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Christian De Metter : "L’échec est un élément important dans la construction d’un auteur"

Par Christian MISSIA DIO le 6 décembre 2012                      Lien  
Christian De Metter adapte un polar de Douglas Kennedy, "Piège nuptial", ou les mésaventures tragiques d'un homme sans but, en plein cœur du bush australien.
Christian De Metter : "L'échec est un élément important dans la construction d'un auteur"
Piège Nuptial

Piège nuptial est votre troisième adaptation, coup sur coup. Qu’est ce qui vous motive tant à adapter des romans ?

Disons qu’aujourd’hui, grâce au succès critique et commercial de Shutter Island, j’ai plus de facilités à demander les droits d’adaptation d’une œuvre qui m’intéresse, comme c’est le cas avec ce livre de Douglas Kennedy. Il y a quelques, années, j’aurais probablement eu plus de mal à obtenir ce feu vert des ayants droit, donc aujourd’hui, j’en profite. J’ai lu Piège nuptial il y a environ douze ans et j’ai toujours été fan du travail de Douglas Kennedy. Par contre, ma prochaine BD sera une histoire totalement originale.

On peut faire un lien entre vos trois dernières adaptations. Dans Shutter Island, le protagoniste de l’histoire est hanté par le souvenir de sa femme. Dans Scarface, il est abattu par son frère et dans Piège nuptial, celui-ci est kidnappé par un clan vivant reclus dans le désert australien. À travers ces trois livres, vous semblez dépeindre une image peu reluisante de la famille…

Je n’avais jamais vu les choses sous cet angle-là. À la base, j’étais plus dans le thème de l’identité, le rapport à l’autre – donc de la famille – dans la construction personnelle. Mais effectivement, le thème de la famille revient, même dans Le Curé ou le héros devient curé à cause de la pression de sa mère, alors que lui ne le souhaitait pas, car il aimait une jeune femme. Dans Marilyn aussi, il y a ce jeune homme qui a une relation particulière avec sa mère…

Comment avez-vous procédé pour la transposition de ce roman en BD ?

J’ai privilégié une adaptation fidèle du roman mais, dans l’œuvre de Douglas Kennedy, il y a un narrateur, ce qui crée une distance, et un certain humour aussi, car nous pouvons lire les pensées des personnages. Je n’ai pas repris ces aspects du roman car je voulais que le lecteur s’identifie totalement au personnage de Nick. De ce fait, mon histoire est plus sombre que celle du bouquin, qui l’était déjà pas mal.

N’avez-vous jamais été tenté par le cinéma ?

Non, car je suis très attaché au côté solitaire de mon métier. On assume ses choix artistiques de A à Z, que le succès soit au rendez-vous ou non. Je pense que l’échec et la possibilité de se tromper sont des éléments importants dans la construction d’un auteur. Le cinéma me parait être davantage une grosse industrie dans laquelle nous ne sommes qu’un pion parmi d’autres. Le compromis semble primer sur le reste.

Dans une précédente interview, vous aviez déclaré que la couleur est un élément déterminant de votre style car, plus le temps passe, moins vous vous sentez rassuré par votre dessin. Avez-vous encore ce sentiment aujourd’hui ?

Oui et non, car je vois plus les choses en volume. J’ai besoins du pinceau pour construire mon dessin car autrement, j’ai l’impression de commettre plus d’erreurs. Et puis, je jouis d’un certain confort de travail avec le pinceau, ce qui n’est pas le cas lorsque j’utilise un crayon ou un stylo bille car j’ai rapidement des douleurs dans les mains.

Dans le cas de Piège nuptial, j’ai effectivement procédé ainsi, mais je suis revenu à la plume après la pose des couleurs pour renforcer le côté "cradingue" de l’ambiance.

Je pense que j’aurai toujours des doutes sur mon dessin mais cela constitue plus un moteur qu’autre chose : ça pousse à me dépasser, ce qui n’est pas plus mal au final.

En dehors de la bande dessinée, vous êtes aussi un passionné de musique. Vous aviez déclarez un jour que la BD vous permet d’extérioriser vos démons. Est-ce le même mécanisme avec la musique ?

C’est vrai que la musique constitue pour moi un espace de liberté qui me permet d’évoquer des ambiances diverses, mes humeurs. Elle me permet d’exprimer mon inconscient. C’est une récréation. Tandis que mon métier d’auteur de BD est une discipline beaucoup plus maîtrisée car je sais ce que je raconte, je sais où je veux aller. Je choisis ce que je veux raconter et surtout, ce que je veux cacher ou sous-entendre...

Est-ce que la musique nourrit votre travail d’auteur de BD ?

Il n’y a pas vraiment d’effet de vase communiquant. J’avais un projet intitulé Swinging London que j’avais fait pour Soleil et dans lequel je voulais expérimenter les deux aspects, mais il n’a jamais trouvé preneur car il n’était pas assez abouti.

Sur quoi travaillez-vous en ce moment ?

Je travaille sur œuvre originale qui sera un western. Il n’est pas encore signé mais il devrait sans doute être publié chez Casterman.

(par Christian MISSIA DIO)

Cet article reste la propriété de son auteur et ne peut être reproduit sans son autorisation.

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Code EAN :

Piège nuptial - Par Christian de Metter d’après le roman de Douglas Kennedy - Casterman / Rivages Noir

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