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Guy Raives : " Chacun de nous apporte ses envies et ses petites tranches de vie dans nos travaux communs. "

Par Christian MISSIA DIO le 16 mars 2013                      Lien  
Après le beau diptyque des "Temps nouveaux", le duo Warnauts & Raives remet le couvert en proposant "Après-Guerre", qui est une suite directe de leur précédent récit. Cette fois-ci, les auteurs s'intéressent aux débuts de la Guerre froide.

De quoi parle Après-Guerre ?

Raives : Nous sommes en 1947. L’histoire commence avec une chasse à l’homme dans Berlin, la nuit. Un homme est abattu et les militaires découvrent dans son sac un document prouvant qu’Assunta Lorca est détenue dans un camps russe. Il faut savoir qu’après la Libération, de nombreux prisonniers, aussi bien Russes qu’Allemands, ou autres, ont été emprisonnés dans les camps soviétiques. Ses amis vont donc essayer de la faire sortir de là. En toile de fond, il y aura le blocus de 1948 qui va scinder Berlin en deux.

Pourquoi avez-vous décidé de poursuivre avec les personnages des Temps nouveaux, alors que vous aviez annoncé travailler sur d’autres projets ?

Warnauts : Effectivement, Après-Guerre est la suite des Temps nouveaux. Les Alliés se sont séparés en deux blocs : l’empire soviétique d’un côté et l’Occident de l’autre. Berlin est coupé en deux. Et puis, un peu avant 1948 et le blocus de Berlin, il y aura la signature de la déclaration des Droits de l’Homme. On voulait parler d’un peu tout cela, en fait.

Raives : Et puis, il n’y a pas que ça. Nous avions fait mûrir nos personnages, ils commençaient à avoir un peu d’âme et nous trouvions cela dommage de nous arrêter en si bon chemin. Nous les avons donc réutilisés tout en revisitant la Grande Histoire.

Warnauts : Mais nous avons toujours ces projets de faire une histoire se passant à New York et une autre aux Antilles.

Guy Raives : " Chacun de nous apporte ses envies et ses petites tranches de vie dans nos travaux communs. "
Après-Guerre
Warnauts & Raives (c) Signé/Lombard

Guy Raives, vous nous aviez expliqué que les Temps nouveaux sont nés de votre envie de rendre hommage à vos proches qui ont vécu la Seconde Guerre mondiale. Est-ce aussi vous le moteur d’Après-guerre ?

Raives : Je ne dirais pas que je suis le moteur. Tout se fait en commun, même si il est vrai que je voulais rendre hommage à mes proches. Mais de manière générale, chacun de nous apporte ses envies et ses petites tranches de vie dans nos travaux communs. Nous concevons tout à deux.

Warnauts : Ici par exemple, nous intégrons l’Allemagne, Berlin, mais il faut savoir que je suis né à Berlin et que j’ai vécu longtemps dans ce pays. Nous réalisons nos albums à quatre mains, aussi bien le scénario que le dessin.

Dans Après-Guerre, même si vous abordez la Question royale en Belgique, l’histoire est beaucoup plus focalisée sur le choc entre l’Est et l’Ouest. Vous internationalisez votre scénario alors que dans le premier diptyque, l’histoire était beaucoup plus ancrée en Belgique, notamment avec le Rexisme.

Warnauts : En effet, nous évoquons le retour du roi Léopold III et les problèmes politiques que cela a créé en Belgique. Mais comme vous l’avez souligné, nous ne nous limitons plus seulement à la Belgique car notre idée était d’ouvrir le scénario vers d’autres problématiques de cette époque et qui nous intéressent. Cette ouverture est aussi motivée par le fait que si la série se poursuit, nous pourrions reprendre nos personnages à des époques différentes, avec d’autres enjeux historiques en toile de fond. On pourrait très bien faire une histoire en 1955 avec le roi Baudoin au Congo, par exemple. Au niveau international, on serait juste après la bataille de Diên Biên Phu. À partir du moment ou en rentre dans une logique de blocs, comme c’est le cas entre l’Est et l’Ouest, on réalise que la Belgique devient comme une pièce coincée entre les deux mastodontes et qui n’a pas d’alternative. On est soit d’un côté, soit de l’autre.

Guy Raives et Eric Warnauts
Photo © Christian Missia Dio

Thomas, qui est un peu le personnage central de ces histoires, semble un peu largué par les événements... Quelle était votre intention en ce qui concerne ce personnage ?

Raives : C’est un personnage qui peut être proche des lecteurs dans le sens où il est spectateur des événements. Il semble avoir peu d’emprise sur ceux-ci. Thomas ne s’engage pas vraiment. Il est un peu en retrait et se laisse vivre. C’était intéressant que tous les personnages ne soient pas manichéens et lui, il ne l’est pas. Mais d’un autre côté, il peut être aussi un catalyseur, comme c’est le cas avec Assunta. Il va amener des gens à aider son ancienne compagne.

Warnauts : Comme disait Serge Gainsbourg dans une chanson qu’il avait écrite pour Jane Birkin, Thomas est un peu un “aquoiboniste”. C’est un mec qui a beaucoup de désillusions. Il est un peu jeune pour penser comme cela, mais on sent malgré tout qu’il ne croit pas à grand chose. Il pense à travers l’opinion des gens. Il croit en Assunta mais comme celle-ci n’est plus là... Thomas n’a pas une forte personnalité, il est un peu velléitaire, mais au final, c’est peut être lui qui aura la bonne vision des choses...

Au cours des périodes de conflit, on remarque que beaucoup de gens privilégient le côté charnel au côté sentimentale dans leurs relations amoureuses, peut-être à cause de leur proximité avec la mort. Aviez-vous pensé à cela en construisant le personnage de Thomas ?

Warnauts : Il est vrai qu’il a un vrai problème à s’engager. Mais pour s’engager, il faut avoir des certitudes. Il faut des bases pour aller quelque part mais Thomas doute constamment. Il vit un mal-être existentiel dû au poids des choses et de l’ennui, ou plutôt une lassitude à faire des choses qui paraissent vaines, vu l’époque troublée dans laquelle il vit. Thomas a besoin des autres pour lui donner la force de croire à un avenir meilleur, à des valeurs qu’il croit perdues.

Propos recueillis par Christian Missa Dio

(par Christian MISSIA DIO)

Cet article reste la propriété de son auteur et ne peut être reproduit sans son autorisation.

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Code EAN :

Warnauts & Raives et leur nouvel album "Après-guerre" feront l’objet d’une expo le vendredi 15 mars, à 19h à la librairie BD-World de Waterloo.

Des dédicaces seront organisées le samedi 16 mars de 14h à 18h.

Chaussée de Bruxelles 216 – 1410 Waterloo
02/353.00.24 – waterloobd-world.net

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