Votre collaboration avec Éric Corbeyran sur "Back World"est-il un mariage d’éditeur ?
Non. C’est avant tout un mariage d’amis ! Nous nous connaissons depuis longtemps. J’ai eu envie de changer d’univers et j’ai songé instinctivement à Éric. Je connaissais son travail qui est fort imprégné de notre réalité. Je l’ai appelé pour voir s’il souhaitait m’écrire une histoire. Il était heureux de cette proposition ! C’était la première fois qu’un dessinateur ayant un peu de bouteille lui demandait de collaborer avec lui. Cette conversation était fort émouvante !
J’ai rapidement parlé avec Éric des jeux-vidéo et des mondes virtuels. Il avait des choses à dire sur cette thématique. La série était lancée…
Pourquoi ce sujet ?
À une époque, j’ai été très branché par les jeux-vidéo. J’ai toujours été fasciné par ces univers-là. Je savais que Corbeyran allait apporter une vraie réflexion sur cette thématique sans tomber dans une histoire facile.
Quel est sa spécificité par rapport aux autres auteurs avec lesquels vous avez travaillés ?
Pierre Dubois me remettait un synopsis élaboré pour les albums du Tortre. Je m’occupais du découpage. Après, j’ai travaillé avec Jean Dufaux (Ombres) et Frank Giroud (Le Décalogue). Ils pensent leurs histoires en fonction du découpage et me la livraient par tranche d’une douzaine de planches. Éric Corbeyran (Back World), lui, travaille sur l’intégralité de l’album en une fois. Je reçois donc les quarante-six planches d’un coup ! Il me laisse une grande liberté et je donne le meilleur de moi-même dans le graphisme et la mise en page.
La plupart de vos séries sont teintées de fantastique.
J’apprécie le fantastique ! Le Tortre, ma première série avec Pierre Dubois, était une histoire moyenâgeuse, où le fantastique était suggéré ! On y voyait des monstres qui étaient en réalité des êtres humains abimés et torturés par d’autres personnes ! Nous étions dans le flou et on a caché le fantastique. Le monde réel contient tellement de fantastique que l’on peut en parler sans utiliser d’artifice. Avec Ombres, Jean Dufaux et moi-même, restions dans des ambiances suggérées.
D’une manière générale, vous semblez plus porté sur les couleurs sombres.
Je travaille avec Jean-Jacques Chagnaud depuis la fin des années 1980. Il sait interpréter mon style qui a ses qualités et ses défauts. Il apporte une palette chromatique tout à fait adaptée. Je lui donne des indications de temps en temps sur les ambiances et les couleurs que j’apprécie. Il me connaît tellement que je ne me fais pas de souci. Je vais vous surprendre : il m’est arrivé de ne voir le résultat de son travail que quand j’avais l’album entre les mains. C’était avant qu’il ne passe à la mise en couleur via l’outil informatique bien sûr… Mais nous étions parfois tellement en retard que je n’avais pas le temps d’avaliser le dernier tiers de l’album. J’ai une confiance totale en lui.
Terry, le personnage principal de Back World est très ambigu …
Tout à fait ! Il déteste le monde réel, dans lequel il vit. Les univers virtuels le fascinent tellement que cela insupporte sa copine. Dans le deuxième album, il est confronté au créateur du jeu « Back World ». On sent que la connivence entre les deux hommes dérape. Terry a besoin de ce jeu pour s’échapper, et l’homme d’affaires veut s’en servir pour créer un monde nouveau dépassant la réalité. Un décalage va se créer.
Cette histoire va être développée en trois albums ?
Oui. Le cycle court est préférable pour le public et les auteurs. Le public est certain d’avoir une fin à l’histoire. Les auteurs, eux, on la possibilité de rebondir si le sujet et le succès de la série le permettent.
Vous allez prochainement signer un album du « Voyageur », scénarisé par Pierre Boisserie et Eric Stalner…
Effectivement. Sur un album se déroulant dans le passé. Pierre Boisserie et Éric Stalner sont des amis. J’ai trouvé ce projet ambitieux et intriguant. Ce one shot intègre une aventure commune. La thématique, avec ses paradoxes temporels, est ambitieuse. Les albums sur le cycle du « futur » sont tous parus. Marc Bourgne dessine actuellement le cycle du « présent » et je dessinerai l’un des albums du cycle du passé.
(par Nicolas Anspach)
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Lucien Rollin sur Actuabd.com, c’est aussi les chroniques de :
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Photo (c) Laurent Mélikian
Illustrations (c) Rollin, Corbeyran & Glénat
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