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La traductrice iranienne du "Bleu est une couleur chaude" de Jul Maroh harcelée.

Par Pascal AGGABI le 1er mars 2015                      Lien  
Le livre de Jul Maroh, "Le Bleu est une couleur chaude", continue de déranger. Cette fois, c'est sa traduction en farsi qui est stigmatisée par les conservateurs religieux iraniens, tandis que sa traductrice est directement menacée.
La traductrice iranienne du "Bleu est une couleur chaude" de Jul Maroh harcelée.
Le Bleu est une couleur chaude de Julie Maroh, en farsi.
© Glénat

Sepideh Jodeyri, traductrice de la bande dessinée "Le Bleu est une couleur chaude" de Jul Maroh (Ed. Glénat), un long récit de 152 pages qui s’attarde au cours d’une histoire sensible et attachante sur le thème de l’homosexualité féminine et de son acceptation dans la société d’aujourd’hui, est une poétesse iranienne spécialisée de l’adaptation de nombreuses œuvres en persan, comme les romans d’Edgar Allan Poe ou de Jorge Luis Borges.

Cette traduction du livre de Maroh qui a dès le départ connu une exceptionnelle reconnaissance de la critique et du public, reçu aussi de multiples prix -dont le Prix du Public au Festival d’Angoulême en 2011- et, fait encore plus exceptionnel, surtout pour un jeune auteur, une adaptation au cinéma nommée La Vie d’Adèle, réalisée par Abdellatif Kechiche honoré par la Palme d’Or du Festival de Cannes 2013 été jugée malvenue de la part de dirigeants iraniens et de médias conservateurs religieux pour qui il vaut mieux ne pas faire la promotion de l’homosexualité. En tout cas si on veut éviter la prison, pour ne pas dire plus...Car en Iran l’homosexualité est passible de la peine de mort...

Sepideh Jodeyri déjà censurée par le passé, et menacée pour ses prises de position contre Mahmoud Ahmadinejad, a été victime d’une véritable campagne de lynchage médiatique dans son pays. Un lynchage qui touche aussi l’éditeur de son dernier recueil de poésie, dont les opposants à Sepideh Jodeyri affirment qu’elle y affiche clairement son soutien à l’homosexualité. Le directeur du musée qui faisait la promotion de cette publication a, quant à lui, été tout simplement viré !

En réaction, Jul Maroh, contactée par Sepideh Jodeyri, a publié une tribune relayée par le SNACBD (section BD du Syndicat National des Auteurs et Compositeurs) et aussi par toute une chaîne de solidarité médiatique.

Le Bleu est une couleur chaude de Julie Maroh, en farsi.
© Glénat

Dans un entretien accordé à Caroline Besse pour le magazine Télérama, la poétesse iranienne, exilée en République tchèque, explique comment ce lynchage médiatique, qui risque de lui interdire toute publication en Iran, a commencé : "J’ai fait publier mon dernier recueil de poésie, And, etc., par un éditeur iranien l’année dernière, sans que cela ne provoque aucun problème. Tout s’est de nouveau envenimé il y a quinze jours, quand l’éditeur en question a annoncé qu’il participerait à une fête du livre, où mes poèmes seraient présentés. Raja News, un site d’infos proche des conservateurs religieux a publié un article très virulent, dénonçant le fait que cette manifestation, accueillie par un musée public, allait promouvoir « un auteur pro-gay », en rappelant que j’avais traduit Le Bleu est une couleur chaude à Paris. D’autres médias lui ont emboîté le pas. Les services de renseignements sont intervenus et ont annulé la fête. Le directeur du musée a été limogé."

Lucide et d’un courage enviable, elle conclut : "Récemment, deux critiques littéraires à qui j’ai envoyé deux essais m’ont répondu qu’il valait mieux que je les envoie à des publications iraniennes basées à l’étranger… Cela m’attriste, car c’est avant tout à mon peuple que j’ai envie de m’adresser. Mais je suis fière que mon soutien aux homosexuels soit connu. Et même fière d’être punie à cause de cela."

(par Pascal AGGABI)

Cet article reste la propriété de son auteur et ne peut être reproduit sans son autorisation.

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Photo : Commons from fa.wikipedia. Illustrations de Jul Maroh. © Glénat

✏️ Jul Maroh
 
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5 Messages :
  • Qui est l’auteur de la photo de Sepideh Jodeyri ?

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    • Répondu par Didier Pasamonik (L’Agence BD) le 1er mars 2015 à  14:20 :

      Le crédit est mentionné. Auteur inconnu.

      Répondre à ce message

      • Répondu par Francis le 1er mars 2015 à  17:34 :

        La photo est dans le domaine public, comme indiqué dans cette page :
        http://commons.wikimedia.org/wiki/File:Sepideh_joeyri.JPG
        Et si la personne qui l’a mise en ligne en est l’auteur, ce serait Mostafazizi.

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        • Répondu par Didier Pasamonik (L’Agence BD) le 1er mars 2015 à  23:39 :

          La mention indiquée est celle recommandée par Wikipedia. Elle est bien dans le domaine public, d’où la mention "commons" et une source qui est la version farsi de Wikipedia. Rien n’indique que la personne qui l’a mise en ligne en est l’auteur. Habituellement, quand l’auteur veut que son nom soit mentionné, il l’indique clairement. Nous n’avons donc préféré ne pas le mentionner. Quant aux illustrations, elles sont mentionnées avec le nom de l’auteur et le (c) de l’éditeur, comme c’est l’usage.

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          • Répondu le 2 mars 2015 à  14:30 :

            voilà enfin une partie de réponse (décente) qui rend justice à la traductrice et à l’auteur(e) de la photo qui probablement pour des raisons de sécurité a préféré garder l’anonymat

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