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La Dame à la licorne : Revisitée par 16 étudiants de l’École Estienne - Futuropolis

Par Tristan MARTINE le 4 janvier 2016                      Lien  
Seize variations proposées autour de la tapisserie La Dame à la licorne par les étudiants de l’École Estienne.

Avec cet album, ce sont trois institutions qui se rencontrent. D’une part, l’École Estienne. Quand on pense aux écoles de bande dessinée francophone, cela évoque plutôt l’école Émile Cohl, à Lyon ou Saint-Luc, à Bruxelles. Pourtant, c’est bien ici de l’École supérieure des arts et des industries graphiques qu’il s’agit. Créée en 1889, cette école municipale qui dépend de la ville de Paris, est une école professionnelle pour les arts et les industries graphiques, formant aux métiers du livre, du design et de la communication près de 600 élèves, dont l’incorrigible dessinateur Siné par exemple..

D’autre part, le musée de Cluny, qui occupe les anciens thermes romains de Lutèce et l’hôtel des abbés de Cluny, édifié à la fin du XVe siècle. Il s’agit d’un musée consacré au Moyen Age, dont les collections (peintures, sculptures, tapisseries, vitraux, pièces d’orfèvrerie et d’ivoire) couvrent mille ans de création artistique.

La Dame à la licorne : Revisitée par 16 étudiants de l'École Estienne - Futuropolis

Enfin, et surtout, La Dame à la licorne. Tissée entre la fin du XVe et le début du XVIe siècle, il s’agit d’une série de six pièces de tapisseries. Les cinq premières représentent les cinq sens. La sixième est imbibée d’un parfum de mystère, puisqu’elle est commentée par l’inscription « À mon seul désir ». Il pourrait s’agir du libre-arbitre : la Dame à la beauté diaphane renoncerait aux plaisirs temporels, et cela constituerait son sixième sens.

Sur un fond de « mille fleurs », une jeune femme pose entourée d’une très riche végétation, d’emblèmes héraldiques, d’animaux, notamment un lion et une licorne, le tout dans une atmosphère très poétique et agrémentée d’un arrière-plan rouge d’une grande beauté. Ce chef-d’œuvre des débuts de la Renaissance française a trouvé un nouvel écrin depuis décembre 2014, le musée de Cluny accueillant ces tapisseries rénovées dans une nouvelle scénographie conçue par l’architecte en chef des Monuments Historiques, Paul Barnoud, qui respecte la hiérarchie des sens en vigueur au Moyen Age, du pus matériel au plus spirituel.

Ces trois institutions n’étaient en rien prédestinées à dialoguer, et pourtant un projet original a réussi à les réunir. Durant plus de deux ans, de nombreux étudiants de l’école Estienne ont chacun réalisé une histoire courte en forme de variation sur La Dame à la licorne, et les seize meilleurs ont été retenus, entamant un dialogue avec cette tapisserie vieille de cinq siècles, expliquant ce qu’elle leur évoque aujourd’hui. Cette collaboration, à l’initiative du Musée de Cluny, ne peut qu’évoquer les autres partenariats conclus par les éditions Futuropolis avec le Louvre et avec le Musée d’Orsay et permet à ces institutions culturelles de s’offrir une vitrine plus large et une ouverture vers un public différent.

À la fin du volume, un dossier documentaire reprend ainsi les six tapisseries et Béatrice de Chancel-Bardelot livre des explications très intéressantes pour permettre de mieux appréhender cette œuvre singulière.

Émile Bravo, qui a été le « parrain » de cette aventure, ouvre l’album avec une double plage pleine d’humour dans laquelle on reconnaît bien sa patte. Ses seize jeunes padawans livrent des résultats assez différents : forte et sensible (Zéphir), onirique mais brouillon (Kajika Aki Ferrazzini, Adèle Verlinden), pleine d’aventure et de maîtrise (Charlotte Arene), délirant et étonnant (Laura Bertrand, Manon Debaye), décalé et surprenant (Marin Martinie), poétique et magnifique (Héloïse Chochois), humoristique (Léopold Prudon), intégrant des éléments de la tapisserie en couleur (Guillaume Laugé) ou en noir et blanc (Maxime Sabourin), insérée dans un récit intime (Louise Smith), Le plus intéressant est sûrement de comparer ces récits entre eux, et de constater comment un même postulat de départ a pu aboutir, selon l’imagination et le style des élèves, à des résultats aussi différents et étonnants.

Le résultat est bien sûr très inégal, mais cela est logique étant donné qu’il s’agit pour la plupart d’entre eux d’une première publication et que ces coups d’essais, parfois très prometteurs, appellent avant tout maturation et confirmation. Cela n’empêche pas certaines de ces jeunes pousses de faire d’ores et déjà preuve d’une belle maîtrise.

Dans le prolongement de l’album, une exposition rend hommage à ce projet au Musée de Cluny. Elle présente, du 14 octobre 2015 au 29 février 2016, les travaux préparatoires des élèves aux côtés d’autres récits en image antérieurs de plusieurs siècles, avec lesquels ces auteurs en herbe ont réussi à susciter des connivences originales.

(par Tristan MARTINE)

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