Nous vous avions déjà présenté l’exposition que le Festival de Blois consacrait à Dany en novembre dernier. "C’est globalement le même matériel, nous explique l’auteur facétieux dès notre arrivée, Mais nous avons retiré une partie pour la compléter d’une autre : beaucoup d’écoles vont venir visiter l’exposition afin de comprendre ce qu’est le dessin et comment on parvient à une planche de bande dessinée. Mais toutes les planches présentées ne sont pas chastes pour autant !"
L’accrochage allie sobriété et efficacité : une centaine de planches (ou de reproductions) sont accrochées à hauteur de regard sur un fond blanc. De quoi se projeter réellement dans l’univers de l’auteur. Puis, à proximité, des vitrines présentent des carnets de croquis, des storyboards, des essais de planches, bref tous les éléments qui conduisent à la réalisation de celles-ci et qui seront des vecteurs pédagogiques pour expliquer aux jeunes la construction d’une bande dessinée.
On profite également d’une grand palette de styles : le noir et blanc sur Olivier Rameau tranche avec la couleur directe des Guerrières de Troy au rez-de-chaussée. Les décors d’Equator ou les planches d’Histoire sans héros donnent plus de matière au trait de Dany, laissant apercevoir les possibilités d’un style qui touche aussi bien à l’humoristique qu’au réaliste. Quant au semi-réaliste, les cinq planches de la Bête du Gevaudan (un court épisode paru dans un collectif) réalisées entièrement au feutre impressionnent par leur technique.
"Il s’agit d’une parodie des Histoires de l’Oncle Paul publiée dans le Journal de Spirou, nous explique Dany. Écrite par Yann & Conrad, ils m’ont tous deux poussé à expérimenter cette technique, nouvelle pour moi, et j’y ai pris beaucoup de plaisir ! Bien entendu, pour coller à l’original, le script se composait de quatre planche. Mais j’en ai réalisées cinq ! J’ai toujours eu du mal à respecter le découpage de mes scénaristes. Je prends plus de place, surtout pour l’action."
De l’autre côté au premier étage, en traversant l’espace réaliste consacré à Transylvania où l’on prend soin d’analyser les croquis et décors réalisés lors du voyage d’étude, il est nécessaire de s’attarder sur l’autre galerie qui rassemble des travaux pour le Lombard. On y retrouve bien entendu les planches de Bernard Prince. "Il est rare que je réalise des collages sur mes planches, nous détaille notre guide attentionné. Dans ce cas, le gros plan de l’Africain avait été refusé par l’éditeur, et j’ai dû revoir ma copie".
Toujours dans la galerie nord, on retrouve le récit que Dany a réalisé pour le Super Tintin consacré aux Indiens. Une immersion poignante et dont le trait contraste une nouvelle fois avec les styles des autres récits.
Avant de rejoindre la dernière partie consacrée aux planches coquines et aux illustrations, un temps d’arrêt est nécessaire pour lire (et admirer) le récit d’une quinzaine de pages commandé par un éditeur turc et inédit en français. Cette découverte d’Istanbul démontre une nouvelle fois la virtuosité de Dany, son découpage contemporain et son traitement grand public.
Après l’incontournable passage des Blagues Coquines, la dernière salle renferme des bijoux d’illustrations. Toute une série commandée par la Région Wallonne pour mettre en avant les châteaux de leur patrimoine, mais on s’arrêtera surtout devant le travail réalisé pour un projet animé destiné à un studio de Los Angeles, mais qui ne vit malheureusement jamais le jour.
"Magic Circus était scénarisé par Yvan Delporte raconte Dany. Nous avions réalisé un pilote de 55 minutes, mais cela n’a jamais été plus loin. Le projet a été racheté par des Hollandais, puis des Français de Arles, mais il a toujours manqué d’un support télé pour que le projet aboutisse. Nous en avions tiré un dépliant assez luxueux que nous présentons donc des années plus tard au public."
Avec les pages de Rêve d’Istanbul, de La Bête du Gévaudan, du récit sur les Indiens, des illustrations de Magic Circus et autres travaux pour le cinéma entre autres, un éditeur pourrait regrouper cela pour proposer un recueil d’inédits de Dany en albums.
En attendant, cette belle exposition propose de découvrir les multiples facettes d’un auteur qu’on catalogue parfois trop souvent. Un beau voyage !
(par Charles-Louis Detournay)
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L’expo Dany se déroule du 14 février 2014 au 20 avril 2014. Elle sera suivi d’une exposition consacrée à René Hausman (à partir du 9 mai).
Rouge-Cloitre
Rue de Rouge-Cloître 4
1160 Auderghem (Bruxelles)
Tél. : + 32 2 660 55 97
info@rouge-cloitre.be
Ouvert du 14 février au 20 avril 2014, du mercredi au dimanche de 14 à 17h.
Entrée : 3 € - 2 € - gratuit < 12 ans.
Photos : CL Detournay
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