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Demain les oiseaux - Osamu Tezuka - Delcourt

Par François Peneaud le 20 décembre 2006                      Lien  
Après les singes et les chiens, les oiseaux future espèce dominante? Osamu Tezuka nous entraîne dans une fable de science-fiction bien moins prévisible qu'il n'y paraît au premier abord.

Les histoires de science-fiction où l’Homme est remplacé par une autre espèce ne manquent pas. Pour ne citer que deux des plus connues, La Planète des singes, à l’origine un roman de Pierre Boulle écrit en 1963, et Demain les chiens, superbe roman de Clifford D. Simak de 1951, sont toutes deux parues un bon moment avant ce gros volume (320 pages) de Osamu Tezuka, publié en 1971. Le titre français de cet album fait d’ailleurs directement référence au titre français de l’œuvre de Simak, qui s’intitulait à l’origine City (Ville), alors que le titre japonais du Tezuka donne quelque chose comme Le Système de l’Homme-Oiseau. Le traducteur français du Tezuka s’est donc bien amusé, et à bon escient.

Cette collection de courtes histoires racontant sur plusieurs millénaires l’avènement et la consécration de l’oiseau intelligent qui va remplacer l’être humain, commence avec l’apparition de plusieurs volatiles doués d’un intellect, à la suite de leur alimentation avec une mystérieuse substance que l’on apprendra par la suite être d’origine extraterrestre. Très vite, ceux-ci s’en prennent aux humains, mettant le feu un peu partout et prenant goût à l’anthropophagie. L’humanité est désarmée face à une gent ailée qui s’organise rapidement et fait même preuve de capacité de contrôle mental...

L’histoire de Tezuka continue là où s’arrêtaient la nouvelle de Daphné du Maurier et le film de Hitchcock, par la défaite de l’humanité et la description des différentes civilisations oiseaux qui vont se succéder, en parallèle avec la déchéance toujours plus prononcée de l’Homme, à quelques exceptions près. Et le tableau n’est pas joli : abordant suivant les moments politique, économie, religion, amours interdites et autres sujets de société, Tezuka nous montre des oiseaux qui ne sont pas plus capables que les humains de s’entendre ou de créer une société équitable. Ils en viennent même rapidement à pratiquer le cannibalisme.

Comme souvent chez Tezuka, le ton de l’histoire et le style du dessin paraissent en opposition pour le lecteur occidental qui ne serait pas familiarisé avec l’œuvre de l’artiste japonais. Imaginez le style employé pour Astérix utilisé pour, par exemple, la Guerre des tranchées de Tardi. En tout cas, le contraste est saisissant et participe de la fascination qu’éprouve le lecteur pour cette peinture quelque peu désespérée du comportement des animaux intelligents. Nul angélisme, donc.

L’humour n’est pas loin non plus, aussi noir soit-il : comme nous l’avons dit, l’intelligence se développe chez les oiseaux à la suite de l’intervention d’extraterrestes, convaincus que les volatiles feront mieux que les singes sans poils. Les quelques séquences, y compris celle qui clôt l’album, où l’on découvre ces extraterrestres et leurs motivations sont un grand moment d’humour cynique.

Demain les oiseaux est une œuvre qui réjouira les amateurs de science-fiction engagée, où le message ne sert pas de morale mais plutôt de prise de conscience. La capacité de Tezuka à nous emmener sur des chemins de traverse est toujours ici bien présente.

(par François Peneaud)

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1 Message :
  • Demain les oiseaux - Osamu Tezuka - Delcourt
    26 décembre 2006 23:41, par Thomas Clément

    Je me permets de rappeler aux lecteurs d’Actuabd.com qu’il y avait dans la revue "Le Cri qui tue" (trimestriel suisse édité par Atoss Takemoto en collaboration avec Kesselring entre 1978 et 1980 et consacré à la publication en français de bandes venues du japon) une série d’Osamu Tezuka intitulée "Le Système des Super-Oiseaux".

    Evidemment, la traduction n’est plus la même, et il serait peut-êtr intéressant de comparer les deux, mais de toutes manières, cette lecture est à conseiller.

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