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"Elfes", la série-concept de Soleil, aligne son deuxième atout

Par Charles-Louis Detournay le 30 avril 2013                      Lien  
C'est déjà cette semaine que sort le deuxième album de l'univers d'Elfes. L'occasion d'analyser en détails les deux premiers titres et de donner la parole au scénariste du troisième opus, Olivier Peru.

C’est en février dernier que les éditions Soleil lancèrent leur machine de guerre pour l’année 2013 : cinq albums en moins d’un an, portés par des dessinateurs doués et des scénaristes réputés. L’idée est simple et presque imparable : revenir aux fondamentaux de Soleil, l’Heroic Fantasy, tout en apportant une thématique aussi connue que peu visitée : les Elfes.

L’éditeur-scénariste Jean-Luc Istin, co-créateur de cette série-concept avec Nicolas Jarry, nous expliquait les particularités qu’ils y avaient apportées : "Nous désirons que les lecteurs lisent ces tomes comme ils le désirent [...] : chaque auteur est libre de bichonner son one-shot et chaque lecteur est libre de se procurer l’album qui le séduit le plus. Ceci étant, bien entendu, les cinq albums ensemble confèrent plus de sens qu’un seul. C’est ainsi qu’on découvre le mieux cet univers."

"Elfes", la série-concept de Soleil, aligne son deuxième atoutPour convaincre, une série multi-dessinateurs doit également présenter une couverture accrocheuse. Plutôt que de demander à un autre artiste de réaliser le liant uniforme entre les albums, comme pour Le Triangle Secret, Zodiaque, Voyageur ou Uchronie[S], chaque dessinateur ’signe’ son album avec son personnage principal en pied, remaquetté à la sauce celtique. De cette présentation commune, il se dégage un sentiment de puissance autant que d’uniformité .

Mais même avec des scénaristes habiles et expérimentés comme Corbeyran, Istin ou Jarry, même avec un concept fort où chaque duo d’auteurs peut convaincre avec son propre one-shotavec une thématique imposante, même avec un marketing et des couvertures accrocheuses, la réussite d’une série-concept repose avant tout sur la magie développée par chacun des récits. Analysons donc ceux-ci en détails.

Les Elfes bleux d’Istin : la magie du rebondissement

Jean-Luc Istin se jette à l’eau en proposant une race innovante d’Elfes : les Elfes bleus. Son intrigue débute alors que toute la population d’une ville portuaire de cette race a été massacrée. Un tandem composée d’une Elfe et d’un aventurier enquête alors que toutes les pistes mènent vers un clan d’Yrlanais, ces Hommes du nord qui haïssent ces êtres bleus.

Parallèlement à cela, dans la cité île d’Elsemur, Vaalan une jeune Elfe bleue passe l’épreuve de l’eau des sens. La mère prophétesse voit son avenir proche, un avenir lié au crystal sacré. « Celui qui contrôle le crystal, contrôle l’océan. » Cette annonce fait grand bruit et il se murmure que Vaalann pourrait être le messie que les Elfes bleus attendent depuis plusieurs générations...

Les premières pages permettent au lecteur de rapidement "s’immerger" dans le monde des Elfes bleus
Duarte - Istin - Soleil 2013

Ce premier tome est d’une qualité exceptionnelle ! La première page ré-aligne d’entrée les connaissances des experts et novices en Heroic Fantasy : qui sont les Elfes, leurs différences avec nous ? La double page qui suit (présentée ci-dessus) concrétise la thématique du one-shot : sa part de rêve et de surprise avec les ours blancs montés par les héros, sa grandiloquence avec cette cité d’Elfes surprenante et enfin, le suspens qui va monter crescendo jusqu’à la fin de l’album.

Comme l’expliquait Istin lui-même, son duo avec Kyko Duarte fonctionne parfaitement. Grâce à son expérience de dessinateur, le scénariste sait laisser la place au graphisme afin de conférer de l’ambiance et le souffle de l’album, imposant quelques doubles pages pour le rythme. Le travail de Duarte déplie son univers de façon impressionnante : Humains, Orcs, Elfes... et même la trop longue scène d’action permet finalement d’aérer la densité générale du scénario.


Entre les combats que se mènent les humains et les elfes, l’enquête pour comprendre l’origine du génocide, la quête du crystal et de ses pouvoirs, ainsi les quelques flashes-backs qui expliquent le passé des Elfes bleus, on ne s’ennuie pas une minute dans ce premier tome qui donne le tournis.

Que l’on soit ou non amateur d’Heroïc Fantasy, Le Crystal des Elfes bleus est un récit suffisamment fort pour captiver son lecteur.

Les Elfes sylvains, plus proches de la tradition

Second co-créateur de l’univers de cette série-concept, et sans doute le plus motivé de deux comme l’expliquait Istin, c’est Nicolas Jarry qui scénarise le deuxième tome consacrée aux Elfes sylvains, qui sort ce jeudi 2 mai.

Ici, la cité de Eysine est assiégée par des mercenaires Orcs. La situation est désespérée, et la fille du roi décide, contre l’avis de tous, d’aller demander de l’aide aux Elfes sylvains. Pourchassée par les Orcs, elle s’enfonce toujours plus profondément dans la forêt et trouve refuge dans une citadelle en ruine, un sanctuaire jalousement préservé par les Elfes. L’ancien pouvoir qui hante les lieux reconnaîtra-t-elle la jeune femme comme la dernière descendante des druides ? Ce qui pourrait sauver son peuple revêtirait pour elle la plus terrible des malédictions...

Jarry - Manconi - Soleil 2013

Si le premier tome consacré aux Elfes bleus innove en bien des points, ce second tome se distingue par son classicisme. On retrouve les Elfes habitants des bois et préservant la nature, la vision originelle et assez répandue de ce peuple imaginaire. Nicolas Jarry nous avait récemment conquis avec des titres comme Troie, Mercenaires, Durandal, Les Brumes d’Asceltis, Les Princes d’Ambre, La Rose et la croix notamment.

Avec L’Honneur des Elfes sylvains, il livre un scénario dopé par une succession de flashes-backs et de scènes d’action. Un récit haut en couleurs et sans temps mort.

Trop d’innovations peuvent égarer le lecteur, trop peu peuvent le décevoir. Ce n’est pas le cas ici : ce second tome plus linéaire offre également ses morceaux de bravoure, ses rebondissements et ses batailles. On fait d’ailleurs mieux connaissance avec les autres espèces : les nains et les orcs, et surtout en approchant les elfes noirs, on devine que leur rôle sera central et décisif.

Jarry - Manconi - Soleil 2013
Olivier Peru
Photo : DR - (c) Soleil

La collaboration de Nicolas Jarry avec Gianluca Maconi fonctionne à merveille, comme on l’avait vérifié dans Elya. Une harmonie qui n’est pas toujours présente dans les séries multi-dessinateurs, et celle-ci permet de donner de la cohérence à la magie druidique et à l’évolution de la relation entre la princesse et l’elfe, élément-pivot du récit. Avec sa facture sobre et classique, ce deuxième tome assoit donc solidement la crédibilité d’Elfes et en attendant des prochains albums plus séduisants encore.

Elfe blanc, cœur noir

Pour nous en convaincre, nous avons interrogé Olivier Peru, scénariste du troisième titre de la série qui sortira cet été, un titre qui sera suivi par les scénarios de Corbeyran et de Marc Hadrien. Olivier Peru nous avait déjà conquis avec Zombies, [Assassin, Nosferatu, In Nomine et Lancelot>art12801], ainsi que, récemment, avec l’excellent Mjöllnir T1.

"Ce qui fait la force d’« Elfes », nous explique-t-il, C’est l’alliance d’autant de talents dans un univers partagé, un peu à la Marvel. En plus d’avoir une immense arène dans laquelle on met tous nos jouets pour nous amuser ensemble, cette équipe de dix auteurs permet à la série d’avoir un rythme de parution rapide. Ainsi, nous pouvons sortir un bouquin tous les trois mois et ne pas faire attendre le lecteur pendant un an entre chaque album."

En avant-première, une page du T3 d’Elfes : Elfe blanc, cœur noir, sans les bulles de dialogue
Par Olivier Peru - Stéphane Bileau - Soleil 2013

Olivier Peru est le scénariste du troisième tome consacré aux Elfes blancs, prélude aux deux prochains récits où l’on découvrira les semi-elfes et les fameux elfes noirs. Nous avons demandé ce qui l’intéressait dans la typologie de ces personnages :

"Je voulais choisir une couleur extrême pour développer une histoire basée sur l’émotion tout en me donnant l’opportunité de travailler sur des retournements de situation d’ampleur. Comme un autre scénariste, Marc Hadrien, était intéressé par les elfes noirs, j’ai opté pour les blancs, qui se devaient d’être sages, anciens, et de vivre à l’écart des autres, sur de lointaines îles isolées. À partir de ce point de départ, j’ai proposé à mes collaborateurs un pitch qui me permettait de jouer avec ces règles tout en les détournant. Je fais partie de ceux qui pensent que de la contrainte naît l’inventivité et c’est ainsi que j’ai développé le récit d’un voyage qui nous permettait également d’explorer par procuration la civilisation des elfes blancs."

En avant-première, une page du T3 d’Elfes : Elfe blanc, cœur noir, sans les bulles de dialogue
Par Olivier Peru - Stéphane Bileau - Soleil 2013
Olivier Peru est également romancier, et vient de publier un nouveau livre chez J’ai Lu : Martyrs (Medieval Fantasy)

"À l’image de la couleur qui les caractérise, les elfes blancs sont censés être purs et sages, ils sont un peu des êtres de lumière, des guides. Pour moi, cela leur donne un complexe de supériorité qui les pousse à se considérer comme les gardiens du monde. En conséquence de quoi, ils protègent les choses amenées à disparaître. Cela peut concerner des œuvres d’art, des livres, des idées ou des créatures.

Dans cette perspective, j’ai alors créé une caste d’elfes blancs qui voyage de continent en continent pour préserver ce qui mérite de l’être. J’ai ensuite pensé aux enjeux qui pouvaient animer nos personnages et j’ai décidé de les mettre sur la piste de la plus mythique des créatures : le dernier dragon blanc du monde. Une bête féroce, indomptée mais seule, avec laquelle les elfes blancs ont plus d’un point commun. C’est donc grâce à ce dragon et à la traque dont il va être l’objet que nos personnages se lancent dans l’aventure."

Avec un tel pitch, les personnages ne risquent-ils pas d’être trop formatés ? Le scénariste le récuse : "Pour moi, il est essentiel que les personnages soient authentiques et sortent des cases “gentil” ou “méchant”, surtout dans un registre aussi codifié que la Fantasy. Donc, qu’ils aient bon ou mauvais fond, dans toutes mes histoires, je m’efforce de travailler sur les nuances et sur ce rapport du bien au mal. Certains héros peuvent se montrer faillibles, d’autres, mauvais en apparence, faire parfois preuve de générosité. Les elfes blancs se prêtaient donc parfaitement à mes envies car, d’emblée, ils paraissent vertueux et dotés de mille qualités. Mais derrière leur éclat se cachent des failles. La hauteur d’esprit n’empêche pas le mépris. Quant au courage ou à la force, rien n’est plus inconstant. Et les elfes, aussi supérieurs soient-ils, n’échappent pas à cet état de fait."

En avant-première, une double-page du T3 d’Elfes : Elfe blanc, cœur noir, sans les bulles de dialogue
Par Olivier Peru - Stéphane Bileau - Soleil 2013

Que cela soit avec le surprenant premier tome des Elfes bleus, le deuxième plus classique des Elfes sylvains qui sort dans quelques jours, ou l’attendu développement des Elfes blancs à paraître cet été, Soleil semble prêt à réussir sa nouvelle série-concept qui, comme le Décalogue ou Jour J devrait confirmer la pertinence de cette formule éditoriale.

(par Charles-Louis Detournay)

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Concernant Elfes, lire également notre interview du scénariste-éditeur, Jean-Luc Istin : « Elfes, la nouvelle série-concept de soleil devait s’appuyer sur un thème fort, résonnant comme une évidence ! »

Lire également nos récents articles concernant Olivier Peru :
- Mjöllnir, T1 : Le Marteau et l’Enclume
- Zombies - T2 : De la brieveté de la vie
- son interview traitant des séries Assassin, Nosferatu, Zombies, In Nomine et Lancelot : « Mon esprit aime se promener dans les univers fantastiques »
- son amplication au sein de la collection « 1800 »

Le Monde d’Aquilon Soleil ✍ Jean-Luc Istin ✏️ Kyko Duarte
 
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