Le CFCM avait demandé au juge des référés du Tribunal de Grande Instance de Paris la saisie de l’hebdomadaire satirique qui s’apprêtait à publier aujourd’hui dans ses pages les caricatures qui enflamment l’opinion musulmane mondiale depuis quelques semaines. Cette demande a été rejetée pour vice de forme sur réquisition du Ministère Public, suivant en cela la demande de nullité introduite par l’avocat de Charlie Hebdo qui constatait qu’un certain nombre de procédures (notamment le fait que, comme l’impose la loi de 1881, l’assignation n’avait pas été envoyée dans les délais requis par la loi) n’avait pas été accomplies. L’avocat du journal satirique, Maître Richard Malka, n’en menait pas large : le président du Tribunal, M. Jean-Claude Magendie, est celui-là même qui avait présidé la cour qui avait condamné en mars 2005 l’affiche détournant La Cène de Léonard de Vinci...
Charlie Hebdo paraît donc, avec un tirage de 160.000 exemplaires. A huit heures, le jour de la sortie, le numéro était déjà devenu introuvable. Deux réimpressions successives ont eu lieu dans la même journée. Les journalistes et les locaux du journal ont fait l’objet de mesures de sécurité spéciales. Aux côtés des dessins « sataniques », toute l’équipe du journal se déchaîne, son rédacteur en chef Philippe Val considérant que même si ces douze dessins n’étaient pas très bons, il fallait les publier « par principe ». De son côté, en Iran, un grand quotidien local a décidé de lancer un concours de dessins d’humour sur la Shoah.
Pour sa part, Le Canard enchaîné, autre hebdomadaire satirique du mercredi, qui a choisi de ne pas publier ces caricatures ne les trouvant « ni très amusantes ni surtout très originales », consacre cependant sa « une » au sujet avec une manchette cinglante : « Prophète l’amour pas la guerre ! » , tandis que la baseline de l’hebdomadaire « journal satirique du mercredi » se trouve surchargée de la rature « satanique » en lieu et place du mot « satirique ».
Dans un article intitulé « Tirs et martyrs croisés », Louis-Marie Horeau analyse : « Dessiner une bombe dans la barbe du Prophète n’a aucun sens : ce n’est pas le seul Coran qui arme les terroristes. C’est la confusion entre le religieux et la chose publique. C’est le cléricalisme, ce vieil ennemi du « Canard », jamais tout à fait mort, qui renaît de ses cendres. Quoi que prétendent nous dire les fameuses caricatures impies, il n’y a pas d’Islam belliqueux d’un côté, des religions pacifiques de l’autre. Tous cherchent, ou ont cherché, à imposer leur loi. » Et Erik Emptaz, le rédacteur en chef de l’hebdomadaire de conclure : « Vu les façons dont les choses sont en train d’évoluer, « l’anticléricalisme désuet » cher au « Canard » est d’une brûlante actualité. »
Surtout pour les ambassades occidentales, a-t-on envie d’ajouter.
(par Didier Pasamonik (L’Agence BD))
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