Attaquant un groupe qu’ils accusent être constitués de "sympathisants de la mairie" (ce qui, à notre connaissance, n’est pas le cas), n’hésitant pas à traiter leur appel de "manœuvre indigne", le SEA appelle à "prolonger le partenariat avec 9ème Art+", à leurs yeux paré, à quelques réserves près, de toutes les vertus.
De son côté, le SNE appelle le président de l’Association du FIBD à dénoncer le contrat et, en revanche, à engager une nouvelle négociation, qu’il souhaite curieusement "exclusive" avec 9eArt+. Sans appel d’offre public, donc ?
Ce qui ressort de ce communiqué, c’est la peur, apparemment panique, de voir la ville prendre la main sur le FIBD. Il est vrai que le fonctionnement quelque peu chaotique des instances politiques tutelles de la Cité et un climat général de suspicion à l’égard la chose publique, ont pu ébranler la confiance des uns et des autres.
Reste ces quelques questions :
Quelle est la position des auteurs et de leur Syndicat dans cette affaire ? Ils nous semblent un peu oubliés dans les déclarations d’intention des uns et des autres ;
Comment le Festival envisage-t-il l’avenir en concordance avec les forces vives d’Angoulême, les entreprises et les institutions qui l’animent toute l’année ? Ce projet ne semble pas exister pour l’instant et n’a pas été proposé à l’Association du FIBD.
L’Association du FIBD et 9eArt+ opèreront-ils en dehors de cette opacité qui a été la sienne jusqu’à présent, cette opacité tant redoutée par nos éditeurs alternatifs ?
Elles sont aujourd’hui sans réponse. Comme on disait à Tournai en 1978 : À suivre...
COMMUNIQUÉ DE PRESSE DU SYNDICAT DES ÉDITEURS ALTERNATIFS
Le festival d’Angoulême nous avait habitués à des crises, le plus souvent automnales, au gré des variations politiques locales. Innovation en 2015 : la crise éclate au printemps, à l’occasion de la fin du contrat qui liait l’association du festival à la société qui l’organise, 9ème Art+.
La mairie d’Angoulême exerce actuellement de fortes pressions sur l’association du festival (FIBD) afin qu’elle ne renouvelle pas le contrat avec 9ème Art+, comme elle était en train de le faire à des conditions qu’elle juge favorables. Les nombreuses prises de position de Samuel Cazenave, l’adjoint à la culture et nouvellement nommé Président de la Cité de la bande dessinée, font craindre une tentative de contrôle, direct ou indirect, d’un festival jusqu’alors indépendant. Pourtant, les auteurs et les éditeurs sont majoritairement attachés à cette indépendance, qui seule a permis de faire du festival la référence qu’il est aujourd’hui.
À quelques heures d’une réunion cruciale pour le destin de la manifestation, une pétition surgit opportunément sur internet, fruit d’un groupe baptisé, non sans indécence, « Les indignés de la bande dessinée d’Angoulême ». Cette pétition, qui reprend presqu’à la lettre les déclarations d’intention de Samuel Cazenave, laisse peser le doute sur ses initiateurs. Car, hormis les deux anciens présidents de l’association, Yves Poinot et Jean Mardikian, qui endossent le rôle de porte-paroles, l’opacité est bien entretenue sur ce « mouvement informel de citoyens, d’acteurs culturels et économiques ». Il est pourtant possible d’apprendre qu’on y trouve bien peu d’auteurs et d’éditeurs, pourtant nombreux dans la région, et beaucoup de sympathisants de la mairie…
Nous, éditeurs du SEA, voulons dire notre consternation face à la manœuvre indigne de ces "indignés". Nous voyons cette nouvelle tentative de déstabilisation du festival avec découragement et ne comprenons pas qu’on en soit encore à ce stade après 42 ans d’existence d’un événement qui a permis de développer l’écosystème de la bande dessinée tout en dotant la ville d’une réputation internationale.
Nous plaidons pour que le respect et la coopération soient le cœur d’une manifestation qui dépense depuis toujours trop de temps et d’énergie à lutter contre les velléités régulières de prises de contrôle qui ont jalonné son histoire. À l’âge qu’il a atteint, le festival n’appartient plus à personne, car il appartient à tout le monde ; il relève du bien commun. C’est par la préservation des équilibres qui le sous-tendent que le festival pourra conserver son indépendance, et par là-même la diversité qui fonde sa qualité.
Nous souhaitons que le FIBD reste indépendant et puisse, s’il le souhaite, prolonger le partenariat avec 9ème Art+, un organisateur qui, s’il n’est pas exempt de critiques, aura permis de porter la manifestation à un niveau de professionnalisme et de rayonnement qu’il n’avait pas auparavant.
Nous sommes enfin portés à considérer avec perplexité des promesses déjà proférées par une longue descendance d’élus locaux qui, en 42 ans, n’ont pas trouvé nécessaire de doter le festival de structures pérennes, entraînant ainsi des dépenses répétées annuellement et contribuant à maintenir dans une forme de fragilité l’événement majeur d’une ville qui se surnomme elle-même « La cité des festivals ».
En espérant que l’intérêt général finira par prévaloir sur les intérêts particuliers, nous souhaitons longue vie au Festival d’Angoulême, dont la ville et le milieu de la bande dessinée pourraient difficilement se passer.
Les éditeurs du SEA,
L’Association, Arbitraire, Atrabile, Bicéphale, Çà et Là, Cornélius, Dérive urbaine, Éditions 2024, FLBLB, Frémok, Hécatombe, ION, Ici-même, L’Apocalypse, L’Égouttoir, L’Oeuf, L’Employé du moi, La 5ème Couche, La Cafetière, La Cerise, Le Lézard noir, Les Requins Marteaux, Les Rêveurs, Matière, Misma, NA, Pré Carré, Rackham, Radio as Paper, 6 pieds sous Terre, Super Loto, Tanibis, The Hoochie Coochie, Une Autre Image, Vide Cocagne
(par Didier Pasamonik (L’Agence BD))
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