L’Ambulance 13 - T1 : Croix de sang - Par Cothias, Ordas et Mounier - Editions Bamboo

Cette nouvelle histoire prévue en deux tomes, permet ainsi à l’éditeur Bamboo d’occuper un créneau déjà bien fréquenté.

Pour son retour à la BD, Patrick Cothias a choisi de nous faire revisiter l’univers des tranchées. À travers le personnage de Louis Bouteloup, jeune médecin envoyé au front à Fleury près de Verdun, lieu emblématique, les auteurs nous offrent une vision très particulière d’un des plus grands conflits du XXe siècle un thème bien présent depuis quelques années dans le monde des bulles.

Des deux côtés du front, ce que l’on n’appelle pas encore la médecine d’urgence en est à ses balbutiements : une poignée de médecins tente alors de faire face à des situations de souffrance parfois insoutenables et souvent désespérées.

Fils d’un député connu et soupçonné de ce fait d’être un pistonné, le jeune homme est amené à faire ses preuves par des actions héroïques en récupérant jusque dans les lignes ennemies des hommes en lambeaux, pour essayer de sauver… ce qu’il en reste !

La première partie de ce récit prévu en deux tomes nous décrit avec précision le quotidien de ces hommes dont le rôle reste encore aujourd’hui mal connu. Tiraillé entre son devoir de soldat (notre héros est officier), ses états d’âme humanistes et sa fidélité à ses engagements de médecin, le jeune chirurgien s’efforcera de faire face.

Sujet peu traité de manière aussi frontale et détaillée, le quotidien des personnels de santé des armées n’avait jamais fait l’objet d’une chronique aussi précise et documentée si l’on excepte le travail monumental d’un Tardi bien entendu !

Décrire le rôle et l’action de ces « soldats » confrontés à l’horreur n’est pas la moindre des qualités d’un album bien fait, à la mise en page efficace, au dessin précis et soigné. Alain Mounier bien connu des amateurs de séries comme Dock21 (Dargaud), Le Solitaire (Glénat) ou encore Box (Grand Angle Bamboo) sert avec talent le propos des deux scénaristes en utilisant un trait réaliste et totalement crédible. La mise en couleurs de Sébastien Bouet valorise un graphisme solide et assuré en complet accord avec le contexte et les ambiances du sujet.

On ne présente plus Patrick Cothias « chef de file » du renouveau de la BD historique, adossé à la célèbre revue Vécu éditée par Jacques Glénat dans les années 1990. L’auteur des Sept Vies de l’épervier, du Vent des Dieux ou des Eaux de Mortelune a su imposer sa marque et contribuer à renouveler avec talent un genre tombé alors en disgrâce. Son retour à la BD se fait donc à travers cette nouveauté, fruit d’une collaboration avec Patrick Ordas, les deux auteurs ayant déjà publié ce récit sous forme de roman en juin dernier dans la collection Roman Grand Angle chez le même éditeur.

En dépit de ses qualités, cette chronique risque, au moins pour ce premier tome, de laisser le lecteur sur sa faim. Si l’album est techniquement parfait et fort séduisant graphiquement, le récit peine à « décoller » et semble hésiter entre la description « quasi-documentaire » d’un aspect méconnu de la Grande Guerre et les épopées historiques et haletantes auxquelles l’auteur de la série Masquerouge (Glénat) nous avait habitués naguère. L’abondance de récitatifs et de dialogues parfois un peu convenus n’ajoute rien à un récit qui gagnerait sans doute à adopter un rythme « plus enlevé » voire « allégé ». La narration de ce premier tome semble « un peu prisonnière » du souci de réalisme voire de « pédagogisme » qui habite le début de cette histoire. La première édition est d’ailleurs complétée d’un cahier spécial d’une dizaine de pages rédigé en partenariat avec le Musée du service de santé des armées.

On attend donc avec encore plus d’impatience la suite de ce qui reste néanmoins un travail de grande qualité et… « de saison » !