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Guillaume Bianco (2/2) : « Les Comptines malfaisantes sont un complément de Billy Brouillard »

Par Charles-Louis Detournay le 2 décembre 2009               Comptines malfaisantes sont un complément de Billy Brouillard »" data-toggle="tooltip" data-placement="top" title="Linkedin">       Lien  
Après avoir évoqué les derniers albums qu’il a scénarisés, nous revenons sur l’apport de Bianco comme ‘auteur complet’ avec la sortie des Comptines malfaisantes, et ses suppléments pour Spirou mettant en scène un bien drôle d’oiseau !

Guillaume Bianco (2/2) : « Les <i>Comptines malfaisantes</i> sont un complément de Billy Brouillard » Le superbe album de Billy Brouillard, le Don de trouble vue paru l’année dernière, n’appelait pas nécessairement une suite, mais la richesse de l’univers décrit, ainsi que son succès mérité, ont permis aux auteur et éditeur de nous proposer ce coffret, reprenant trois livres inédits, et intitulés Les Comptines malfaisantes. Comme Guillaume Bianco nous le confiait dernièrement, il s’agit de treize petits récits dont on nous livre ici les quatre premiers.

Après l’opulence et la diversité du Don de trouble vue, il eut été difficile de surprendre à nouveau le lecteur. Bianco s’éloigne donc résolument du personnage de Billy Brouillard qui ne fait qu’introduire et conclure chacun des récits. C’est donc à chaque fois un nouveau monde qui s’ouvre, privilégiant le style du livre illustré, et racontant les (més-)aventures d’enfants téméraires ou simplement égoïstes.

On retrouve avec joie le trait de Bianco qui nous livre d’aussi beaux dessins, que d’étranges récits. Les éléments rapportés de son encyclopédie imaginaire font toujours autant merveille. Sans atteindre le résultat du livre précédent, ces comptines démarrent positivement, et sur un niveau assez régulier, ce qui n’est pas toujours facile à tenir. De plus, le format en petits livres permet de se nicher dans un nid douillet pour en profiter, ou d’en faire facilement la lecture à ses enfants.

Mais laissons l’auteur nous en dire plus :

Les quatre premières Comptines Malfaisantes viennent de sortir. Est-ce vraiment la suite de Billy Brouillard ?

Non, ce n’est pas un tome 2, mais plus une sorte de complément au premier livre de Billy Brouillard, Le don de trouble vue qui, par ailleurs, n’est pas tout à fait un tome 1, mais plutôt un livre central. Il s’agit de petites histoires toutes simples, un peu à la manière de la Fille aux couteaux que l’on trouvait dans le premier livre.

Le coffret regroupe trois livres pour quatre comptines. Quel est le lien avec Billy Brouillard ?

Deux des trois livres contiennent chacun une histoire, alors que le troisième en contient deux. Il s’agit des livres que Billy a chez lui, sur son étagère. Ceux-ci nourrissent son univers et son imaginaire. Il les lis parfois à Jeanne, sa petite sœur, pour s’amuser à lui faire peur. En effet, ces petites comptines recèlent chacune une morale sombre et cruelle. Elles auraient été, parait-il, écrites par le diable en personne.

Billy ne fait donc pas partie des histoires qui nous donnent cependant des petits indices sur son monde intérieur. Par la suite, Billy sera amené à rencontrer la "fille de l’eau " ou la "petite vampire" lors de ses pérégrinations nocturnes, deux protagonistes des comptines malfaisantes... Un petit clin d’œil lui sera fait lors de l’introduction de chaque livre. Il y aura également un extrait de son "Encyclopédie curieuse et bizarre de cryptozoologie" en guise de conclusion dans les trois ouvrages.

Dans le Don de trouble vue, Billy se voit assassinant sa sœur, ce qu’on imagine être un rêve trahissant une guerre de territoire, car elle réapparait en fin de volume. Pourtant les Comptines semblent les présenter plus liés, dans ces dessins introductifs. Doit-on y voir une progression (le sentiment de culpabilité de Billy lui fait se rapprocher de Jeanne), ou juste un hasard de construction ?

Le mot "assassiné" est un peu fort, car il inclut la notion de préméditation. Dans la scène en question, Billy Brouillard, négligeant, bouscule sa sœur qui se cogne la tête contre un bord de table et s’évanouit. Il réalise alors qu’il peut la perdre et se rend compte qu’elle est mortelle. C’est ainsi qu’il va alors lui prêter un peu plus attention. Mais les grands frères sont parfois pudiques envers leur petite sœur et ont une bien curieuse manière de leur témoigner leur amour...

Pourquoi ne pas avoir réalisé un gros recueil pour ces comptines ? Toujours la recherche du « beau livre ? »

J’avais envie de faire des livres courts et très simples à lire. Je voulais que les lecteurs y trouvent leur compte. J’en ai donc fais trois. J’aime le livre en tant qu’objet, mais surtout pour son contenu et l’univers qu’il propose. Le plaisir de la lecture passe évidemment par le regard, mais aussi par le toucher. On s’inquiète de la mort du livre à cause du média Internet. Mais un ordinateur n’aura jamais ce cachet, cette chaleur et cette promiscuité qu’offre un beau et surtout un "bon" livre. J’espère que les lecteurs prendront autant de plaisir à les lire que je n’ai eu à les écrire.

Toutes ces comptines traitent d’une transformation. Est-ce le schéma de la collection Métamorphoses qui vous guide ou ce thème vous porte-t-il en permanence dans l’ensemble de vos récits ?

Je n’ai pas écris ces comptines. Je n’ai fais que les retranscrire, m’appuyant sur d’anciens textes retrouvés ça et là aux cours de longues recherches. Elles seraient treize et auraient été écrites par le diable. Les autres ne parlent pas toutes de métamorphose. J’ai choisi ces quatre premières car je les trouvais marrantes à dessiner. Mais j’ai longtemps hésité, et le choix n’a pas été facile.

Guillaume Bianco à Blois en novembre 2009
Photo : D. Pasamonik (L’agence BD)

Pour une fois, les éléments moraux sont parfois complètement absents de vos récits, certains personnages qui n’ont pas vraiment ‘fauté’ se retrouvent ‘punis’ : la jeune fille qui aime son poisson, ou celle qui protège son animal... Y a-t-il une faute à expier ou un hasard de la vie qu’on ne peut éviter ?

Je crois qu’il y a toujours une morale, même dans la "Fille de l’eau" : Philomène néglige son poisson rouge. Elle ne se soucie guère d’être responsable de sa mort et s’inquiète plutôt d’être vue par le père Noël. C’est la raison pour laquelle elle cache le petit cadavre visqueux au creux de son estomac. Elle se rapproche de son poisson que lorsqu’elle est confrontée à la solitude. Elle est très égoïste et défie même le personnage le plus noble et juste qui soit, le Père Noël, ce que que nul ne peut faire impunément !

On évoque les neuf autres comptines qui devraient suivre, comptez-vous vous en servir pour alimenter les prochains tomes ?

Cela dépendra de l’avancée de mes recherches en la matière. J’ai trouvé les traces d’une sixième comptine : une très belle histoire qui traite de sirène... Les sept autres comptines malfaisantes arriveront au fur et à mesure. Elles seront soit intégrées à un récit mettant en scène Billy, soit réunies dans un autre coffret. Je ne sais pas trop encore... Mais dans un proche avenir, je vais plutôt m’atteler à une nouvelle histoire de Billy, cette fois-ci, sous forme de bande dessinée. Il y sera question d’aventures nocturnes, de fantômes et de sirènes. Et du Diable. Une fois de plus, ce livre sera en relation directe avec le premier opus...

En marge de vos dessins pour les Comptines malfaisantes, et les têtes de chapitres d’Eco, on a découvert un nouveau personnage, :Gouplik, parus sur Mundo-bd.fr, et en supplément du journal de Spirou. Qui vous a contacté pour publier ces strips ?

Olivier Milhaud, qui à l’époque s’occupait du site Mundo-BD.fr, a proposé à Jean Luc Deglin (Crapule), puis à moi-même de leur envoyer des strips qui viendraient alimenter le dit site de façon hebdomadaire. Gloupik est une très vieille série à laquelle je suis beaucoup attaché et qui n’avait jamais été publiée. J’ai donc sauté sur l’occasion.

En deux mots, pouvez-vous nous décrire ce personnage ?

Rufus le Gloupik est un tout petit oiseau à l’égo démesuré. Il se prend pour un poète et a une très autre estime de lui-même. Il est amoureux d’une petite humaine : Mioka. Les choses vont se gâter pour lui lorsqu’il se décide à lui déclarer sa flamme. Pas évident de déballer ses sentiments lorsque l’on est un tout petit oiseau de rien du tout ! Il s’agit peut-être là d’une métaphore inconsciente de notre petitesse face aux femmes...

Pourquoi une édition en mini-albums plutôt que d’attendre d’avoir assez pour un album complet ?

Frédéric Niffle, le rédacteur en chef du journal de Spirou, nous a proposé de réutiliser les strips déjà existants pour agrémenter les suppléments du magazine. Jean-Luc Deglin et moi avions eu une publication web, nous avons désormais notre publication papier ! Un grand merci à Olivier et à Frédéric ! Pour le moment je n’ai pas eu de proposition pour développer Gloupik en album complet. Comme le temps me manque et que j’ai plusieurs choses en cours, je n’ai pas réellement démarché d’éditeur non plus.

On sent progressivement chez ce personnage un questionnement proche d’Épictète, concernant le sens de la vie ? C’est une façon de le faire évoluer ou ce glissement se fait-il malgré vous ?

Cela se fait malgré moi. Je ne peux probablement pas écrire autrement. Gloupik existait déjà bien avant Épictète. Je crois que l’on ne fait que se répéter au bout du compte. Au fil des différents ouvrages, la forme est différente, mais le fond reste sensiblement le même...

On aperçoit également une autre rubrique que vous animez dans Lanfeust Mag’, intitulée Mon coin à moi. Est-il prévu de la publier en album avec les planches faites pour Angoulême et publiées dans Spirou Magazine ?

À ce jour, personne ne m’a encore proposé de publier ces strips. Mais pourquoi pas ?

Avez-vous encore d’autres projets ?

Non, pas actuellement, car je désire me concentrer sur les séries en cours, dont les prochaines aventures de Billy Brouillard. Par ailleurs j’aimerais me mettre à travailler sur la suite d’Eco avec Jérémie Almanza, ainsi que sur le troisième tome d’Ernest et Rebecca avec Antonello Danela ! J’ai aussi une grosse envie d’illustrer un livre de cuisine sur les goûts et les saveurs de notre enfance avec mon copain Olivier Milhaud. Donc, pas mal de travail en perspective...

(par Charles-Louis Detournay)

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Lire la première partie de cette interview : « Le livre illustré est le style narratif le plus efficace »

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Visiter le blog de Guillaume Bianco et celui d’Epictète

Lire l’interview de Bianco & Danela où il nous parle d’Ernest & Rebecca, ainsi que de Billy Brouillard

Découvrez les premières pages d’Epictète, de Chat Siamois, du premier tome d’Eco et du "T2" de Billy Brouillard.

 
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