Jean de la Fontaine s’amuserait de ce développement de la fable. Lui qui, à la manière d’Esope, voyait les animaux de ses histoires d’une façon très naturaliste -c’est du moins ainsi que les illustrateurs de son époque et du siècle qui s’ensuivit l’avaient compris- s’étonnerait de voir à quel point les conteurs de notre époque ont été à ce point influencés par le modèle tolkienien.
Car il a beau se réclamer de Chaucer, dont il cite en préface Le Conte du vendeur d’indulgences, et de J. K. Rowling, pour laquelle il convoque Le Conte des trois frères, c’est bien l’esthétique du Seigneur des anneaux qui est à l’œuvre ici avec son moyen-âge de Fantasy et ses cartes de territoires.
Mais David Petersen qui a biberonné à cet univers a su, dans Mouse Guard (Légendes de la garde), garder le ton du fabuliste en laissant reposer la résolution morale sur des qualités naturelles : l’intelligence, le courage, l’humilité, l’amour et la générosité qui sont les caractéristiques des futurs héros de sa saga principale.
Il en résulte un ton nouveau qui séduit par sa cohérence. Sa série, honorée par quatre Eisner Awards entre 2008 et 2011, constitue pour les plus jeunes une excellente introduction à un univers de Fantasy qui a envahi tous nos écrans et dont, d’ordinaire, les ressorts et les thèmes sont bien plus désespérés, violents et crépusculaires.
(par Didier Pasamonik (L’Agence BD))
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