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Gabriel Germain : "Avoir des parents artistes m’a aidé à me lancer à mon tour dans cette voie. "

Par Christian MISSIA DIO le 11 octobre 2014                      Lien  
Dans un style évoquant les mangas, Lune et l'autre narre la rencontre inattendue de trois personnages à la croisée des chemins. Tantôt poétique, tantôt fantastique, le second livre de Gabriel Germain nous donne à découvrir un jeune auteur prometteur et à l'univers riche et varié.
Gabriel Germain : "Avoir des parents artistes m'a aidé à me lancer à mon tour dans cette voie. "
Lune et l’Autre
Gabriel Germain (c) Casterman

Comment es né le projet de Lune et l’autre ?

Gabriel Germain : À l’origine, je souhaitais adapter un roman d’Haruki Murakami que j’aimais beaucoup, mais nous n’avons malheureusement pas obtenu les droits. Je me suis donc dit que j’allais écrire une histoire dans le même genre. Très vite, j’ai eu l’idée de mettre en scène trois personnages, Risa Tsukiyo (la prostituée), Shin’ichiro le client et la gamine Hana, ainsi que l’hôtel “White Rabbit”. Je voulais aussi traiter de la dualité ville-campagne.

L’approche graphique similaire aux mangas, est-ce votre style habituel ?

J’ai toujours pensé que le dessin devait s’adapter à l’histoire et non l’inverse. Comme l’histoire se passe au Japon, je voulais que le style graphique évoque directement ce pays.

Si je prends ma première BD, celle-ci avait pour thème la guerre des Balkans. J’ai donc proposé un dessin en noir et blanc avec de grands aplats de noirs et de blancs, ce qui donnait au final un résultat beaucoup plus tranché.

Quelques planches de Lune et l’Autre
Gabriel Germain (c) Casterman

Pourquoi n’avez-vous pas poussé votre logique en proposant une narration et même un format de livre similaire aux mangas ?

Parce que mes références sont franco-belges et puis, dans le manga on est dans une narration feuilletonesque, alors que moi, je propose un roman graphique, un one shot. Si vous lisez les BD de Jirō Taniguchi, vous verrez qu’il propose lui aussi ce même type de narration et des histoires complètes en un seul tome. Le style manga aurait été plus approprié si c’était une série ou un feuilleton.

Le vieil homme qui accueille Risa et Hana vers la fin de l’histoire ressemble un peu au père de l’un des personnages. Est-ce lui ?

C’est vrai qu’il y a une certaine ressemblance mais pour moi, ce vieil homme est juste un kami, un esprit bienveillant comme il y en a tant d’autres au Japon et qui va les accompagner tout au long de l’histoire. Là où il y a une référence c’est avec le nom de l’hôtel qui s’appelle le “White Rabbit”. Il y a tout une histoire avec le lapin qui guide la jeune femme lorsqu’elle était enfant et c’est censé être lui. D’ailleurs, dans la première version du scénario, ce personnage mystérieux était aussi le patron de l’hôtel.

Parlez-nous un peu du personnage de Shin’ichiro, le jeune homme dans l’histoire.

Dans une version précédente, j’avais réalisé un flashback qui racontait sa vie mais finalement, je l’ai abandonné. Dans cette séquence, j’expliquais que Shin’ichiro avait été abandonné par son père à la naissance, ce qui fait que lorsqu’il apprend qu’il va être père, il se crée chez lui une sorte d’angoisse qui le pousse à s’enfuir. Au début de Lune et l’autre, l’histoire de Shin’ichiro est terminée car sa femme a finalement avorté. Il est donc dans une période de deuil. Il rumine son échec et compense en s’oubliant totalement dans le travail mais il va renaitre grâce à sa rencontre avec Risa.

Risa, l’héroïne de l’histoire a la faculté de se dédoubler avec un corps incandescent. Où avez-vous puisé cette idée ?

Le corps incandescent apparaît lorsque la lune est pleine et que sa lumière frappe le corps. Je voulais trouver le moyen d’introduire graphiquement ce pouvoir spectral. J’ai pensé à la lune et c’est cet astre qui donne ce pouvoir, ce qui donne un vrai rapport entre la lune et le personnage.

Avez-vous vécu au Japon ?

Jamais, mais je reconnais que la culture japonaise m’intéresse beaucoup, que ce soit dans son cinéma, sa littérature ou sa culture populaire.

Dans Lune et l’autre, il est vrai que j’ai une approche manga mais ce n’en est pas un pour autant. J’ai utilisé ces codes pour que le lecteur sache instinctivement que nous sommes au Japon sans pour autant que je mentionne le nom du pays.

Quelle technique avez-vous utilisée pour les couleurs ?

Je réalise mon encrage au crayon, je le scanne puis j’attaque la couleur en utilisant des matières au rendu aquarelle. C’est assez long et fastidieux mais ça donne un chouette résultat au final.

C’est votre second livre. Comment voyez-vous votre évolution dans le milieu de la BD ?

J’ai un vrai métier à côté, je suis surveillant dans un lycée en France car mon activité de bédéiste ne me permet pas encore d’en vivre. Et puis, il y a eu une longue période entre mes deux ouvrages. Faire de la BD me prends beaucoup de temps, en moyenne je passe trois jours complet pour réaliser une page, couleurs incluses.

Quelles sont vos influences graphiques et vos coups de cœur en BD ?

Mon père était un grand lecteur de BD. Il collectionnait tous les Tintin. Du coup, je n’avais qu’à piocher dans sa bibliothèque. J’ai lu les classiques Tintin, Gaston, Valérian ou encore Astérix. Mon père dessinait aussi pour son plaisir et je pense qu’il m’a transmis le virus. Lorsque j’étais au collège, j’ai pris des cours dans des associations à Marseille et par la suite, j’ai fait des études d’art appliqué. J’ai toujours baigné la dedans mais, plus tard, lorsqu’il a fallu se professionnaliser, j’ai eu l’opportunité de signer mon premier projet. Le fait d’avoir des parents comédiens de profession m’a appris à ne pas avoir peur de me lancer dans cette aventure. J’ai toujours su que je serais artiste. Peut être au début, j’ai hésité à me lancer en tant qu’ingénieur en jeux vidéo.

Quels sont vos autres projets ?

J’ai deux idées assez concrètes mais je ne me suis pas encore questionné sur le traitement graphique de ces histoires très différentes l’une de l’autre. La première BD sera une histoire sociale teintée de fantastique et aura pour cadre un chantier de bateau au Bangladesh. Je raconterai l’histoire d’une fille qui se déguise en garçon pour travailler sur des chantiers afin de récupérer des pièces et des morceaux de bateaux pour construire le sien.
L’autre scénario mettra aussi le sexe féminin à l’honneur car je raconterai la biographie fictive de la première femme qui marchera sur Mars.

Voir en ligne : Gabriel Germain sur le site de Casterman

(par Christian MISSIA DIO)

Cet article reste la propriété de son auteur et ne peut être reproduit sans son autorisation.

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