Japon, 1192, sept ans après la bataille de Dan-no-ura qui ouvrit le bal de l’ère féodale. Sept années qu’Isabellae arpente les routes du pays en compagnie du fantôme de son père, gagnant sa vie à la pointe de son sabre. Sept années passées à rechercher sa sœur Siuko, disparue après l’exécution de leur mère, une sorcière celte qui avait envoûté les hommes de leur village.
Mais après tant de temps à parfaire sa technique des armes, Isabellae la chasseuse de primes est prête à rejoindre sa soeur, et à se confronter à son passé. Mais celui-ci prend un détour inattendu, en la mettant en présence d’un aspirant moine peu inspiré, et d’un vrai brigand très amouraché. Reste à comprendre quel être est si brusquement tombé du ciel, et comment il va influencer la vie d’Isabellae...
Après s’être fait remarqué avec Jazz Maynard, Raule continue d’écrire malgré avoir poursuivi des études de dessin. Adepte des mélanges pas toujours conventionnels, il débute Isabellae par une mise-en-place presque classique dans le japon des Samouraïs, une jeune femme rousse (!) qui parle avec son père fantôme tout en étant à la recherche de sa sœur, avant de faire intervenir des éléments très particuliers, comme la magie celtique et un représentant déchu du Dieu unique. Fruit de son inspiration puisée au cœur des banlieues barcelonnaises, le récit demeure à la fois âpre et souligné par des traits d’humour bienvenus. C’est donc un récit mouvementé et inattendu que nous livre l’auteur espagnol.
Pour traduire ce mélange d’influences, Raule s’est adressé à Gabor, un illustrateur issu de l’animation. C’est d’ailleurs dans ces studios que ce dernier rencontra Juan Dian Canales, le scénariste de Blacksad. Ensemble encore, ils publieront Les Patriciens, un conte délirant paru chez Glénat.
Même si son découpage manque parfois de fluidité, Gabor parvient à dépeindre cet univers qui mêle les combats au sabre, la magie celtique et le fantastique religieux. Ses planches sont très dynamiques restituant parfaitement la densité de scénario de Raule.
Quant aux couleurs, Gabor travaille sur des palettes assez ternes, tout en alternant les teintes de base selon qu’on se situe dans le passé, en pleine nuit ou au milieu d’un combat acharné. Cette technique fait bien ressortir son encrage tout en permettant de mettre en avant le punch des scènes d’action. Mais si les couleurs n’écrasent pas le dessin, il faut s’accoutumer à ces ambiances pâlottes, qui dénotent des sentiments intenses présents dans les planches.
Les transcriptions du japon médiéval en bande dessinée franco-belge ont souvent donné des récits aux trames plus linéaires, comme le réaliste Kogaratsu ou Samurai dans un style un peu plus fantastique.
Isabellae travaille moins les ambiances qui étaient le point fort des séries précitées, mais s’attache justement à bouleverser les codes. De quoi satisfaire les amateurs de récits charpentés et pleins de surprises !
(par Charles-Louis Detournay)
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