Grâce à cette conjonction favorable, certaines d’entre elles ont pu passer au-dessus de la tête des éditeurs engoncés dans leurs habitudes machistes. L’exemple le plus éclatant est certainement celui de Pénélope Bagieu.
La longue histoire de Pénélope
La légende veut que ce soit un blog qui l’ait fait connaître. Mais auparavant, la jeune femme avait déjà en poche un diplôme de l’École nationale supérieure des arts décoratifs, avec une spécialisation dans l’animation et le multimédia, réalisé un court métrage d’animation passé sur Canal + nominé à Amiens et à Annecy et développé une sacrée expérience dans la publicité avec une campagne déclinée dans la presse, la télé et Internet.
Grâce à son Blog autobiographique Pénélope Jolicoeur (2007), l’éditeur Jean-Claude Gawsewitch la repère et la publie dans sa collection « tendance fille » avec son premier album, recueil de ses pages publiées sur Internet :Ma Vie est tout-à-fait passionnante (2008). Une version en livre de poche et deux autres volumes issus de pages publiées dans la presse magazine : Joséphine, suivront. Elle multiplie les contrats d’illustration pour First ou Micro Application/Femme actuelle et devient la coqueluche des médias. C’est l’ascension de la star des blogs. Elle en arrive même à signer une ligne de lingerie.
Elle publie ces jours-ci chez Gallimard dans Bayou, la collection de Joann Sfar, Cadavres exquis où elle s’applique à raconter pour la première fois une histoire longue racontant une intrigue amoureuse dans le milieu littéraire d’aujourd’hui. La vie y est source du roman et le roman, une raison de vivre. C’est délicieusement raconté, le trait est observé, à la fois profond et léger.
Les souvenirs de Madeleine
Pas moins intéressant est le parcours de Madeleine Martin qui publie de façon contemporaine Les Madeleines de Mady chez Delcourt. Aucun parcours artistique : un Bac +5 avec du droit et de la communication. Sortie de l’université, elle se laisse envahir par son « à-côté passionnel », le dessin. Des rencontres l’amènent à faire de l’illustration et à tracer sa voie dans les arts appliqués : piges pour des magazines de graphisme, design pour des jeux vidéo, création dans des boîtes de pub. Mais elle trouve qu’elle tourne en rond artistiquement. Le Blog lui offre l’occasion de ses expérimentations graphiques et surtout d’envisager la narration, elle qui, jusqu’à présent, se cantonnait essentiellement dans l’illustration.
Elle croise David Chauvel, éditeur chez Delcourt, dans un salon de BD et lui envoie un lien. Le Blog séduit et l’éditeur lui propose de publier un livre.
Entre le Blog et l’imprimé, il y a une refonte complète et de nombreux bonus. « L’éditeur a eu un grand rôle de soutien, dit-elle. Il a restructuré l’ouvrage, m’a aidée dans ma sélection. C’était ma première expérience dans la BD donc, forcément, il m’a appris plein de choses… »
L’ouvrage fonctionne sur le principe du Daily Candy ou de la Madeleine de Proust : chaque petite note retient une anecdote agréable, furtive, qui fait sourire. Le dessin est sans façon ni chichi, mais incroyablement précis et juste.
« Les Blogs ont répondu à une attente d’un public qui était jusque là insatisfaite jusqu’à ce que les Blogs de fille arrivent, cela me paraît évident, » analyse Madeleine Martin.
Cette proposition nouvelle se démarque aussi bien dans le ton que dans l’expression graphique. On ne sait si la tendance sera pérenne, mais elle est à coup sûr, le miroir du temps.
(par Didier Pasamonik (L’Agence BD))
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