Pas la peine d’y aller par quatre escaliers, « L’immeuble d’en face » est un petit bijou. On y entre comme dans une cave, prudemment. On en ressort tout sourire, presque euphorique.
Et pourtant... Le scénario n’est jamais que le quotidien, sans véritable point de départ ni point de chute (quoique...), de six locataires d’un petit immeuble de trois étages. Ils ne se connaissent pour ainsi dire pas mais ne cessent, proximité oblige, de se croiser, de s’observer du coin de l’œil, de s’entraider furtivement parfois.
Vanyda saute d’un appart’ à l’autre, dessine ce qu’il s’y passe, l’intimité de l’instant, des ébats amoureux du petit couple du dessus aux affres de la grossesse de la mère célibataire du rez-de-chaussée, en passant par les témoignages d’affection du grognon du deuxième pour son Dog allemand. L’auteur(e) se paie même le luxe de s’attarder sur la préparation d’une tasse de thé. Surprenant strip suggestif parmi tant d’autres.
Mais bout à bout, tout colle à la perfection. Le réalisme est saisissant et c’est sûrement pour ça que l’on s’éprend de cet immeuble. On s’y sent chez soi.
Une chose est sûre, Vanyda ne va pas rester quasi-anonyme longtemps - « L’immeuble d’en face » a d’abord été publié à 300 exemplaires photocopiés avant d’être pris sous l’aile d’une prometteuse petite maison d’édition, La boîte à bulles. Elle a déjà un style bien affirmé, emprunté à la tradition manga, les fioritures graphiques en moins. Trait fin, noir et blanc maîtrisé, découpage hors norme agréablement déroutant...
Un seul petit reproche en fait, les effets de mouvements brusques un chouilla scabreux. La Vanyda scénariste séduit également par son explosive sensibilité féminine, son sens de l’humour et du détail. Un travail propre de 168 pages à mettre entre toutes les mains.
(par Nicolas Fréret)
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