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Les Petits Hommes - L’Intégrale T5 : 1979-1982 - Par Seron & Hao

Par Didier Pasamonik (L’Agence BD) le 17 août 2013                      Lien  
Réunissant quatre tomes d'une série qui en comporte 44, ce n'est pas moins de dix volumes de l'intégrale des {Petits Hommes} qui nous attendent. C'est que, auteur prolifique, Seron a contribué à la colonne vertébrale de la production du {Journal de Spirou} au tournant des années 1980.

Nous le rappelions dans un précédent article qui a valu un flot de commentaires bien sentis, Seron a été la victime consentante d’une époque où la bande dessinée belge cherchait à prolonger le souffle magique de ses fondateurs, sans vraiment y parvenir. Le mimétisme de son travail avec l’œuvre de Franquin et des classiques de l’école de Marcinelle est patent, y compris dans cette cinquième intégrale qui regroupe les volumes 11 à 14 de la collection : un seigneur féodal qui a des airs de Maltrochu, des soldats sortis tout droit de l’armée de Zantafio, des engins volants dérivés de ceux de Zorglub, des intérieurs modernes dignes de Modeste & Pompon, un dinosaure sorti du Mézozoïque... Nous sommes dans une perpétuation des codes -perçus comme une recette de potion magique mais sans la magie qui va avec.

En quoi cette manière a-t-elle été l’objet d’une telle vindicte et non celle, autorisée, de Tome & Janry ou celle, parodique, d’un Yves Chaland qui, les uns et l’autre, ont marqué les années 1980 ?

Sans doute en raison du projet artistique qui les sous-tendait : Tome & Janry étaient dans la préservation d’un patrimoine qu’il fallait renouveler de l’intérieur sous le regard sourcilleux des fans ; Chaland dans la déconstruction post-moderne d’un graphisme qui avait été un apport majeur à la bande dessinée francophone.

Mais il y a autre chose : Les sous-Franquin ont pullulé depuis, preuve de la durable influence de l’auteur de Gaston, mais Seron resta le symbole d’une génération d’artistes dévoyés au service du projet commercial de la famille Dupuis qui était de figer le "style Spirou" qui avait fait la fortune de ces fondateurs comme une grammaire que l’on pouvait dupliquer à l’envi.

C’est l’époque où, dans l’esprit des entrepreneurs de Marcinelle, les Snorkies de la filiale audiovisuelle de Dupuis, la S.E.P.P., ambitionnaient de succéder aux Schtroumpfs, où Les Tuniques bleues devaient remplacer le trou béant laissé par Lucky Luke, Cédric celui de Boule & Bill, tandis que Spirou était confié à un chef-animateur de Belvision imposé par José Dutillieu, Nic Broca...

Objectivement, toutes ces tentatives ne se sont pas soldées par des échecs et, même si certains esthètes font la moue, elles ont accompli peu ou prou leur mission : celle d’offrir une survivance de cette "école de Marcinelle" dont on retrouve les traces aujourd’hui aussi bien dans le catalogue Bamboo que dans... Astérix.

Peut-être est-ce du aussi à l’isolement volontaire d’un Seron qui, très tôt, refusa de parler aux journalistes en raison de ce procès permanent qui lui était fait. Cette absence de communication est palpable dans une interview qu’il accorde à Télémoustique en 1982 (et reproduite en introduction de cette 5e intégrale) : "... je n’aime pas ce vedettariat basé sur l’auteur. Que l’on fasse la promotion de mes personnages, c’est normal, et, bien sûr, j’apprécie. Mais le lecteur se fiche pas mal de savoir qui est Seron et quelle tête il a..."

Le résultat est une communication déséquilibrée qui va à contre-courant d’un marché de la BD qui valorisera particulièrement, en revanche, dans les années à venir, ce vedettariat tant abhorré par le dessinateur.

Du coup, les dossiers qui accompagnent ces volumes sont singulièrement démunis d’informations de première main et on a recours dans cette intégrale à une interview (comme toujours intéressante mais tellement peu éclairante sur l’oeuvre) de Vittorio Léonardo, le coloriste des Petits Hommes, pour étayer l’analyse d’un travail qui a marqué une génération de lecteurs. Dommage.

(par Didier Pasamonik (L’Agence BD))

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12 Messages :
  • Il faut noter que le grand Seron est également le tonton de Clarke, génial auteur de Mélusine, comme quoi le talent est héréditaire dans la famille.

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    • Répondu par joel le 17 août 2013 à  20:37 :

      j’aimerais savoir si il prépare quelque chose pour bientôt ?

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    • Répondu par Cédille le 17 août 2013 à  22:57 :

      Personnellement j’ai toujours préféré le travail de Seron à celui de Franquin. Je trouve le dessin de Seron plus joli, plus sympathique, avec de plus jolies couleurs (bravo Léonardo) et les histoires sont plus palpitantes que les gags de Gaston (ça tourne toujours en rond). J’espère qu’il y aura une intégrale des Centaures, autre série géniale de Seron.

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      • Répondu le 19 août 2013 à  19:54 :

        Personnellement j’ai toujours préféré Max Pécas à Orson Welles, c’est plus marrant, moins prise de tête.

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  • Aaaah ! Seron est vraiment un virtuose !

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    • Répondu par xav kord le 26 août 2013 à  21:23 :

      Entièrement d’accord ! J’ai relu la flopée de commentaires de 2010 sur le thème "Seron, vil copieur ou dessinateur méritant ?". Je crois que beaucoup jettent l’anathème sur cet homme car ils s’imaginent qu’un auteur de bédés se doit d’être un Artiste et d’apporter son maillon à la grande chaîne de cet Art (je suis volontairement emphatique, je le précise car j’ai appris à me méfier des lecteurs très premier degré de ce forum !). Laissons à Seron le droit d’être un artisan de talent, qui réalisa de jolies séries très maîtrisées destinées à la jeunesse (sans que cela ne soit en aucune manière péjoratif). Relisez le commentaire de Sergio Salma sur le sujet (suivre le lien en début d’article) : tout est dit.

      Par ailleurs, quelqu’un a-t-il des nouvelles de lui à nous donner (j’ai la faiblesse d’éprouver de l’empathie à l’endroit des auteurs que je lus avec grand plaisir) ?

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  • Question : DUPUIS intégrera-t-il dans cette collection "intégrale" le dernier tome paru (en deux versions) chez Clair de Lune (car Dupuis n’en voulait pas) ?!?

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    • Répondu par Glen or Glenda le 20 août 2013 à  15:21 :

      Sûrement pas, c’est Dupuis, ils font une intégrale Dupuis.
      Pour l’intégrale Docteur Poche ils n’ont pas mis les albums parus chez Casterman.

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      • Répondu par jpa le 21 août 2013 à  09:21 :

        une intégrale des "Docteur Poche" initialement parus chez Casterman devrait sortir chez Mosquito.

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        • Répondu le 21 août 2013 à  19:03 :

          Ce n’est pas très utile, ça ne rend pas hommage au talent de Wasterlain.

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