Tout l’art de Sattouf est d’enfermer son héros dans ses contradictions. Quand on s’appelle Jérémie Chiboux, comment entrer par curiosité dans une boîte à partouzes sans se griller vis-àvis de la fille qu’on aime ? Comment préserver l’amitié avec son meilleur pote sans se laisser envahir par ses perturbations sentimentales ? Comment arriver à s’entendre avec le père de sa copine alors qu’il a une tronche des plus réfrigérantes ? Enfin, comment prendre au sérieux la relation entre sa meilleure copine et Vincent Delerm (LE Vincent Delerm) alors que celui-ci vient de se prendre un pied de chaise dans le fondement ?
Tout le comique repose sur le caractère de flippé du jeune Jérémie dont le curseur émotif atteint des sommets quand il voit sa copine signer un chèque de 223.250 € pour quelques meubles destinés à décorer leur nouvel appartement (en fait un château de famille) alors qu’il s’imaginait « partager les frais ». Il est par ailleurs incapable de refuser les sollicitations de ses amis dont il est à la fois la victime et le confident. La galerie de personnages est convaincante. Elle ne demande qu’à s’étoffer avec un scénario qui gagnerait en complexité. Les lamentations de Jérémie ne sont pas ici un texte apocalyptique annonçant l’avènement du Messie. D’ailleurs, si celui-ci devait arriver, par inadvertance, il y a des chances que Riad Sattouf lui opposerait un réjouissant fou rire.
(par Didier Pasamonik (L’Agence BD))
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