La formule n’a pas changé : des gags éculés et poussifs habillés par un dessin vulgaire et malhabile, bariolé à l’aveugle de couleurs à peine moins primaires que l’humour des histoires. Dzack et Gaby pratiquent la bande dessinée à minima. Il faut des cases, des dessins dans les cases, des couleurs dans les contours des dessins, des bulles, du texte dans les bulles. Félicitations à eux pour leur sens aigu de l’observation.
Les lecteurs de Max et FHM pourront une nouvelle fois se complaire dans le récit de la sottise abyssale de Vanessa et de ses consœurs blondes. Devant ce spectacle plus consternant qu’autre chose, on se retrouve dans une sorte de torpeur, le cerveau engourdi et l’estomac noué. Pas drôle pour un sou, cette bande dessinée est cependant utile : elle prouve une fois encore que faire rire de la bêtise demande une certaine intelligence. Et un certain talent. À défaut de quoi...
Depuis son apparition en 2005, année de parution des trois premiers volumes, la série a trouvé sa cadence avec une nouveauté [1] au printemps et une à l’automne -plus quelques variations, en Ch’ti, en Breton, des agendas et autres produits dérivés. Participant indéniablement à la surproduction tant décriée, Soleil lui-même décrié par les gens de bon goût, et les autres, exploite sans vergogne un concept rentable. C’est son rôle. Mais l’exploite-t-il si bien que ça ?
Si ces dessins n’étaient pas d’une laideur aussi tonitruante, les gags aussi laborieux, si l’éditeur enfin ne raclait pas le caniveau avec tant d’énergie -campagnes de pub omniprésentes, diffusion via Ave Comics ou Relay.fr, un dessin animé sur Zaoza-, la série n’aurait-elle pas un public plus large ? En effet, si l’on comptabilise la notoriété des stéréotypes et blagues utilisés [2], l’agressivité commerciale et la fréquence de parution, le succès commercial [3] est-il si éclatant ? Tous ces efforts n’auraient-ils pas été plus fructueux si le produit tant promu n’avait pas été aussi médiocre ?
On sait que Soleil tente de conquérir le grand public malgré son image de marque défavorable [4]. Était-il dès lors bien vu d’enclaver les Blondes dans le carcan de la bande dessinée cartonnée/couleur à la franco-belge, réservée, on le sait, à un public étriqué, presqu’exclusivement masculin et vieillissant de surcroît ? Combien de gags auraient été plus percutants en tant que dessins isolés ? Et surtout, n’y avait-il pas moyen d’éviter que l’adaptation animée soit plus désastreuse encore, et ringarde, que la bande dessinée ?
Reste qu’au-delà de la facilité de l’exercice, et des motivations pécuniaires, c’est la vanité absolue de l’entreprise dans son ensemble qui donne le vertige : tandis que certains (auteurs, éditeurs, libraires et lecteurs) défendent bec et ongle un travail de création, voilà que cette bande dessinée à court d’idée s’impose, et s’installe dans le paysage éditorial, dans une espèce de marginalité honteuse, mais avec fermeté ; car Les Blondes ne s’arrêteront pas à douze albums, on peut le parier...
(par Beatriz Capio)
Cet article reste la propriété de son auteur et ne peut être reproduit sans son autorisation.
Commander ce livre chez Amazon
Commander ce livre à la FNAC
[1] 36 pages facturées au tarif habituel pour 48 pages.
[2] On se souvient que Frédérique Bel avait exploité le filon avec plus d’intelligence et d’inventivité sur Canal + avec sa Minute Blonde pendant la saison 2004-2005.
[3] Souvent corroboré à tort par les commentateurs avec le tirage à la nouveauté.
[4] À travers les labels Quadrants, Futuropolis et Métamorphoses notamment
Participez à la discussion