En effet, si l’on en parle souvent avec admiration et bienveillance dans la description des tribus amérindiennes (ou plutôt américaines) au moment de leurs premiers contacts avec les colons européens, l’aboutissement de ce vrai "grand remplacement" est très peu représenté.
Si quelques auteurs comme Thierry Murat avec Étunwan ou Hughes Micol avec Scalp ont récemment, coup sur coup, traité de la prise de vitesse de l’extermination des peuples premiers d’Amérique dans les années 1860, Philippe Nihoul, lui, tâche d’en montrer l’aboutissement dans les années 1920 avec ce premier tome des Ombres de la Sierra Madre, financé et publié chez Sandawe.
Démarrant sur une scène de tranchées apocalyptique de la Première Guerre mondiale, le récit place le lecteur derrière l’épaule de Moroni Fenn, un jeune Mormon. Quelques années plus tard, traumatisé et de retour en Amérique, il va se voir confier une mission pour mettre à profit son tempérament fougueux et auto-destructeur (et l’éloigner de la civilisation) : protéger les colons américains du Mexique, lors des troubles de sa révolution de 1920.
Tel est le point de départ d’une épopée dénonçant en toile de fond la condition des derniers Apaches, luttant avec férocité pour conserver leur liberté et leurs traditions. Un combat inégal, perdu d’avance, mais – face aux pratiques visant à kidnapper des enfants pour les exposer tels des animaux – leur seule manière de partir avec leur dignité...
Philippe Nihoul ne se contente pas de faire œuvre militante, le scénariste, appuyé par le dessin classique mais efficace de Daniel Brecht, nous sert un western crépusculaire. Charlatans, ermite sauvage à moitié fou, tenancière de saloon dure à cuire... Tous les personnages emblématiques des récits de cette période sont réunis dans un cocktail explosif dont les bases sont habilement posées dans ce premier tome agrémenté d’un cahier de 20 pages sur les derniers Apaches des États-Unis, pour bien se mettre dans l’ambiance.
(par Fabrice FADIGA)
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