillons, croquis, crayonnés, aquarelles tantôt soignées, tantôt massives et uniformes, on ne sait à quoi s’attendre d’une page à l’autre.
Et même si certains thèmes précis se rattachent précisément à l’histoire de l’Argentine, le style enfouit le contenu, le réduit à un matériau réinterprété. Même la façon de placer les phylactères, qui fusionnent presque avec les dessins, impose aux scènes dialoguées un rôle secondaire. Et régulièrement, ces apparitions de ciels aux teintes à peine différentes... Sur le fond, ce chaos organisé parvient peu à créér l’émotion. Mattotti, avec Stigmates, y était lui parvenu, dans un genre certes différents, mais esthétiquement comparable.
Et la Patagonie dans tout ça : une impression, des bribes d’histoire... L’appendice de fin d’ouvrage s’avère ainsi plus qu’instructif...
Jorge Gonzàlez fait de l’art. Il ne se fixe pas de limites. Là ou Bandonéon, son précédent album, gardait une trame, des personnages bien charpentés, Chère Patagonie vise constamment le contre-pied, l’allégorie graphique, l’illustration la plus proche de l’organique, pour tenter toucher au plus profond. Une forme de poésie pour les uns, d’auto-complaisance pour les autres, dont je fais partie.
Notez que l’éditeur annonce une réimpression après épuisement du premier tirage.
(par David TAUGIS)
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