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Les Pieds-noirs à la mer - Par Fred Neidhardt - Marabulles

Par Didier Pasamonik (L’Agence BD) le 2 décembre 2013                      Lien  
"Il est raciste, il déteste les Arabes. Il n'aime pas les Noirs, les Juifs... Lui qui est marié à une Juive. Mais c'est quand même mon pépé. Je l'aime quand même." Cette accroche résume bien le beau livre de Fred Neidhardt qui nous rappelle, près de 60 ans après les faits, la difficile question de ces Français "rapatriés" d'Algérie après l'indépendance.

Nous sommes à Marseille, en 1985. La multiplication des crimes racistes suscite de fortes mobilisations, notamment impulsées par SOS Racisme. Le jeune Daniel, en rupture avec ses parents, vient se réfugier quelque temps chez ses grands-parents, des Français pieds-noirs ayant quitté l’Algérie quelque 23 ans auparavant.

Pour eux, ce combat antiraciste consiste à donner raison aux Arabes qui les ont chassés d’Algérie, cette terre où ils sont nés, comme leurs parents et les parents de leurs parents. Le "retour" en France a été vécu comme une tragédie. Ils entretiennent depuis une rancune aussi morbide que floue car ils détestent les Arabes mais sont de culture arabe. Le pépé tient volontiers des propos antisémites, mais il est marié à une Juive... Toutes ces communautés étaient imbriquées depuis longtemps mais les "événements" les ont obligés à "choisir leur camp".

Les Pieds-noirs à la mer - Par Fred Neidhardt - Marabulles
Les Pieds-noirs à la mer - Par Fred Neidhardt
(c) Marabulles

Impossible choix en vérité sans compter que leur arrivée en métropole n’était ni souhaitée, ni accompagnée. "Les pieds-noirs à la mer !" est un slogan des dockers marseillais de la CGT. le maire de Marseille de l’époque, Gaston Deferre, déclarant de son côté : "Qu’ils aillent se faire pendre ailleurs", à l’adresse de ces "rapatriés."

Aspirant dessinateur, en recherche de repères, voire de père, Daniel retrouve ses grands-parents avec plaisir mais est en quelque sorte troublé par leurs propos que l’on peut comprendre vu ce qu’ils ont vécu. Mais pour l’heure, ce qui déchire la famille, c’est une mésalliance entre un petit-fils et une "Arabe". Se sentant l’âme d’un conciliateur, Daniel veut recoller les morceaux de cette famille divisée, en écho avec son besoin de résoudre sa propre situation de rupture.

Les Pieds-noirs à la mer - Par Fred Neidhardt
(c) Marabulles

La trame complexe de cette fable révèle véritablement le travail de Fred Neidhardt (Pattes d’eph et col roulé, La Peur du rouge...) que l’on avait vite catalogué comme un aimable plaisantin (avec son copain Tarrin, il était un des artisans des impostures de l’Écho des Savanes). Il se révèle un narrateur doué et un dessinateur très juste.

Cette Marseille reconstituée avec ses animaux anthropomorphiques, mêlant souvenirs personnels et éléments de fiction, constitue un beau roman graphique, humain et extrêmement touchant, une publication marquante du tout jeune label Marabulles, filiale de Marabout (Groupe Hachette), préfacée par Joann Sfar.

Les Pieds-noirs à la mer - Par Fred Neidhardt
(c) Marabulles

(par Didier Pasamonik (L’Agence BD))

Cet article reste la propriété de son auteur et ne peut être reproduit sans son autorisation.

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10 Messages :
  • le racisme est du aux pieds noirs.
    3 décembre 2013 19:04, par cirta

    Drole de bouquin qui accuse les pieds noirs de racistes et l’auteur qui accuse les Français de raciste...
    On lui rappellera que les pieds noirs juifs et chrétiens etaient Français...
    Toutes les communautés du bassin mediterraneen fonctionnaient comme cela...Il y aussi des arabes racistes...La barriere se situe au niveau de la religion...
    Au xvviiième siecle,Alger et Setif etaient la plaque tournante de l’esclavage des chrétiens....
    Mais bien sur,le racisme c’est la faute des pieds noirs....c’est la thèse de l’auteur engagé à l’extreme gauche...
    Signé:un pied noir "accueilli" à Marseille le 18 octobre 1962.

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    • Répondu par Fred Boot le 4 décembre 2013 à  02:31 :

      Vous devriez lire l’interview en lien en bas de l’article, l’auteur critique aussi la presse de gauche de l’époque qui accusait les pieds-noirs d’être racistes.

      Concernant le contenu de sa BD, je ne peux juger ne l’ayant pas lue.

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    • Répondu par Un ami de Fred le 4 décembre 2013 à  19:33 :

      Je connais personnellement l’auteur et je peux vous assurer qu’il n’est pas du tout, mais alors pas du tout d’extrême gauche...

      Renseignez-vous avant de faire de telles allégations.

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    • Répondu par Ferrer le 13 janvier 2020 à  18:42 :

      Une bande dessinée qui discrédite les Français d’Algérie en les qualifiant de racistes et qui fait le "régal" de ceux qui les ont toujours détestés. Comment répliquer à cet auteur qui gagne de l’argent par cette publication sectaire, ironique et dépréciatrice. Il a pris ce titre à la suite de ce slogan des dockers qui accueillirent les Pieds-Noirs à Marseille par "Les Pieds-Noirs à la mer" et de Gaston Deferre " Qu’ils retournent d’où ils viennent". Est-ce que le racisme n’était pas du côté de ceux qui ont massacré les Pieds-Noirs et les Harkis en 1962 et qui en ont fait disparaître des milliers dont on ne sait toujours pas (secret d’Etat) ce qu’ils sont devenus. Faire de l’argent avec un tel titre et une telle position, est pour le moins ignominieux pour des gens qui ont beaucoup souffert et ont été très mal accueillis

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  • Les Pieds-noirs à la mer - Par Fred Neidhardt - Marabulles
    5 décembre 2013 11:10, par Oncle Francois

    Les Pieds-noirs ont été mal reçus en France au début des années soixante. Ils étaient partis s’établir en Algérie pour faire fortune, mais revenaient les mains vides et demandaient des aides. De plus, ils avaient mal compris sur le coup la fameuse phrase du général de Gaulle "Français, je vous ai compris". Mais il y a encore plus triste, c’est le sort réservé aux harkis qui s’étaient battus du coté des Français...et que l’on a très mal accueillis, lorsqu’ils ont voulu s’établir en France, puisqu’ils risquaient la mort en Algérie.

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    • Répondu par J-Jacques le 5 décembre 2013 à  14:37 :

      Vous revisitez l’histoire, les Pieds-noirs n’étaient pas partis en Algérie pour faire fortune. Quant aux harkis c’était les collabos des Français, logique qu’ils aient été très mal accueillis, dans ces années d’après guerre les collabos étaient mal vu.

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    • Répondu par Fred Neidhardt le 5 décembre 2013 à  17:33 :

      C’est un honneur pour moi d’être commenté par Oncle François. Depuis des années, je me régale de chacun de vos commentaires (ce n’est pas ironique).

      Pour en revenir aux Harkis, plus tragique que ceux qui ont été mal accueillis en France, ce sont les dizaines de milliers d’entre eux qui ont été abandonnés par la France et massacrés en Algérie.

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      • Répondu par Oncle Francois le 6 décembre 2013 à  11:11 :

        Bien d’accord avec vous sur les harkis, sacrifiés sur les deux rives de la Méditéranée. Mais le gouvernement français de l’époque porte une lourde responsabilité dans les deux cas.

        Pour dire le vrai, Monsieur Neidhardt, je n’ai pas encore vu votre livre en librairie, mais je pense me l’offrir, car outre le sujet qui m’intéresse, j’apprécie le traitement avec un dessin humoristique et léger d’un sujet grave. Il me semble que vous avez eu la bonne approche, et je vous en félicite.
        Bien cordialement

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    • Répondu par Ferrer le 13 janvier 2020 à  18:54 :

      En 1848, nombre de Français partirent en Algérie pour faire oeuvre de civilisation. Ils furent rejoints pas des Italiens, des Espagnols, des Allemands ; nombre d’entre eux moururent du paludisme, du typhus, des fièvres, dans la Mitidja, et des attaques de tribus. Ce pays était aux mains de maintes tribus et ne s’appelait pas l’Algérie. Il n’y a eu que 5 % de riches sur la totalité de la population des Français d’Algérie qui ont été obligés de quitter ce pays qu’ils ont embelli et enrichi de leurs oeuvres. De Gaulle les a trahis parce qu’il avait dit "L’Algérie française" et "Moi vivant, jamais le drapeau algérien ne flottera en Algérie." Ce fut une trahison perpétrée par De Gaulle. Les Pieds-Noirs auraient préféré rester dans ce pays qu’ils ont tant aimé et on voit ce qu’il est devenu après leur départ.

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  • Les Pieds-noirs à la mer - Par Fred Neidhardt - Marabulles
    5 décembre 2013 16:30, par Arcachon

    Parce que c’est une insulte d’être d’extrême gauche ? Et pas de souci, vu son travail on aura compris que l’ordre du monde ne dérange en rien ce dessinateur.

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