Dans Le Syndrome de Warhol, Renaud Cerqueux et David Cren emmène Rosse Louisse et Jared dans la traque d’un homme portant une scarification sur le front. Les personnages, caricatures vives et fêlées, nous plongent dans ce « road movie » de série B, digne mélange des genres entre Tarantino et les frères Coen.
Ces paumés, emportés par la folie d’un scientifique nazi, se retrouvent à Las Vegas en plein milieu d’une convention de sosies d’Elvis. Les deux jeunes auteurs remarqués pour Dérapage publié chez Rackham nous enchaînent dans un trip psychédélique aux influences New Wave. Avec une partition rythmée qui défile sans fausse note, ils nous promènent entre philosophie, bas instincts et expérience SM.
Cet objet BD non identifié se confronte à « la reproduction des icônes populaires à l’infini » dans une société du « star system » où l’identification à un mode de pensée global et unifié est recommandé. L’histoire menée à la vitesse des déhanchements du King est jubilatoire, pleine d’idées saugrenues jusqu’à une surprenante et perturbante révélation finale.
Le jeu sur la mise en page est excellent, les cadrages inspirés et le crayon virevoltant. Humour noir et situations extrêmes, entre répliques saignantes et absurdes, déroutent et accrochent. Cet album aéré perpétue un regard sur l’image exacerbé jusqu’au grotesque que n’aurait probablement pas renié un Andy Warhol.
Prenez un routier amoureux de tennis féminin slave qui doit convoyer un béluga en Biélorussie, une histoire d’amour improbable et une baraque à frites belge, mélangez bien le tout et vous obtiendrez la déambulation de Melo Bielo.
Dans cet autre « road movie » au caractère erratique, Frédéric Felder, animateur de Ferraille et Olivier Besseron nous montent un récit délirant où des personnages à la réflexion au ras du bitume, accumulent les menus bonheurs et les petites peines.
À la marge souvent, les protagonistes se tiennent néanmoins avec un aplomb considérable au-delà des réalités factuelles. Une tragi-comédie loufoque à l’humour qui tache dont le récit acide nous emmène loin, très loin, tout en restant très proche d’un extraordinaire commun.
L’aveuglement des personnages sur leur sort, les yeux blancs, sans pupille, permet au scénario de multiplier les volutes. Cet album fou et lucide a été distingué par le prix Charlie Schlingo.
(par Vincent GAUTHIER)
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