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Gihef : "L’univers carcéral est un excellent prétexte pour dessiner des gueules expressives"

Par Nicolas Anspach le 10 octobre 2007                      Lien  
Deux albums d’entrée de jeu ! Les éditions Dupuis ont décidé de marquer le coup en publiant {Haute Sécurité}, la série mettant en scène un gardien de prison fragile dans un univers particulièrement dur et cosmopolite. {{Gihef}}, le dessinateur, nous présente le premier cycle de cette série…

Avant de rejoindre les éditions Dupuis avec Haute Sécurité, vous aviez réalisé avec votre scénariste « Les Enchaînés ». Comment l’avez-vous rencontré ?

Ce sont les éditions Vents d’Ouest qui nous ont mis en contact. A l’époque, je leur avais envoyé plusieurs projets en tant qu’auteur complet. Ils ont préféré me mettre en relation avec Joël Callède. On m’a présenté deux scénarios : les Enchaînés et Tatanka. Il y avait trop de dessinateurs intéressés par cette dernière série, qui aurait d’ailleurs dû être publiée chez eux. Du coup, je me suis rabattu sur les Enchaînés. Comme notre relation fonctionne à merveille, nous avons décidé de continuer à la fin de cette histoire…

Qu’est-ce qui vous plaisait dans son écriture ?

Son style d’écriture et les thématiques abordées se rapprochent de ce que je voulais traiter en bande dessinée. Nous avons la même sensibilité, la même culture tant cinématographique que littéraire, etc. Nous travaillons actuellement sur notre huitième album ensemble. Le troisième Haute Sécurité est terminé, et je suis déjà bien avancé dans le quatrième …

Auriez-vous aimé dessiner Tatanka ?

Pas spécialement. Je ne regrette pas d’avoir dessiné Les Enchaînés. Callède accorde beaucoup d’importance, dans cette série, aux destins croisés. J’aime le soin qu’il apporte aux descriptions sociales et psychologiques des personnages. On sentait qu’il portait en lui ce projet depuis de nombreuses années…

Gihef : "L'univers carcéral est un excellent prétexte pour dessiner des gueules expressives"
Extrait du T3 de "Haute Sécurité" (à paraître)
(c) Gihef, Callède & Dupuis

Vous débarquez donc chez Dupuis avec "Haute Sécurité"…

C’est un rêve qui se réalise. J’ai grandi en lisant les séries publiées par Dupuis. Daniel Bultreys, l’éditeur de Repérages, suit mon travail depuis RIP Limited, mon premier album. Il n’était alors qu’assistant éditorial, mais aimait déjà mon style graphique. Il a essayé de me « marier » avec différents scénaristes. Daniel a toujours été présent. Quand il a commencé à s’occuper de Repérages, il nous a incité à lui présenter des projets. Nous avons évoqué, en 2005, la possibilité de faire un thriller carcéral. Cela l’intéressait beaucoup…
Joël Callède a écrit le scénario, et moi j’ai réalisé quelques planches d’essais. J’ai tenté de modifier fortement mon trait. J’étais un grand amateur du travail de Tim Bradstreet qui a dessiné plusieurs couvertures de comics. Ces planches n’ont pas plu à l’éditeur, et j’ai du les refaire en affinant mon trait. Mon graphisme actuel est éloigné de celui des Enchaînés. L’encrage n’est plus le même, et mon trait est plus réaliste.

Franchement, n’est-ce pas opportuniste d’axer une série sur l’univers carcéral ? La série télévisée Prison Break est un immense succès...

Pas du tout ! Le contrat avec notre éditeur a été signé en 2005. Quelques mois avant que la série TV ne débarque en France. On ne parlait pas encore de Prison Break ! Par contre, j’avoue avoir été influencé par une autre série américaine Oz. Ce fut l’une des premières séries parallèles, avec Twin Peaks, a être diffusée. J’apprécie beaucoup les films qui se déroulent dans une prison. Ce thème est un excellent prétexte pour dessiner des gueules expressives. La prison est un univers cosmopolite. On y retrouve des blacks, des chicanos, des asiatiques, etc…

Extrait du T3 de "Haute Sécurité" (à paraître)
(c) Gihef, Callède & Dupuis.

Mais l’ambiance y est assez pesante …

Oui. Mais dans Haute Sécurité, nous restons dans des atmosphères accessibles, même si elles sont parfois difficiles de part leurs duretés. Cette série est avant tout un thriller psychologique, avec des personnages aux profils différents ! Ils ont tous un passé et un destin différents. Aucun personnage n’est noir ou blanc. Callède est toujours dans les nuances. La plupart des personnages de BD populaires sont de vrais héros. Le lecteur comprendra, en lisant la première histoire, que le personnage principal de Haute Sécurité, Aleks Wodja , a des problèmes avec les femmes et un passé mouvementé…

Votre personnage n’est pas encore formaté…

C’est voulu ! C’est le vecteur narratif de cette première histoire. Il prend le lecteur par la main pour l’amener à Templeton Bay, la prison. Aleks Wodja la découvre en même temps que lui. Ce personnage a un côté naïf. Il est trop humain pour avoir sa place en prison. Il est au cœur d’un univers qui est beaucoup trop dur pour lui.

Vous semblez vous inspirer du cinéma. Certains personnages ressemblent à des acteurs.

Effectivement. Nous apprécions beaucoup le cinéma, et avons les mêmes goûts. Nous parlons beaucoup, Callède et moi, de nos influences cinématographiques. Le personnage de Skinner, par exemple, est né suite à nos discussions sur The Big Lebowski. J’ai été marqué par la prestation de John Goodman dans ce film.
S’inspirer d’une personnalité existante permet de mieux cerner son personnage de papier. Bien sûr, ils ne sont pas tous très ressemblants car j’aime me les approprier. Pour Wodja Aleks, j’ai utilisé le physique de Ethan Hawke.

Extrait du T3 de "Haute Sécurité" (à paraître)

Et la prison ?

Elle existe. On la voit dans un film joué par Sylverster Stallone et Donald Sutherland [1]. Cette prison est située dans le New Jersey. Je me suis surtout inspiré du dôme qui culmine l’établissement. Pour le reste, j’ai composé. Nous nous sommes amusés à inventer une ville dont l’économie dépendrait d’elle !

Pourriez-vous lever le voile sur le deuxième cycle ?

La prison sera confrontée à une vague de suicides non élucidés, que l’on impute à des nouvelles drogues…. Il s’agira, à nouveau, d’une histoire découpée en deux albums. Ce format est le choix de l’éditeur. Joël Callède serait plus à son aise s’il pouvait développer son histoire avec un tome supplémentaire. Mais avec la surproduction, il est important que les lecteurs aient rapidement la fin d’une histoire …

Quels sont vos projets ?

J’ai envie de m’investir dans l’audiovisuel. J’ai réalisé un court-métrage. Je dois encore en assurer le montage. Ensuite, avec un ami, nous essayons de mettre en place des pastilles humoristiques pour la télévision. Nous travaillons sur le pilote. Bref, rien de concret pour le moment …

(par Nicolas Anspach)

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Images © Gihef, Callède & Dupuis.

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[1Ndlr : le film est intitulé « Haute Sécurité » (sic)

 
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