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Jean-Christophe Derrien : "Résistances traite de la seconde guerre mondiale, mais c’est aussi une histoire de jalousie et d’émotion."

Par Nicolas Anspach le 9 août 2010   Résistances traite de la seconde guerre mondiale, mais c’est aussi une histoire de jalousie et d’émotion."" data-toggle="tooltip" data-placement="top" title="Twitter">            Résistances traite de la seconde guerre mondiale, mais c’est aussi une histoire de jalousie et d’émotion."" data-toggle="tooltip" data-placement="top" title="Linkedin">    Résistances traite de la seconde guerre mondiale, mais c’est aussi une histoire de jalousie et d’émotion."&body=À%20lire%20sur%20ActuaBD%0D%0Ahttps://www.actuabd.com/Jean-Christophe-Derrien" data-toggle="tooltip" data-placement="top" title="E-mail">   Lien  
{{Jean-Christophe Derrien}}, le scénariste de {Miss Endicott}, a publié aux éditions du Lombard le premier album de Résistances, une série se déroulant durant la Seconde Guerre Mondiale. À travers le destin de trois personnages aux idéaux tranchés, il nous entraîne dans le quotidien de ces hommes et femmes qui ont du vivre au côté de l’envahisseur durant ces années sombres.

14 Juin 1940. Les Allemands occupent Paris, et ses habitants fuient la capitale par milliers. Sonia et André, un couple, font la connaissance de Louis, un jeune homme aussi extraverti que magouilleur. Tous quittent ce Paris humilié, et rejoignent avec une certaine insouciance la Bretagne dans la voiture du jeune homme. En entendant l’Appel du 18 juin du Général de Gaulle, André ressent le besoin de partir pour l’Angleterre et de se battre auprès du chef de file de la France Libre. Sonia, quant à elle, est une jeune juive communiste. Elle repart vers Paris et s’engage dans un mouvement de résistance, tandis que, Louis continue ses magouilles. Ces trois personnages forment les pointes d’un triangle amoureux, et le destin leur permettra de se recroiser de nombreuses fois durant ces années de guerre.


Jean-Christophe Derrien : "<i>Résistances</i> traite de la seconde guerre mondiale, mais c'est aussi une histoire de jalousie et d'émotion."

Pourquoi avez-vous souhaité écrire une histoire se déroulant durant la seconde guerre mondiale, et abordant le thème de la Résistance ?

J’appréciais différents films sur cette thématique, que cela soit des classiques comme l’Armée des Ombres de Jean-Pierre Melville ou des œuvres plus récentes comme Black Book de Paul Verhoeven. Ce sujet m’attirait depuis longtemps, mais je n’osais pas le traiter pour une raison simple : les récits historiques sont contraignants. Ils demandent une recherche documentaire particulière. Un jour, j’ai décidé de me lancer et d’écrire un synopsis. Je l’ai envoyé aux éditions du Lombard, qui ont directement été partant pour éditer cette histoire. Il ne me restait plus qu’à trouver un dessinateur.

Était-il évident de commencer votre histoire en juin 1940 ?

C’était inconscient ! C’était effectivement un non sens de commencer ce récit à cette date. Ce n’est qu’à la fin de l’année 1941, voire au début de l’année suivante, que les réseaux de résistance se sont développés. Aborder l’exode des parisiens, face à la débâcle et la défaite, me semblait intéressant. Ces gens avaient pris un coup de bambou sur la tête, avant de se redresser et de rejoindre, pour certains, des mouvements de résistance. Dans l’Appel, le premier tome, j’ai utilisé beaucoup d’ellipses, pour arriver à l’année 1941. Vous aurez remarqué que le titre de cette série est « Résistances », au pluriel. Je ne voulais pas aborder un réseau en particulier. En France, ce sujet est toujours sensible et polémique. Il y a encore beaucoup de rancœur par rapport à la Résistance. J’ai assisté à des colloques et des réunions d’anciens résistants. Il n’y en a plus beaucoup malheureusement, mais les rancœurs entre les communistes et les gaullistes sont toujours présentes. C’est étonnant de voir des personnes de 90 ans être toujours « en froid » par rapport à des idées politiques vieilles de près de 70 ans ! C’est également pour cette raison, que je ne focalise pas mon récit sur une figure emblématique de la résistance : Jean Moulin, les époux Aubrac ou même Charles de Gaulle. Mais il y a néanmoins des allusions à quelques unes de ces personnes dans le récit. Dans le premier album de Résistances, un des personnages entend l’appel du 18 juin 1940 à la radio. Et dans le suivant, une scène se déroulera à l’Olympia Hall, à Londres, quand Charles de Gaulle accueille les français qui ont rejoint l’Angleterre suite à son appel.

Extrait de Résistances - T1
(c) Plumail, Derrien & Le Lombard

Pour quelle raison vos personnages partent-ils en Bretagne lorsque Paris est envahi ?

J’ai voulu commencer le récit en lui donnant un côté champêtre, à la limite de l’insouciance. Mes personnages auraient pu rejoindre Bordeaux, à l’instar de ceux de Jean-Paul Rappeneau et de Patrick Mondiano dans Bon Voyage. Le gouvernement Français était parti dans cette ville lorsque Paris fut envahi. Mais il me semblait plus intéressant de faire partir mes personnages vers la Bretagne où les marins de l’île de Sein furent parmi les rares personnes à avoir vraiment entendu l’appel du 18 juin. Ils sont partis rejoindre l’Angleterre. En rejoignant la Bretagne, Sonia, André et Louis vivent une sorte de road movie.

Les trois personnages ont des caractères différents. Louis est un peu voyou. Sonia est une communiste idéaliste. Et André, son petit-ami semble être idéaliste, sérieux et coincé.

Je vais être honnête, et vous avouer que j’ai façonné leurs psychologies selon des archétypes. Je voulais qu’ils soient tous différents. Mais au fur et à mesure de mon avancement, des planches découpées, les caractères des personnages se sont étoffés. Ils s’éloigneront de plus en plus de l’image qu’ils reflètent actuellement. Ce récit sera aussi tragique pour ces trois personnages. Ce trio amoureux va mal se terminer. Leurs sentiments sont souvent exacerbés. C’est le climat particulier de la guerre qui veut cela. Chaque journée peut être leur dernière. Après avoir été abandonnée par André, Sonia tombe quelques mois après dans les bras de Louis. Ce thème du triangle amoureux est classique. Ce thème est déjà fort lorsque le climat est calme, comme par exemple dans Jules et Jim, le film de François Truffaut. Mais dans ce récit, les relations et les sentiments en sont plus exacerbés car c’est la guerre. Les personnages ne vont pas arrêter se croiser. Et ils vivent chacun des moments importants. Résistances est aussi une histoire de jalousie et d’émotion.

Extrait de Résistances - T1
(c) Plumail, Derrien & Le Lombard

Comment avez-vous rencontré Plumail ?

Lorsque le scénario a été accepté par Le Lombard, j’ai mis des annonces sur des sites professionnels, et j’ai reçu quelques réponses. Parmi celle-ci, celle de Claude Plumail, qui dégageait une sensibilité particulière. Je connaissais son travail sur Dédales, la série qu’il a signée avec Christian Goddard. Son travail me plaisait. Dans Résistances, il apporte un petit côté rétro qui est intéressant. Ce n’est pas péjoratif. Que du contraire. Son style correspond à merveille aux ambiances des années ’40. Les couleurs de Scarlett Smulkowski apportent une force supplémentaire, et m’ont totalement bluffé.

Vous êtes également le scénariste de Poker, une série dessinée par Simon Van Liemt. Le premier tome était paru à la fin de l’année 2009.

Oui. Comme le nom de cette série le laisse présager. Il s’agit d’un thriller dont le personnage principal est un joueur de poker. Mark Middletown veut venger la mort de ses parents. Un homme, qui va devenir son mentor, lui conseille de devenir le meilleur joueur de poker au monde pour y parvenir. C’est le moyen le plus efficace pour atteindre les assassins de ses parents en plein cœur.
Les éditions du Lombard m’avaient demandé de réfléchir à une série sur le poker. Ce n’était donc pas, au départ, un projet personnel. Mais cela l’est devenu. Dans le premier tome, il y a quelques scènes montrant une partie de poker. Ces scènes étaient compliquées à mettre au point. D’une part, elles ne sont pas spectaculaires. Il faut donc trouver un moyen de maintenir l’intérêt du lecteur. D’autre part, Simon Van Liemt et moi-même, nous ne devions pas nous tromper dans les aspects techniques du jeu : les jetons, le sens de la distribution des cartes, etc. Dans le prochain album, qui paraîtra pour Angoulême 2011, les ambiances seront plus proches de celles que l’on peut vivre en allant dans un casino, et un peu moins de celles des parties de poker. Nous essayons avant tout, par ces ambiances, à donner une atmosphère différente à notre thriller. Pour cette série, je me suis rendu dans des casinos, je me suis documenté. Je partirai sans doute prochainement à Las Vegas pour y prendre quelques photographies. Le premier diptyque se déroule en France et à Monaco. Le prochain se passera à Las Vegas !

Extrait de Poker - T1
(c) Van Liemt, Derrien & Le Lombard.

Scénarisez-vous toujours pour le domaine audiovisuel ?

Un peu. J’ai travaillé dernièrement sur Angelo La Débrouille, un dessin-animé en 3D (78 épisode de 7 minutes). Mais la tendance va vers des genres que j’affectionne moins. Je préfère l’aventure, et on me demande d’écrire des histoires d’humour pour un format court. J’ai commencé dans ce métier par les adaptations en dessin-animé de Blake & Mortimer et Bob Morane. C’étaient des histoires longues. On avait le temps de développer l’action et l’aventure.
Les formats 3D humoristique court, comme Aldo La Débrouille, ne demande pas la même écriture. Il faut privilégier le gag. J’ai d’autres projets en audiovisuel. Mais c’est encore flou. J’ai écris des longs métrages pour des producteurs. Est-ce que cela se ferra, ou pas ? Je ne sais pas. Je ne suis pas le décideur. Le projet vit sa vie, sans moi. Dans la bande dessinée, les auteurs ne se rendent pas compte de la chance qu’ils ont. Ils envoient un projet à un éditeur, et dans les deux ou trois mois, ils ont une réponse, négative ou positive. Il ne faut pas attendre un financement pendant des années, qui peut-être n’arrivera jamais !

Jean-Christophe Derrien & Simon Van Liemt, en janvier dernier à Angoulême
(c) Nicolas Anspach

Avez-vous des projets en bande dessinée ?

Plusieurs. Le tome 2 de Poker sort en janvier 2011, et celui de Résistances paraîtra en mars prochain pour le Salon du Livre de Paris. On sortira au même moment un one-shot sur la Résistance au Lombard. Neuf histoires courtes de six planches seront dessinées par différents auteurs. Parmi ceux-ci citons Claude Plumail, Hugues Labiano, Olivier Grenson, Béatrice Tillier. L’album sortira à l’occasion d’une exposition au Musée de la Résistance, à Lyon. Chaque histoire aura pour cadre un objet symbolique de la Résistance. Je n’en dis pas plus …

(par Nicolas Anspach)

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Une interview : "Miss Endicott est un mélange entre Amélie Poulain, Marie Poppins et Buffy" (Octobre 2007, avec Xavier Fourquemin)

Des chroniques d’albums :
- Miss Endicott T1
- Time Twins T2 et T1
- Incantations T1


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Photos : (c) Nicolas Anspach

 
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