C’était à Walnut Grove, en 1969, dans la campagne profonde, désespérément profonde, des Etats-Unis. La grand-mère de William Baroudsky a déjà tracé le destin de son petit-fils : quand il sera grand, il sera éleveur de porcs et on l’appellera "ce vieux con de Baroudsky"... comme tout le monde.
William, lui, a une autre idée de son avenir : "Quand je serai grand, je serai agent du FBI , je traverserai des paysages somptueux et je prendrai des bains dans des jacuzzis !!". Et il décide de le prouver à la face du monde entier, à commencer par sa grand-mère, son institutrice et son copain Malcolm, dont la grand-mère a, elle aussi, tracé le destin : alors que lui veut travailler dans la physique nucléaire, elle ne le voit que dans la cueillette du coton. Comme tout le monde. Enfin, comme tout le monde noir.
Le problème, c’est que Bill Baroud est déjà catastrophique. Et que ses enquêtes se déroulent systématiquement mal pour quelqu’un, que ce soit la poule naine du Laos qui a coûté une fortune à sa maîtresse et qu’il vient de décapiter, convaincu qu’elle avait volé les sujets du contrôle, un vagabond puant errant dans les bois. - dont il ne s’aperçoit qu’après l’avoir zigouillé qu’il s’agissait de son oncle Barney, de retour après trente ans passés à chercher de l’or - ou encore les chatons qu’il croyait sauver de la noyade. Préfigurant ainsi le connard cynique et abruti qu’il deviendra quelques années plus tard.
(par Patrick Albray)
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Déjà fermé définitivement à tout germe d’intelligence, William Baroudsky traverse cette Amérique misérable sans prendre conscience de la misère et des inégalités qui la pourrissent déjà, complice par sa bêtise des injustices sociales et du Ku-Klux-Klan. L’humour noir de Larcenet est terriblement efficace, mais il se teinte aussi d’émotion lorsqu’il décrit la situation des Noirs, ou de désespoir, comme dans le récit final, où tous les paysans sont chassés par la compagnie céréalière à qui appartient la région. Impossible de lire les dernières images de cet album sans être envahi par un horrible frisson.