Alors que nous allons fêter les 65 ans de la création deBob Morane (et les cent ans de son créateur Henri Vernes !), jetons un œil sur les deux derniers recueils que le Lombard vient de publier concernant ce héros mythique.
Malheureusement, Bob n’est pas à la fête : le huitième tome de cette intégrale se compose d’un dossier toujours très pauvre (8 pages, y compris une page de titre). Le contenu, en interligne double, explore des sujets souvent connus, dans des encadrés très larges. Il traite principalement de M Ming, le grand ennemi de Bob Morane : Henri Vernes y livre entre autres le secret de son duplicateur. Le bilan demeure pauvre : une mise en page très légère, complétée de très peu de documents inédits, pour un dossier souvent incomplet. Dommage, lorsqu’on sait tous les documents qui existent, via les nombreuses et diverses publications, notamment celles des clubs de fans de Bob Morane existant de par le monde.
Le neuvième recueil est heureusement un peu plus engageant. Le premier intérêt réside dans le passage de témoin des dessinateurs William Vance à Felicisimo Coria, ce dernier étant le beau-frère du premier. Plus intéressant, ce dossier se focalise sur le centième roman de Bob Morane, Commando Épouvante, et le battage de presse dont il fut l’objet. En répondant aux questions de journalistes de l’époque, Vernes expliquait les sources de son inspiration. Le dossier revient également sur un étonnant ouvrage : un petit dictionnaire des personnages des 100 premières aventures de Bob Morane. Vernes y livre également quelque secrets, à commencer par le moment où il a imaginé l’Ombre jaune ; tout simplement parce qu’il lui fallait un méchant pour combattre Bob Morane au bout des trente-trois premières aventures !
Benoît Brisefer : la révélation
Si l’on avait que les intégrales de Bob Morane à se mettre sous la dent, on pourrait croire que l’intérêt du Lombard n’est pas porté sur le patrimoine. Ces nouvelles éditions comportent des dossiers souvent moins denses et moins intéressants que ceux publiés dans leur première version, vingt ans auparavant… Ce serait un bilan biaisé, car l’éditeur de l’avenue Paul-Henri Spaak est également capable du meilleur dans ce domaine.
La démonstration la plus éclatante est probablement ce troisième opus de l’intégrale de Benoît Brisefer, paru en mars dernier, le recueil le plus intéressant de cette année pour qui s’intéresse à l’histoire de la bande dessinée !
Conçu de main de maître par le talentueux Patrick Gaumer, le recueil ne se limite pas à revenir sur Le Fétiche, le septième tome de la série, et de présenter en détail son dessinateur : Albert Blestau. Gaumer retrace en effet toute l’histoire de Peyo, que cela soit bien entendu tout ce qui concerne le jeune héros très-très-fort, mais également les autres grands moments qui jalonnent la vie du créateur des Schtroumpfs et de son atelier.
Dans celui-ci, (Wasterlain, Walthéry, JC de la Royère, et les autres), sans oublier tous ceux qui permirent de prolonger d’une façon ou l’autre Benoît Brisefer : Jean-Claude Fournier, Benn, Yvan Delporte, etc. Sans oublier oublier bien entendu Albert Blesteau qui reprit le dessin de Benoît durant cette période. Gaumer est même parvenu à aller réaliser une interview de cet auteur disparu des radars depuis lors.
Vraiment, PatrickGaumer peut se permettre de revendiquer une A.O.C. (Appelation d’Origine Contrôlée) tant son « intégrale » épuise tout ce qui touche à son sujet. Ainsi évoque-t-il les reprises avortées, les publicités réalisés, les diverses collaborations et associations : captivant !
Le dossier s’étend donc tout au long des 222 pages du recueil, dont près de 160 pages comportent des informations inconnues du grand public ! Chaque extrait rare ou série est donc contextualisé par une introduction aussi complète que passionnante. Outre le court-récit Pas de Joie pour Noël, le recueil reprend également un récit de 14 pages que Peyo & Blesteau réalisèrent aussi pour Benco, ainsi que les publicités associées.
« Apparition » de Pierrot et la lampe
Là où le Lombard peut revendiquer son aspect patrimonial, c’est dans la place allouée à l’une des séries les plus méconnues de l’auteur : Pierrot et la lampe. La magie dispensée par le petit génie maladroit qui habite la lampe trouvée par Pierrot, ainsi que le cadre dans lequel ils évoluent, rappellent tout le charme de Benoît Brisefer. ce qui confère une légitimité à sa présence dans ce recueil.
Cette intégrale se révèle exhaustive, car elle reprend toutes les versions publiés du jeune héros, depuis les premiers essais réalisés par Peyo en 1959, jusqu’aux 76 planches parues dans le magazine Schtroumpf entre 1989 et 1992. Parfois publiées à raison de 4 planches par page pour éviter les redites, les différentes versions de ces histoires permettent au lecteur de comparer les différents apports, dont Yvan Delporte est souvent l’un des artisans. Cerise sur le gâteau : les formules magiques du petit génie sont tout simplement désopilantes. Du Peyo pur jus, qu’on redécouvre avec un plaisir infini. Bravo au Lombard !
L’arrivée de Pascal Garray
Le quatrième tome de cette intégrale vient de paraître ce 17 août et reprend un contenu plus traditionnel après les surprises du précédent. Quatre albums de Benoît y sont regroupés : Hold-up sur pellicule, L’Île de la Désunion, La Route du Sud et Le Secret d’Églantine.
De famille, il est une nouvelle fois question avec l’implication progressive de Véronique Culliford, la fille de Peyo, et de son fils Thierry qui va prendre scénaristiquement en main la destinée de Benoît Brisefer avec Pascal Garray au dessin.
Gaumer revient notamment sur l’implication de Vincent Dugomier qui co-signe le scénario d’Hold-up sur pellicule. Ce premier scénario est tout d’abord supervisé par Peyo. Le dossier présente d’ailleurs d’intéressants documents de la main-même du maître. Malheureusement, Peyo décède en 1992, alors qu’il vient de signer un nouveau partenariat avec Le Lombard. Ces éléments vont bien entendu bouleverser tous les proches de l’artiste, et les récits en cours.
Mais Peyo voulait que ses héros lui survivent, et tout le monde se remet au travail. Bien entendu, une large part de ce dossier est consacré au regretté Pascal Garray, qui fut de loin le meilleur artisan à la prolongation des aventures de Benoît Brisefer. Témoignages, crayonnés et autres documents éclairent le travail de ce dessinateur trop tôt disparu.
Comme on peut le voir, Le Lombard traite avec une implication très variable les deux incontournables héros de son catalogue. Mais dans le match qui oppose l’Aventurier au garçonnet de Peyo, c’est clairement à nos yeux le petit Benoît qui est le plus fort, même lorsqu’il est enrhumé !
(par Charles-Louis Detournay)
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Lire aussi notre article : Décès de Pascal Garray, dessinateur de Benoît Brisefer et des Schtroumpfs
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