Voilà une dizaine d’année que le Louvre entretient un lien actif avec la bande dessinée. En invitant différents artistes à donner leur vision du Musée, en leur proposant de mettre en scène ce lieu fascinant. Ainsi, Nicolas de Crécy, Marc-Antoine Mathieu, Éric Liberge, Yslaire, Hirohiko Araki, Enki Bilal, Étienne Davodeau, David Prudhomme, Christian Durieux, Florent Chavouet ou encore Jirô Taniguchi participèrent au projet au fil des ans. Une exposition avait d’ailleurs été consacrée au premières parutions en 2009.
Ce sont aujourd’hui des noms moins connus chez nous qui investissent l’imaginaire du Louvre. Pourtant, côté Japon, les mangakas choisis jouissent déjà d’une certaine renommée. Daisuke Igarashi d’abord, à qui l’on doit Petite Forêt, Saru ou encore le très beau Les Enfants de la Mer. Mari Yamazaki ensuite, auteure de Thermae Romae ainsi que de PIL. Mais aussi Sin-ichi Sakamoto dont la série Innocent connait un certain succès. Et enfin Katsuya Terada, illustrateur et character designer, auteur d’un manga publié en France, Saiyukiden, et qui participa au recueil des Humanoïdes Associés Le Jour où ça bascule.
Les auteurs taïwanais constitueront dans doute davantage des découvertes, même si nous avons pu vous en présenter certains, comme Ah Tui / Push Comic présent à Angoulême en 2012, T.K. (alias Chang Shih-hsin) venu lui en 2014 ou Richard Metson, évoqué au cours d’un entretien avec un Aho Huang Jianhe, éditeur à Taïwan. D’autres font l’actualité chez nous, comme Chang Sheng, auteur d’Oldman, série dont nous rendons compte régulièrement.
Alors quel bilan une fois ces présentations effectuées ? Un ouvrage inégal qui vaut comme prétexte et occasion de surprise(s) mais auquel il manque une ou deux histoires réellement puissantes. Le format court invite davantage à la rêverie qu’au récit semble-t-il et l’on en reste surtout à l’évocation poétique voire lyrique. De jolies découvertes mais pas nécessairement des moments mémorables ou une saisie marquante du Louvre et de son univers.
Mais graphiquement l’éventail présenté vaut le détour par la diversité et la qualité de la production proposée. Vertu de l’anthologie, c’est un bonheur de voir tous ces artistes rassemblés, à l’œuvre dans ces pages. Et ce même si la plupart des auteurs demeurent au final strictement dans les registres qui sont les leurs.
D’autres en revanche font preuve d’engagement et s’écartent des sentiers battus. On pense là d’abord à Mari Yamazaki dont le Palmyre au Musée, en plus de s’inscrire dans une actualité brûlante, propose quelques planches à la puissance évocatoire certaine. On notera également la tentative audacieuse de Chang Sheng pour inscrire le Musée dans une intrigue de science-fiction assez improbable, plutôt périlleuse, entreprise dont il se sort très correctement.
Beau volume cartonné, Le Rêveurs du Louvre constitue une jolie curiosité qui ouvre complètement notre musée national vers la BD d’Asie, faisant une place à Taïwan aux côtés du Japon. Une riche initiative, dont on espère qu’elle débouchera par la venue en France de l’exposition qui circule actuellement, et jusqu’à septembre 2017, au Japon.
(par Aurélien Pigeat)
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Les Rêveurs du Louvre : Huit auteurs japonais et taïwanais revisitent le Louvre pour l’exposition Louvre 9. Collectif. Traduit du Japonais par Sylvain Chollet et du Chinois par Marie Laureillard. Futuropolis / Louvre éditions. Sortie le 28 novembre 2016. 200 pages. 25 euros.