Comme chaque jeudi, cours de sport, avec passage dans les vestiaires avant l’exercice. La prof vient d’annoncer l’événement : des locaux tout neufs pour se changer, un vrai luxe. Et de la torpeur de cette grande pièce, à peine éclaircie par l’ouverture du ventilateur, on ne sortira jamais. Comme une scène de théâtre, entre ces murs se jouent les conflits, pactes crapuleux, alliances et retournements entre ados. À qui sera le plus hardi, le plus obscène, le plus mâle, et pour les vaincus, le plus haï...
Timothé le Boucher, après son glaçant Skins Party, opère un virage stylistique qui rappelle beaucoup les métamorphoses de Bastien Vivès. Le trait est plus souple, moins précis, moins épais. Et les couleurs refusent la nuance. La froideur des joutes sociales entre gamins n’appelle pas de subtilité. À peine l’auteur use-t-il d’effets de flou pour mieux représenter les zones de l’action : intérieur/extérieur, prof/élèves, garçons/filles.
Dans une véritable trame dramatique traditionnelle, le petit gros du vestiaire va réussir à passer du bon côté. Et sa vengeance sera terrible. On pourra trouver le propos de l’auteur excessif ou trop stylisé, voire même considérer que ses dialogues manquent de langue "djeuns". Bémols minimes face à la tension qu’il soutient du début à la fin, au rythme des scènes et la précision de ses cadrages. Une sorte d’Entre les murs [1] BD qui serait passée du cours de français à la séance d’EPS.
(par David TAUGIS)
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