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Marché de la BD 2012 : les vraies raisons d’un marasme

Par Didier Pasamonik (L’Agence BD) le 27 décembre 2012                      Lien  
Le marché de la bande dessinée en France vit ce paradoxe : Comme l'indique le Rapport Ratier de l'ACBD pour 2012 (voir en annexe), jamais sa production n'a été aussi riche et dynamique ; jamais non plus sa situation n'a été aussi difficile, son chiffre d'affaire reposant pour l'essentiel sur la librairie qui montre à son tour des signes d'essoufflement.

Le Rapport Ratier qui, depuis 1999, produit chaque année pour l’ACBD une intéressante comptabilité des titres de bande dessinée publiés dans l’espace francophone européen n’arrive pas, depuis plusieurs années déjà, à cerner ce qu’il appelle "un contexte difficile et morose" tantôt dû selon les observateurs à une "crise" aux contours indéfinis, tantôt à une "surproduction" coupable de tous les maux.

Pourtant, c’est officiel, près de 38 millions d’albums sont vendus en France avec un chiffre d’affaire relativement stable d’une année à l’autre, soit environ 416 millions d’euros en 2011 [1] sans qu’un écroulement du chiffre d’affaires soit perceptible. Mieux : selon Livres-Hebdo, cité par le Rapport Ratier, la progression du chiffre d’affaires de la BD en France est de +0,5% à fin septembre 2012, la revue professionnelle n’envisageant pas une descente vertigineuse des ventes pour le dernier trimestre.

Il n’y a donc pas de "crise", le fléchissement des titres leaders -qui est une réalité- étant compensé, semble-t-il, par un dynamisme de la production (la fameuse "surproduction") qui se traduit par une segmentation plus poussée qu’avant, une recherche active de nouveaux lectorats et de nouveaux segments de marché (ces "niches" marketing que visent les éditeurs), une meilleure rentabilisation des fonds (rééditions de classiques, intégrales, nouvelles éditions...), un nombre accru de traductions (mangas et comics), d’opérations dans les kiosques ou en Vente par correspondance, et un opportunisme de chaque instant pour vendre du livre.

Marché de la BD 2012 : les vraies raisons d'un marasme
La production de la BD francophone est encore en augmentation en 2012, chacun des segments de marché progressant de façon modérée et constante
Infographie (c) L’Agence BD d’après les chiffres de Gilles Ratier/ACBD.

En clair, éditeurs et auteurs ont apparemment depuis 17 ans, depuis que Gilles Ratier observe le marché, tout en faisant progresser la production des nouveautés en nombre de titres, une réponse adaptée aux équations compliquées que présente ce marché.

Mais quelles sont-elles ?

Crise de la grande distribution

Le rapport Ratier le montre : la mise en place du dernier Titeuf (un million d’exemplaires) a été de moitié moindre par rapport au précédent titre de la collection [2] Est-ce parce que le dernier Titeuf a démérité ? Non pas. Son absence de la TV peut être une partie de l’explication, mais les entretiens que nous avons eus avec les diffuseurs et certains éditeurs montrent une autre réalité.

Les principales difficultés du marché de la BD sont exogènes à son fonctionnement. Elles portent essentiellement sur les difficultés du secteur de la grande distribution où la bande dessinée, depuis le milieu des années 1960, trouvait ses principaux secteurs de consolidation. Prenons conscience que lorsqu’un album vend plus de 100 000 exemplaires, l’essentiel de son chiffre est fait dans ces grandes surfaces : hypermarchés (entre 1500 et 2500 m²), supermarchés (entre 400 et 1500 m²) et supérettes (entre 100 et 400 m²) . Il y a environ 800 hypermarchés et 12 000 supermarchés qui diffusent du livre en France.

Or, ce secteur vit ces dernières années une profonde mutation dommageable à la diffusion du livre : les ventes des hypermarchés et supermarchés, souvent situés en périphéries des grandes villes, ont fortement chuté au profit des supérettes de proximité dans les zones urbaines et suburbaines, rebaptisées Citymarket. Supermarchés et supérettes offrent un choix de produits limité à rotation rapide qui font traditionnellement peu de place au livre. Ce qui veut dire que les linéaires dédiés à la bande dessinée, et plus généralement à la culture, se sont dramatiquement réduits ces dernières années dans plusieurs lieux de passage massif de clientèle, surtout parce que ces gros vendeurs ont fait le constat d’un transfert de la consommation de la musique et des films sur les supports numériques.

Par ailleurs, les réglementations de plus en plus contraignantes du secteur [3] poussent la grande distribution à se désintéresser des petits producteurs pour ne plus négocier qu’avec un nombre limité de coopératives et de distributeurs qui, individuellement, gèrent la quasi globalité de l’offre du livre en grande surface et qui, économiquement, pèsent plus lourds que les plus importants groupes d’édition de la place.

Media-Participations reste le leader du marché, mais le groupe devrait sensiblement contenir sa production dans les prochaines années.

Les tout-petits points de vente qui diffusent de la BD occasionnellement passent également par ces distributeurs, les kiosques faisant l’objet d’une négociation spécifique souvent elle-aussi gérée par ces distributeurs.

D’où la tendance au regroupement et à la concentration chez les plus grands acteurs (Media-Participations achetant successivement Le Lombard, Dargaud puis Dupuis ; Glénat rachetant les fonds Vents d’Ouest puis Albin Michel ; Gallimard rachetant Futuropolis puis Flammarion-Casterman ; Delcourt absorbant Tonkam puis Soleil.) afin d’avoir une chance de négocier avec ces mastodontes (Carrefour pèse en 2010, près de 98 milliards d’euros de chiffre d’affaires contre un peu plus de 400 millions d’euros en France en 2010 pour la totalité des éditeurs de bande dessinée, tous réseaux confondus.)

Par voie de conséquence, seule une poignée de titres gardent une place en grande distribution. Ce sont en général des best-sellers "grand public" implantés depuis très longtemps (Astérix, Tintin, Titeuf, Lucky Luke...) En clair, si l’on en croit les distributeurs, ce marché suiveur qui ne diffuse que des titres qui sont déjà des best-sellers avérés dans les autres circuits de vente, a réduit ses linéaires pour n’y exposer que les plus gros vendeurs (pour faire simple, les tirages supérieurs à 100 000 exemplaires) et la tendance n’est pas à l’exploration de nouveaux personnages, mais plutôt à en écarter les prétendants, à savoir les titres qui vendent entre 50 et 100.000 exemplaires.

4109 "vraies nouveautés" ont été produites en 2012, dont 2122 bandes dessinées, 1621 mangas et 366 comics. La bande dessinée sous licence étrangère constitue désormais 54% des nouveautés.

Une pression inédite sur le "Premier niveau"

La librairie, de son côté, n’est pas bien moins lotie. Le "Premier niveau" qui compte environ 1300 points de vente en France est souvent géré en direct par les "gros" éditeurs qui disposent de leur propre force de vente (Média-Participations, Glénat, Delcourt-Soleil...). Dans celui-ci, on distingue moins de 300 points de vente spécialisés en BD. Or, ce secteur subit une pression commerciale en tenaille d’une part et une pression financière structurelle d’autre part.

Pourquoi en tenaille ? Parce que ces dernières années, les petits éditeurs se sont multipliés (326 éditeurs en 2012, selon le Rapport Ratier). C’est la conséquence, selon nous positive, du succès des "romans graphiques" qui a élargi la visibilité de la bande dessinée dans les librairies générales, et de la démocratisation de l’édition grâce à une baisse conséquente des coûts de production (les tirages peuvent être ajustés quasi à la demande) et à une augmentation des opportunités de publication (grâce aux initiatives dans la bande dessinée numérique ou au Crowdfunding par exemple). Les chiffres de Ratier montrent qu’une grande part de la "surproduction" vient d’une augmentation de l’offre chez ces acteurs.

L’autre pression commerciale vient d’en haut. Car où vont les titres chassés des grandes surfaces qui font moins de 100 000 ex de vente ? Ils reviennent au premier niveau, avec la légitimité et la puissance de feu de titres qui vendent entre 50 000 et 100 000. D’où la difficulté des éditeurs "plus jeunes" qui s’étaient faits une place précisément sur ce segment de marché, par exemple Soleil et Delcourt, mais aussi Glénat et une grosse part du catalogue de Média-Participations (Aire Libre ou Poisson Pilote, par exemple) qui établissent leur rentabilité sur une multitude de titres vendant 20 000 et 50 000 exemplaires, rentables puisque le seuil de rentabilité d’un album de BD classique se situe de nos jours entre 8 000 et 12 000 exemplaires, mais de plus en plus nombreux car il faut rattraper sur ce secteur le chiffre d’affaires perdu ailleurs.

Comme au foot, le destin du match dépend des milieux de terrain.

Les récentes fusions, comme le rachat de Flammarion-Casterman par Gallimard cette année aboutissent à une forte polarisation entre "gros" éditeurs et éditeurs indépendants ou alternatifs.

Loyers "trop coûteux"

À cela s’ajoute une difficulté structurelle : l’augmentation des loyers dans les centres-villes qui écarte les points de vente aux marges trop étriquées. Ainsi, le groupe de librairies Album qui a compté à un moment près de 25 points de vente a dû réduire la voilure, comme cela a été le cas à Toulouse, ses échoppes se transformant en boutiques de décoration-cadeau dont les pratiques commerciales sont moins réglementées que dans le secteur du livre. Le groupe compte aujourd’hui 13 points de vente dont 8 franchisés.

Cette tendance affecte des chaînes comme les FNAC, Virgin,... pour les mêmes raisons. Ainsi, a-t-on appris par une dépêche AFP du 20 décembre, juste avant Noël, que Virgin allait quitter les Champs-Élysées, "le contrat de location étant devenu trop coûteux."

On peut en outre évoquer la croissance des librairies de vente en ligne comme Amazon ou Fnac.com qui dépassent désormais les 10% du marché du livre en France [4] mettant à mal certaines dispositions non bordées de la Loi Lang.

Une réduction de la production attendue chez les gros éditeurs

Face à ce marasme, les éditeurs se ré-assurent : en privilégiant les marques fortes et établies, d’où les efforts de Média-Participations ces dernières années sur les nouveautés Spirou, Blake & Mortimer, Lucky Luke, la multiplication des spin-offs XIII, Thorgal et autres, tandis que le fonds, amorti depuis des années, est réinvesti sur le marché sous la forme de luxueuses intégrales qui captent le pouvoir d’achat des seniors.

D’où aussi, de la part des éditeurs, une pression sur les auteurs afin de réduire autant que possible le seuil de rentabilité de leurs titres (le tirage moyen du livre en France est d’un peu plus de 8000 exemplaires au titre [5]).

Comme, par ailleurs, le chômage des artistes n’a jamais été aussi important (en raison de nouveaux arrivants venant chaque année des écoles de BD, mais aussi, à cause de la mondialisation : des licences étrangères vendeuses et de haute qualité : traductions (dont plus de 1621 mangas et 366 comics en 2012, lesquelles passent le seuil des 54% de la production française en 2012, selon Ratier) mais aussi offre directe des auteurs italiens et chinois par exemple. Imaginez qu’il y a une vingtaine d’année, près de 2000 nouveaux titres venus d’Asie ou des États-Unis n’existaient pas sur ce marché.

326 éditeurs (contre 311 l’année dernière), et 1951 auteurs ont publié des BD cette année. Selon Gilles Ratier, 1510 auteurs vivent de la BD, même chichement.

Certains opérateurs devraient réduire la voilure pour tenter de faire baisser la pression sur les libraires. Pression qui se traduit par une trésorerie davantage sollicitée qu’avant et surtout une manutention bien plus importante que naguère. Voilà pourquoi, en dépit d’une offre cette année encore plus abondante, comme l’indique le Rapport Ratier, et dont la richesse fait envie au monde entier, le métier de libraire est devenu difficile.

Et surtout d’une plus grande technicité. Fini les libraires "à l’ancienne" tels que caricaturés par la BD de Salma & Libon, (Animal Lecteur, Ed. Dupuis) : il faut être capable de "gérer" la clientèle avec un logiciel informatique adapté, identifier finement ses attentes, et se mettre en position pour bien négocier avec les éditeurs-fournisseurs, tout en faisant des choix drastiques. D’où la constitution d’associations de libraires offrant bonus et solutions originales, comme ces "cafés-BD" qui ont le vent en poupe, ou ces librairies ultra-spécialisées dans l’édition alternative et le graphisme qui proposent davantage qu’un choix de livres : une consommation identitaire et un lieu de vie.

Cette situation n’est pas forcément négative. Elle oblige les différents acteurs de la bande dessinée (libraires, éditeurs, auteurs, du moins ceux qui "font" les gros chiffres...) à trouver des solutions innovantes pour permettre aux nouvelles créations d’exister. De ces solutions dépend sans aucun doute l’avenir de la BD en France.

Le Rapport Ratier - ACBD (En PDF)

(par Didier Pasamonik (L’Agence BD))

Cet article reste la propriété de son auteur et ne peut être reproduit sans son autorisation.

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Photos : D. Pasamonik (L’Agence BD)

[1GfK, Marché de la BD en France, janvier 2012.

[2On sait que ces chiffres sont déclaratifs, les éditeurs annonçant ce qu’ils veulent, mais d’une année sur l’autre, le retour du marché, notamment les remontées des instituts de sondage Ipsos-Livres Hebdo ou GfK, corrigent les fausses déclarations. Ils reste que ces chiffres marquent une tendance, pas forcément une réalité.

[3La Loi Galland de 1997 protégeant les petits fournisseurs contre la position dominante des grandes surfaces en réglementant ristournes, rabais et marges arrières, modifiés par les Lois Jacob-Dutreil de 2006 et la Loi Chatel de 2008, mais aussi, plus fondamentalement, la Loi Lang de 1981 sur le Prix unique du livre.

[4Chiffres clé du marché du livre, Centre National des lettres, 2009

[5Chiffres clé du marché du livre, idem.

 
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61 Messages :
  • Marché de la BD 2012 : les vraies raisons d’un marasme
    27 décembre 2012 10:39, par Denis Lapiere

    Quand entre 2000 et 2012 le marché de la nouveauté en bande dessinnée passe d’une offre de 1000 titres à 4000 titres sans que la chiffre global de vente n’augmente (il parait même qu’il diminue) et que le chiffre d’affaire global ne fait que suivre l’inflation, c’est que la rentabilité par titre est en moyenne divisée par 4 !
    Il y a donc bel et bien un crise. Il faut appeler un chat, un chat.
    Quand un éditeur voit sa rentabilité défaillir aussi fortement sur le marché, il cherche imédiatement à la retrouver en taillant dans ses frais de fonctionnement : en premier lieu la rémunération des auteurs.
    La crise, ce sont les auteurs qui la subissent. Et cruellement.

    Quand le nombre de nouveauté passe de 1000 à 4000 sans que le nombre de point de ventes n’augmente (il parait même qu’il diminue) et sans que la surface des tables des nouveautés dans ces points de vente n’augmente elle aussi, la visibilité générale des titres est en moyenne divisée par 4. Le lecteur potentiel a donc quatre fois moins de possibilité de trouver la bande dessinée qu’il aime. Elle se trouvera le plus souvent déjà rangée en rayon (selon des classements la plupart du temps abscons) ou déjà en carton pour retour à l’éditeur. Sans un libraire efficace pour le renseigner (il y en a encore à la Fnac ? dans les Virgin ? Y en a-t-il jamais eu dans les hypers et supers ?), le lecteur moyen passe de plus en plus à côté des titres qui lui conviendraient. Malgré une offre multipliée dans la qualité, il n’y a jamais eu autant d’excellentes bandes dessinées qu’actuellement, on vend moins de bandes dessinées aujourd’hui qu’il y a dix ans et ce alors que le secteur ne subit aucune pression du numérique, le piratage est annecdotique à côté de ce que subissent l’industrie du disque et du DVD. Il y a donc bel et bien une crise !

    Les "gros éditeurs", Delcourt, Média et Glénat en tête se sont lancé dans une course à la production pour occuper le marché, sans se demander si ce dernier allait pouvoir la digérer. Conséquence, ils se trouvent tous face à une crise… de la diffusion.
    L’ensemble des diffuseurs de bande dessinée et des points de vente sont tout simplement incapables de prendre en charge les 4000 nouveautés qui leur sont proposées. L’inflation des auteurs, des éditeurs et des titres n’a pas été suivie d’une inflation de points de vente ni en quantité, ni en qualité. Le marketing en BD est tragiquement resté le même depuis dix ans, l’offre de BD numérique se révèle un flop magistral et un gouffre financier, on ne parle toujours pas de bande dessinée dans les médias nationaux réellement prescripteurs (télé, radio, journaux) et quand c’est miraculeusement le cas, cela sert d’abord à monter un style de narration (le roman graphique) contre un autre (la BD franco-belge) et inversément. Il n’y a toujours pas, comme en littérature, en musique ou au cinéma, un prix qui permette une véritable popularisation d’un auteur ou d’un titre chaque année.
    Le monde de la bande dessinée est réellement au cœur d’une crise de croissance. L’ensemble des éditeurs, en sur-éditant ce que le marché peut absorber sans donner à ce même marché les moyens de s’étendre et de prendre une place plus importante dans l’économie et le monde culturel sont occupé à scier la branche sur laquelle ils sont assis.
    La grenouille qui voulait se faire aussi grosse que le bœuf ? Elle est là la crise.

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    • Répondu par philippe wurm le 27 décembre 2012 à  12:41 :

      Toujours l’analyse en "fausse crise" de Didier Pasamonik ! ...Et l’aveuglement sur la situation dramatique des auteurs (francophones) ! L’auteur Denis Lapière est beaucoup plus près de cette réalité et je souscris à son analyse.
      Il faut ne pas oublier que sans auteurs (francophones) nous laissons notre bande dessinée (et cette part de la culture) s’écrouler ; ou alors nous la livrons aux mains des autres pays exportateurs (avec leur culture). Pourquoi avoir créé et défendu une production propre depuis l’après guerre si c’est pour l’abandonner maintenant aux lois du marché international ?

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      • Répondu par Kane le 27 décembre 2012 à  15:43 :

        L’aveuglement sur la situation dramatique des auteurs n’est pas que du fait d’actua-BD, TOUS les autres sites spécialisés sont bien muets aussi. (??)
        Seul peut être BD-Gest a un topic géant sur la crise, avec beaucoup d’auteurs intervenant inside et de nombreuses explications et exemples,
        Il n’y a donc que là bas qu’on peut lire et sentir la vraie crise et ses répercussions chez les auteurs.

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      • Répondu par Didier Pasamonik (L’Agence BD) le 31 décembre 2012 à  14:48 :

        Cher Philippe, je te renvoie un peu perfidement la question. De quoi vivent les auteurs ? Pour la plupart de ceux dont Ratier dit qu’ils "vivent de la BD", il y a un abus de langage : la bande dessinée n’est pas leur principal revenu. Ai-je tort, cher Philippe ?

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        • Répondu le 2 janvier 2013 à  20:11 :

          Non, tu n’as pas tort ! Je sais aussi que tu as plusieurs activités, cher Didier.
          Mais pourquoi faut-il pratiquer un autre métier (même si celui-ci est très intéressant) pour pouvoir faire de la bande dessinée ? Cela veut dire que nous finançons les éditeurs pour les aider à produire nos livres !?! On ne demande pas aux ingénieurs de chez Renault de faire un autre métier et de concevoir les voitures sur le reste de leur temps libre. La conception d’un livre vaut-elle moins que celle (par exemple) d’une voiture ? Cela veut aussi dire que le temps dévolu à la création, la réflexion, la recherche, doit être volé sur le "temps utile" de la production (qui est double puisqu’il y a double activité), après il ne faut pas s’étonner que la production bande dessinée de notre époque nous laisse trop souvent sur notre faim (alors qu’il y a un beau potentiel chez beaucoup d’auteurs).

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          • Répondu par Didier Pasamonik (L’Agence BD) le 2 janvier 2013 à  22:07 :

            Mais pourquoi faut-il pratiquer un autre métier (même si celui-ci est très intéressant) pour pouvoir faire de la bande dessinée ?

            Il n’est pas déshonorant d’entretenir une passion avec un boulot alimentaire. Marguerite Duras a longtemps vendu 2000 ex à la nouveauté avant d’en vendre des millions. Beaucoup de professionnels ont eu des carrières composites avant de pouvoir se consacrer à leur œuvre. Jean Van Hamme a vécu quelques temps aux crochets de son épouse avant de rencontrer le succès. Il pèse aujourd’hui une bonne partie du chiffre d’affaire de la BD hexagonale.

            Cela veut dire que nous finançons les éditeurs pour les aider à produire nos livres !?!

            Il arrive souvent que ce soit le contraire, non ?

            On ne demande pas aux ingénieurs de chez Renault de faire un autre métier et de concevoir les voitures sur le reste de leur temps libre. La conception d’un livre vaut-elle moins que celle (par exemple) d’une voiture ?

            Le commerce et la réparation d’automobiles et de motos génèrent un chiffre d’affaires annuel de 137 milliards d’euros (source : CCFA/Insee, 2011) ; la BD : 418 millions d’euros. Comparons ce qui est comparable.

            418 millions d’euros. Si la part des droits est de 20% = 80 millions à répartir sur 1500 auteurs qui vivent de la BD. Le problème, ce n’est pas la masse, c’est la forte disparité des ventes : 80% des ventes profitent à 20% des auteurs, soit à 300 personnes.

            Cela veut aussi dire que le temps dévolu à la création, la réflexion, la recherche, doit être volé sur le "temps utile" de la production (qui est double puisqu’il y a double activité),

            Cela dépend du délai que l’on se donne pour la production. Certains ouvrages mettent des années à se faire publier. Certains auteurs ont l’air de "surproduire" mais parfois les projets qu’ils publient sont dans leurs cartons depuis 10 ans !

            après il ne faut pas s’étonner que la production bande dessinée de notre époque nous laisse trop souvent sur notre faim (alors qu’il y a un beau potentiel chez beaucoup d’auteurs).

            Même Denis Lapière est d’accord pour dire que jamais l’offre n’ a été aussi qualitative.

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            • Répondu le 3 janvier 2013 à  14:08 :

              Un barrage de réponses fumantes de Didier Pasamonik ! Avec, comme souvent, pour mettre de l’huile sur le feu, des contre-arguments basés sur des exemples en trompe-l’oeil (l’arbre qui cache la forêt ! La forêt qui fourni le bois des planches et la pâte à papier pour alimenter le feu- roulant du marché ?!?...). L’exemple Van Hamme est archi-connu, j’attendais aussi l’exemple Trondheim (comme ça on a tout le spectre, du "Commercial jusqu’à Auteur"), mais ce sont bien les exceptions qui confirment la règle, celle de la pauvreté longue durée des auteurs (d’où l’obligation, longue durée, d’une autre activité pour co-financer les livres avec les éditeurs !). Pourquoi les éditeurs (et leurs employés) des 10 principales maisons d’édition n’ont-ils pas, dans 90% des cas une autre activité pour pouvoir faire leur boulot d’éditeur dans leur temps libre ?
              Alors que c’est le cas de 90% des auteurs qui travaillent pour ces mêmes maisons ? Pourquoi les autres employés des grandes entreprises de la chaine du livre (imprimerie, diffusion, distribution, grande librairie...)ont-ils un travail sous statut et protection sociale alors qu’ils vivent de la production de notre travail ? Je sais qu’il y a toujours des contre-exemples sous forme d’exception, mais c’est le courant général d’une profession qui m’intéresse, celui qui crée et participe au tissu d’une culture, la fait se maintenir et exister sous pleins de formes et lui donne une incomparable richesse. Que serait le cinéma Français avec les 17 "Depardieu vedettse" et les 7 Dany Boon comme metteur en scène, au milieu d’un désert ? Cher Didier je te propose un petit slogan : "Le désert pour les auteurs, le dessert pour les autres acteurs du métier du livre" !

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              • Répondu par Didier Pasamonik (L’Agence BD) le 3 janvier 2013 à  15:15 :

                Pourquoi les éditeurs (et leurs employés) des 10 principales maisons d’édition n’ont-ils pas, dans 90% des cas une autre activité pour pouvoir faire leur boulot d’éditeur dans leur temps libre ? Alors que c’est le cas de 90% des auteurs qui travaillent pour ces mêmes maisons ?

                Ne mélangez pas tout : les employés des éditeurs ont un boulot, eux. Si la boîte perd de l’argent, ils seront les premiers à être débauchés. Et retrouver du boulot dans l’édition n’étant pas une chose facile, ils vont devoir trouver du travail ailleurs. Ne méprisez pas leur situation sous le prétexte que la vôtre est (supposément) précaire.

                Pourquoi les autres employés des grandes entreprises de la chaine du livre (imprimerie, diffusion, distribution, grande librairie...)ont-ils un travail sous statut et protection sociale alors qu’ils vivent de la production de notre travail ?

                Vous êtes en plein délire, là. Si vous ne pouvez pas vivre de votre travail, pourquoi vivraient-ils du vôtre ? Vos méventes font leurs pertes et leur précarité.

                Ils ne sont pas non plus responsables de l’incapacité d’une profession de conserver les avantages acquis par leurs aînés.

                Les auteurs de BD, comme beaucoup d’indépendants, artisans, petits entrepreneurs, ne sont pas salariés. C’est un problème de société. Pour obtenir ce que vous voulez, il faut un état collectiviste. Mais même les Chinois et les Russes en reviennent, semble-t-il.

                Cher Didier je te propose un petit slogan : "Le désert pour les auteurs, le dessert pour les autres acteurs du métier du livre"

                Cher mec qui me tutoie comme si on avait gardé les vaches ensemble, le discours doloriste à propos des auteurs cache aussi d’autres réalités, collectives et personnelles :

                Collective car on entretient un discours factice : des concours scolaires nationaux pour susciter des nouveaux talents, des écoles de BD, des "public datings", sans même que les débouchés soient envisagés, sans même que l’on imagine une création du futur qui -comme l’indique l’évolution des nouvelles technologies- sera multimédia, multisupports ?

                Et vous voulez me faire croire à une entité qui s’appellerait "auteur de BD" et qui ne vivrait que de cette seule activité, que des éditeurs ? Des auteurs comme Bastien Vivès ou Clément Oubrerie sont passés de l’animation, au livre pour enfants à la BD. Et ils y reviendront sûrement. La BD n’est que l’un des accomplissements des auteurs d’aujourd’hui, voilà le fond de ma pensée.

                Vous oubliez aussi que la grande majorité des 300 éditeurs ne vivent pas de la seule activité des albums. Même Media-Participations a une activité diversifiée (audiovisuel, vente de droits et de licences, agence de presse, distribution, diffusion, communication...) composée d’une grande variété de métiers. Mais c’est leur argent qui est investi dans cette activité, dans les créations, dans les stocks...

                Personnelle aussi parce que beaucoup d’auteurs sont en contradiction avec leur statut : ce sont des indépendants, mais ils aimeraient tellement avoir la sécurité du fonctionnaire. Parfois, ils n’ont plus l’énergie pour se battre et là, effectivement, c’est sur.

                Prenez conscience que la situation actuelle précarise tout le monde, et pas seulement une catégorie de créateurs qui, comme leurs aînés (Goscinny, Charlier, Uderzo, Franquin, Morris...) doivent aussi envisager que le succès passe souvent par une période de vache enragée, que rien n’est acquis, rien n’est donné, que l’on soit auteur ou éditeur.

                Cela ne se résume pas à une formule facile. Je vous ressert du désert ?

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                • Répondu le 3 janvier 2013 à  19:56 :

                  D’accord, cher Didier, je n’aurai pas dû vous tutoyer.
                  Pour le reste je n’apprécie pas d’être traité de "délirant" lorsque j’expose mon point de vue, issu de 25 ans d’expérience et de pratique du métier, et en posant de légitimes questions face à la précarité et la paupérisation de très nombreux auteurs (qui ne sont pas plus idiots que leurs ainés même s’ils acceptent de négocier leur contrats à la baisse !).

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                  • Répondu par Didier Pasamonik (L’Agence BD) le 3 janvier 2013 à  20:23 :

                    Cher Monsieur, quand bien même vous auriez 50 ans de métier (j’en compte 35 cette année comme directeur de collection, éditeur, libraire, et même auteur figurez-vous), j’ai quand même le droit de considérer que vos propos sont délirants. D’ailleurs, vous préférez prendre la mouche plutôt que d’argumenter, c’est plus facile, n’est-ce pas.
                    Nul ne conteste la précarité et la paupérisation de certains auteurs. Il y en a eu de tous temps. Il y en a davantage de nos jours car il y a plus d’auteurs, c’est mathématique.
                    Mon article fait un constat. Il exhorte les uns et les autres à trouver des solutions, à se diversifier, à se remettre en question.
                    Croyez-vous que notre situation est pire que celle des salariés de Virgin qui vont se faire licencier et qui, selon vous, vivaient à vos crochets ?

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                    • Répondu le 3 janvier 2013 à  21:18 :

                      Au moins on est d’accord sur le point concernant la paupérisation des auteurs, c’est important. Mais on ne peut s’en contenter, on ne peut pas rester sans rien faire face à cette situation préoccupante. Chacun ses solutions... et là nous divergeons beaucoup ! Toutefois nous avons le mérite d’en parler et votre site de s’en faire l’écho, je le reconnais.

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                      • Répondu par Didier Pasamonik (L’Agence BD) le 3 janvier 2013 à  22:24 :

                        Il faudrait peut être arrêter de pleurnicher. OK, les auteurs sont dans une situation précaire, et vous proposez quoi ?

                        Quelle est la position du SNAC-BD sur cette situation ?

                        Où est le programme de défense du statut des auteurs et de sa protection sociale ?

                        Vous ne pouvez pas reprocher à Gilles Ratier et à ses commentateurs les insuffisances de votre corporation.

                        Il y a d’abord un problème de définition : quel est le statut social réel d’un auteur de BD ; ensuite, un problème d’objectifs sociétaux.

                        Cessez de geindre. Agissez.

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                        • Répondu par Didier Pasamonik (L’Agence BD) le 3 janvier 2013 à  23:35 :

                          J’ajoute : les colonnes d’ActuaBD vous sont ouvertes.

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    • Répondu par Oncle Francois le 27 décembre 2012 à  12:48 :

      Oula !! Vous me semblez bien pessimiste, Monsieur Lapiere ! Cela m’étonne d’autant plus qu’il me semblait que vos Alter Ego et Michel Vaillant avaient bien du succès en librairie (et aussi en super-marchés sans doute pour Vaillant, bien connu du grand public).
      Vous déplorez la surproduction des grands éditeurs, incontestable, hélas. A ce niveau, il me semble que certains scénaristes productifs portent une certaine part de responsabilité dans cet engorgement du marché. Je pense à ceux qui écrivent plus de cinq albums par an, comme les Sfar et Trondheim, bien sûr, mais aussi les plus classiques Yann et Leturgie dans l’humour (parfois pas drole !), mais aussi à certains scénaristes réalistes en vogue comme Dufaux et Desberg, un peu trop prolifiques à mon goût. Je ne dis pas que tous leurs livres sont médiocres, loin de là, j’en ai apprécié plusieurs mais il me semblerait préferable qu’ils en reduisent la quantité pour en améliorer la qualité. Ainsi tout le monde serait gagnant : en ayant une production moins dispersée, ils auraient plus de visibilité en tant qu’auteurs, leurs albums se vendraient mieux et les libraires leurs seraient reconnaissants de laisser un peu de place à leurs confrères sur les présentoirs...

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      • Répondu par Denis Lapiere le 27 décembre 2012 à  13:25 :

        J’essaie de faire un constat simplement fidèle de la réalité de la bande dessinée aujourd’hui en France et en Belgique. Car si la diversité et la qualité des ouvrages est depuis quelque temps en progression constante et qu’elle ravit ceux qui ont la chance de pouvoir l’appréhender, force est de constater que notre médium perd des lecteurs chaque année et c’est bien là le drame. Parce que personne ne prend en compte qu’une œuvre de qualité a besoin pour exister d’être visible, promotionnée, récompensée et respectée. Avec plus de 20 titres nouveaux chaque jours ouvrables, aucun point de vente ne peut suivre, c’est l’opacité qui est en marche. Et comme notre microcosme est incapable de se sublimer pour faire la promotion de toute la bande dessinée et qu’il préfère se déchirer en opposant stupidement roman-graphique versus école de Marcinelle, indés versus grands groupes, Trondheim versus Van Hamme, préférant se passionner pour les luttes intestines du festival d’Angoulême plutôt que se demander comment toucher aujourd’hui un lecteur qui ne retrouve plus ses BD préférées, ni celles qui pourraient lui plaire, quand il pousse la porte d’une librairie… Oui, je ne suis pas optimiste.

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      • Répondu le 27 décembre 2012 à  16:18 :

        Pour une fois je suis d’accord avec Onc’ François, ayant lu qu’un scénariste n’avait écrit pas moins de 19 scénars sur une seule année, il est donc aussi vrai que certains scénaristes surproductifs portent une certaine part de responsabilité dans cette.. surproduction. D’un autre coté il y a 99% de chances que ce soit avec la bénédiction de son éditeur, mais comment faire de la qualité avec tant de scénarios par an ??

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    • Répondu le 27 décembre 2012 à  20:39 :

      Franchement ça doit faire depuis 2007 qu’on entend cette formule : surproduction = Editeurs qui sont occupé à scier la branche sur laquelle ils sont assis. 5 ans après j’ai plutôt à ce que je vois autour de moi l’impression que c’est la branche des auteurs qui est la 1ère sciée et qui est la plus près de lacher.

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      • Répondu le 27 décembre 2012 à  22:08 :

        Ça fait 25 ans que j’entends quel les éditeurs sont en train de scier la branche sur laquelle ils sont assis. Je me dis que c’est une grosse branche d’un très gros arbre. En fait, il ne la scie pas, il la lime comme un ongle et elle repousse.

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    • Répondu par Didier Pasamonik (L’Agence BD) le 31 décembre 2012 à  14:46 :

      Quand entre 2000 et 2012 le marché de la nouveauté en bande dessinée passe d’une offre de 1000 titres à 4000 titres sans que le chiffre global de vente n’augmente pas (il parait même qu’il diminue) et que le chiffre d’affaire global ne fait que suivre l’inflation, c’est que la rentabilité par titre est en moyenne divisée par 4 ! Il y a donc bel et bien un crise. Il faut appeler un chat, un chat.

      Je ne suis pas d’accord. C’est une mauvaise arithmétique.

      Car l’essentiel de l’offre est le fait d’une part de traductions (plus de 54% de l’offre) qui ne supportent pas de coût de développement (pas d’à-valoir excédentaire à payer, pas de photogravure, pas les mêmes frais de suivi éditorial...) et dont le point mort, pour la plupart des mangas est en-dessous de 2500-3000 exemplaires.

      Par ailleurs, en ce qui concerne l’offre des éditeurs alternatifs, c’est le secteur où les auteurs sont les moins payés -celui aussi le plus aidé par des structures comme le CNL- et, il faut bien le dire, où les auteurs ne gagnent pas leur vie pour la plupart.

      L’essentiel du chiffre est fait par les 20 best-sellers et les 100 medium-sellers qui se disputent, tout le sens de mon article est là, le même secteur de la distribution.

      J’ajoute que les librairies savent faire l’arbitrage : quand un livre ne vend pas, il dégage.

      Donc, pas sûr que la crise soit du côté des éditeurs puisque leur marge (globale) est assurée d’une part par les 20 best-sellers qui tiennent le marche, d’autre part, les mangas, enfin par les bonnes nouvelles des titres qui sortent du lot dan le milieu de terrain (par exemple les Légendaires chez Delcourt, Il était une fois en France chez Glénat, Alix Imperator chez Casterman...)

      Le reste, ne sont que tentatives de développement, avec soulagement une fois le point mort atteint.

      Mais tu sais tout cela.

      Quand un éditeur voit sa rentabilité défaillir aussi fortement sur le marché, il cherche imédiatement à la retrouver en taillant dans ses frais de fonctionnement : en premier lieu la rémunération des auteurs. La crise, ce sont les auteurs qui la subissent. Et cruellement.

      Oui. Il coupe dans les projets "hasardeux" et essaie de payer les auteurs le moins possible. Lesquels passent en face, s’ils le peuvent, chez un éditeur qui a moins de frais fixes que le précédent et qui s’en sort en publiant un livre moins rentable.

      Quand le nombre de nouveauté passe de 1000 à 4000 sans que le nombre de point de ventes n’augmente (il parait même qu’il diminue) et sans que la surface des tables des nouveautés dans ces points de vente n’augmente

      Faux. dans la période que tu évoques (de 2000 à 2012), les points de vente ont considérablement augmenté. Mais ils baissent de façon inquiétante ces dernières années. Il faut dire que ce discours de sinistrose ne donne pas envie à de nouveaux acteurs. En plus, le "ticket d’entrée", vu la concurrence, est plus cher aujourd’hui qu’hier, surtout en raison des loyers devenus prohibitifs dans les lieux de grand passage public (cf. Virgin et les Champs).

      elle aussi, la visibilité générale des titres est en moyenne divisée par 4. Le lecteur potentiel a donc quatre fois moins de possibilité de trouver la bande dessinée qu’il aime.

      Faux encore. Si c’est un amateur de BD, il sait où aller chercher son album (sur le Net, au besoin, s’il habite la Lozère ou Oulan-Bator). Ce sont les madames Michu qui achetaient de la BD avec leurs poireaux qui vont manquer.

      Elle se trouvera le plus souvent déjà rangée en rayon (selon des classements la plupart du temps abscons) ou déjà en carton pour retour à l’éditeur.

      Même plus, hélas. Le scoring (gestion des stocks par informatique) et le manque de place ne donnent que la seconde option.

      Sans un libraire efficace pour le renseigner (il y en a encore à la Fnac ? dans les Virgin ? Y en a-t-il jamais eu dans les hypers et supers ?), le lecteur moyen passe de plus en plus à côté des titres qui lui conviendraient.

      Avec 4000 nouveautés et une sur-segmentation, il n’y a plus de libraires efficaces, et c’est une partie du problème. Combien de librairies BD géénralistes sont vraiment connaisseurs en mangas, ou en BD indépendantes ? Combien de bibliothécaires ? Être à l’écoute de son public et devancer ses désirs, tel est le boulot d’un librairie d’aujourd’hui qui doit connaître mieux qu’hier son profil acheteur.

      Malgré une offre multipliée dans la qualité, il n’y a jamais eu autant d’excellentes bandes dessinées qu’actuellement, on vend moins de bandes dessinées aujourd’hui qu’il y a dix ans et ce alors que le secteur ne subit aucune pression du numérique, le piratage est anecdotique à côté de ce que subissent l’industrie du disque et du DVD. Il y a donc bel et bien une crise !

      Je regarde les chiffres de GfK et Ispsos-Livre Hebdo de ces deux dernières années et je ne trouve pas confirmation de ton affirmation.

      Les "gros éditeurs", Delcourt, Média et Glénat en tête se sont lancé dans une course à la production pour occuper le marché, sans se demander si ce dernier allait pouvoir la digérer.

      Crois-tu que des gens qui ont des enjeux bien plus importants que els tiens (des salariés à payer...) sont inconséquents à ce point ? Ce mépris (dans le sens d’incompréhension) , je te le dis comme je le pense, frise l’indécence.

      Conséquence, ils se trouvent tous face à une crise… de la diffusion. L’ensemble des diffuseurs de bande dessinée et des points de vente sont tout simplement incapables de prendre en charge les 4000 nouveautés qui leur sont proposées.

      Voir mes explications plus hauts. Les libraires feront des choix. Mais on se dirige vers un marché à 3 niveaux : best-seller = gde distribution ; ventes entre 20 et 100 = 1er niveau où la place va se réduire à un choix plus limité ; petits tirages = vente sur le Net et dans 10 points de vente super-spécialisés en France. On en reparle dans 5 ans ? Ressortez-moi cette prédiction.

      L’inflation des auteurs, des éditeurs et des titres n’a pas été suivie d’une inflation de points de vente ni en quantité, ni en qualité.

      Si, à un moment. Là,il y a ressac. Seuls les plus pros resteront.

      Le marketing en BD est tragiquement resté le même depuis dix ans,

      Ce n’est pas faux...

      l’offre de BD numérique se révèle un flop magistral et un gouffre financier,

      Je te renvoie à ma suite de quatre articles

      on ne parle toujours pas de bande dessinée dans les médias nationaux réellement prescripteurs (télé, radio, journaux) et quand c’est miraculeusement le cas, cela sert d’abord à monter un style de narration (le roman graphique) contre un autre (la BD franco-belge) et inversément.

      Ce n’est pas faux non plus, je renvoie à la désuétude du marketing.

      Il n’y a toujours pas, comme en littérature, en musique ou au cinéma, un prix qui permette une véritable popularisation d’un auteur ou d’un titre chaque année.

      Suivez mon regard...

      Le monde de la bande dessinée est réellement au cœur d’une crise de croissance. L’ensemble des éditeurs, en sur-éditant ce que le marché peut absorber sans donner à ce même marché les moyens de s’étendre et de prendre une place plus importante dans l’économie et le monde culturel sont occupé à scier la branche sur laquelle ils sont assis. La grenouille qui voulait se faire aussi grosse que le bœuf ? Elle est là la crise.

      Là, on tourne un peu en boucle, et tout Lafontaine y passe.

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  • Marché de la BD 2012 : les vraies raisons d’un marasme
    27 décembre 2012 12:13, par bfermier

    Beau résumé, issu d’une somme que Gilles Ratier réalise chaque année bénévolement. Merci à lui.
    Pour info, si certains réseaux de distribution reculent, le Groupement des Libraires de Bande Dessinée, quant à lui, et son enseigne Canal BD, progresse : 91 libraires coopérateurs à ce jour et une progression du chiffre d’affaires à points de vente comparables de l’ordre de +9% en 2012.
    L’objectif du Groupement (aider à pérenniser le métier de libraire indépendant) semble atteint... bien que dans le commerce rien ne soit jamais acquis.
    Le sérieux et le professionnalisme des libraires qui savent proposer un vaste choix d’éditeurs et d’auteurs, les nouveautés mais également le fond et qui se focalisent sur le coeur du métier, à savoir le livre, est aujourd’hui gage de réussite.
    S’il est vrai que les charges diverses (les loyers en font partie) et la trésorerie pénalisent les entreprises, nous continuons de croire dans l’avenir des libraires indépendants organisés (le "regroupement" n’est pas le monopole des éditeurs)... l’interdépendance étant une véritable force.

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    • Répondu par Oncle Francois le 27 décembre 2012 à  12:54 :

      Aprés l’édition indépendante, voila la librairie indépendante de BD !! Je me demande bien de quoi, Monsieur Fermier, quand je passe devant une vitrine Canal BD, je vois surtout des titres bien commerciaux, aux ventes sérieuses. Et dans vos librairies, il faut faire attention à ne pas se cogner contre les présentoirs XIII, Largo Winch ou Game Over. Vous vous dites indépendant, mais vous devez faire 75% de vos ventes avec les vingt plus gros éditeurs cités dans le rapport Ratier. Et je n’ai jamais vu la moindre once de sens critique dans votre magazine gratuit, dont le principal attrait pour moi restent l’interview de l’auteur et la liste des albums à paraitre....

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      • Répondu par captain saturn le 27 décembre 2012 à  15:02 :

        BONNES VENTES POUR NOEL !
        un indice de boutiquier, il y a deux ans 600 mètres de papier cadeau, l’année dernière 1500 mètres, cette année pour un chiffre en légère progression 800 mètres.
        les leaders tirages limités aux huma nos pour Moebius tirage limité pour gaston et spirou.

        Une perle sur le tirage Chaland du jeune albert tirage limité à 1500 N° du tirage vendu par la librairie 1690.?????
        Bonnes ventes pour Larcenet,les ignorants,et Delisle.
        A+ eric de la librairie Temps Libre.

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  • Marché de la BD 2012 : les vraies raisons d’un marasme
    27 décembre 2012 16:25, par David Vandermeulen

    J’aimerais comprendre une chose : comment Gilles Ratier s’est-il débrouillé pour affirmer que sur les 1951 auteurs de cette année « 1510 auteurs réussissent encore à vivre, souvent difficilement, de la création de bande dessinée » ? Sur quelles données s’est-il basé ? Je fais partie des 1951 auteurs de cette année. Qui lui a donné le montant de mes droits d’auteur ? Et qu’entend-il par réussir à en vivre, souvent difficilement ? Où situe-t-il le barème salarial pour affirmer qu’un auteur réussit à vivre « difficilement » ? Assez bas, semble-il. Rappelons qu’à propos des personnes vivant de leur plume, les travaux du sociologue Bernard Lahire retenaient le chiffre de 2% ; on est loin des 77,5% qu’annonce le rapport Ratier… Merci par avance pour les éclaircissements, car cette annonce est tout simplement ahurissante.

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    • Répondu par Polo le 27 décembre 2012 à  17:34 :

      L’équivalent en droits d’auteur du SMIC français (1 425,67 € par mois) pourrait être un bon indice, parmi d’autres. C’est une somme très modeste pour vivre un mois, mais peut-on savoir combien d’auteurs l’atteignent ? Sans doute bien peu. Et encore vaut-il mieux fermer les yeux sur le nombres d’heures travaillées.

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      • Répondu le 27 décembre 2012 à  20:20 :

        Mini sondage sur 9 auteurs ( connaissance ) revenu mensuel QUE BD entre RSA et SMIC, donc un max de job à coté - quand c’est possible bien sur - sinon ...

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        • Répondu par Alain le 27 décembre 2012 à  22:19 :

          C’est quoi l’intérêt de travailler sous le seuil de pauvreté ? Il faut n’avoir aucun respect pour soi-même pour se mettre dans de telles situations, ou alors on est maso et c’est le plaisir de se faire exploiter.

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          • Répondu par David Vandermeulen le 28 décembre 2012 à  00:22 :

            Bravo, Alain ! Vous venez d’insulter 98% des gens qui ont un jour publié un livre ; ça fait du monde… Je propose que vous cessiez d’en lire, ainsi vous ne participerez plus à cette mascarade.

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          • Répondu le 28 décembre 2012 à  00:29 :

            C’est pourtant la norme. Merci cher lecteur, votre reconnaissance fait plaisir à voir.

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    • Répondu par David Vandermeulen le 27 décembre 2012 à  18:23 :

      Gilles Ratier s’est expliqué et m’a répondu sur Facebook, voici sa réponse : « Je vais donc faire de l’explication de texte puisque, manifestement, vous n’avez pas compris ce que j’ai écrit : "Sur le territoire francophone européen, 1 951 auteurs ont publié au moins un album en 2012. Selon les critères retenus depuis 10 ans (cf. infra), on peut estimer que 1 510 auteurs réussissent encore à vivre, souvent difficilement, de la création de bande dessinée." Il y a donc déjà, en supposant que les 1 510 qui correspondent aux critères retenus aient publié un album en 2012 (ce qui n’est jamais le cas), 441 sur le carreau ! Ensuite, dans le texte du rapport, je mets "Il y a encore quelques années, les auteurs européens de bandes dessinées francophones qui avaient, au moins, 3 albums disponibles au catalogue d’éditeurs bien diffusés et un contrat en cours ou un emploi régulier dans la presse ou l’illustration, pouvait espérer vivre, plus ou moins bien, de leur métier. En se basant sur ces mêmes critères qui ne sont, hélas, plus du tout suffisants, il y en aurait, aujourd’hui, 1 510 (1 487 l’an passé) : alors que les témoignages démontrant que ce métier est en voie de paupérisation se multiplient." Donc, en clair, je dis bien que suis resté sur les critères pris en compte depuis 10 ans pour pouvoir comparer ce qui est comparable mais je précise bien que ces critères sont, hélas, devenus obsolètes : est-ce plus clair ? Après, ta proposition (de demander aux éditeurs quelles sont les sommes globales annuelles qu’ils ont dépensées en fixes et avances sur droits d’auteur, et pour combien d’auteurs) est excellentes mais je crains de ne pas avoir de réponses. Mon propos est de montrer que votre métier est difficile et que la plupart crèvent de faim (mais pas tous) pas de faire de l’autosatisfaction pour les éditeurs. »

      Sur quoi, Sergio Salma a conclu : « Je crois que la mauvaise formulation est à l’origine du malentendu. Il ne fallait pas écrire : 1500 personnes en vivent mais 1500 personnes ont décidé d’en faire un métier, d’en faire leur activité (principale ou complémentaire).

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      • Répondu le 28 décembre 2012 à  07:52 :

        demander aux éditeurs quelles sont les sommes globales annuelles qu’ils ont dépensées en fixes et avances sur droits d’auteur

        Le prix moyen payé à la planche varie d’un éditeur à l’autre ; le fixe, par exemple n’est plus réservé qu’aux stars de la BD, les autres sont payées en avance sur droits, et ça peut varier grave, hormis un huluberlu qui m’avait proposé 2000 euros, forfait pour un 48cc !!! Beaucoup de collègues ont des prix oscillant entre 200 et 220 euros la planche. ( Avant c’était 250/300 il y a 5/6 ans ) Ca montre que aujourd’hui, si tu fais entre 5/6 planches par mois, comme souvent, t’es déjà un sous smicard, et encore il y a les charges à déduire.Ce doit être la situation de la grande majorité des auteurs ; après les prix à la planche pour les 200 + gros vendeurs, aucune idée, mais je pense que ça peut monter à 450/500 + peut être un fixe.
        Ce sont juste mes chiffres connus de çi de là, en discussion festival ou auprès de potes auteurs, mais la vérité ne doit pas être bien différentes.

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        • Répondu le 28 décembre 2012 à  10:11 :

          A l’époque, Uderzo faisait 5 planches par semaine. Il(s) a(ont) mis du temps, mais finalement le succès est arrivé...

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          • Répondu par Gérard le 28 décembre 2012 à  14:14 :

            Le problème n’est pas de faire 5 planches par semaine (tout professionnel qui travaille 8 heures par jour y arrive), mais d’avoir les supports qui vous les achètent. À l’époque il vendait à Tintin et dans Pilote, aucun de ces deux journaux n’existe encore.

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        • Répondu par David Vandermeulen le 28 décembre 2012 à  13:26 :

          Je te rejoins totalement, bel inconnu. Je constate la même chose autour de moi.

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          • Répondu par Pierre le 28 décembre 2012 à  15:48 :

            Je constate ça aussi. Je crois que globalement ce sont grosso modo les chiffres pour 80/90%
            des auteurs de BD. D’ou souvent le "forcé" de bosser à coté en alimentaire, - ou d’avoir une femme riche :) - mais on arrive, et j’en connais sur ces 80/90% à des + de 70 h de job tout cumulé par semaine ( le double des 35 heures )

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        • Répondu par Dotcom le 29 décembre 2012 à  02:04 :

          hormis un huluberlu qui m’avait proposé 2000 euros, forfait pour un 48cc !!!

          Moi je suis preneur, mais je lui torche en un mois son 48cc, il faudra pas qu’il soit regardant, c’est comme quand on achète une montre à 1 euro, faut pas espérer qu’elle donne l’heure.

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    • Répondu le 27 décembre 2012 à  18:33 :

      un éditeur qui veut sortir un titre d’une série tous les ans dans un style relativement sophistiqué (dessin et couleurs relativement photo réalistes) est obligé de verser des à-valoirs. On ne peut pas faire 50H de dessin par semaine avec un boulot alimentaire en plus...

      Ceci juste pour expliquer qu’en BD il y a un pourcentage d’auteurs vivant de leur art supérieur à la littérature.

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      • Répondu par David Vandermeulen le 28 décembre 2012 à  00:10 :

        On pourrait croire que c’est comme ça que cela se passe, mais il n’en est rien. Un éditeur ne paie pas mieux un auteur de bande dessinée parce que celui-ci serait plus « travailleur » qu’un écrivain. On ne compte pas les heures dans un contrat. De même que l’on ne modifie pas les tarifs en fonction de la difficulté technique d’une planche. Une planche faite en une demi-journée sera payée au même prix qu’une planche effectuée en une semaine. Et l’éditeur ne paie pas plus parce qu’il est pressé de recevoir un autre projet de son auteur ; l’argent ne le fera pas dessiner plus vite. Si les auteurs de bande dessinée gagnent plus que les romanciers, c’est parce que le marché est plus important, tout simplement.

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        • Répondu le 28 décembre 2012 à  13:44 :

          je n’ai pas dit que les tarifs (à-valoirs, forfaits) étaient évalués en fonction des heures de travail, je sais bien que ce n’est pas le cas.
          J’ai dit que aujourd’hui encore et pour les séries uniquement (encore relativement nombreuses) c’est la réalité du terrain (volonté de rapprochement des sorties) qui "OBLIGE" l’éditeur à verser une avance (naturellement que s’il pouvait ne pas payer d’avances, il n’en paierait pas)
          Je ne dis pas cela parce "je pourrais le croire", je dis cela pour l’avoir vécu et observé pendant de nombreuses années.

          Sinon, oui, les ventes au-dessus de la moyenne permettent aux auteurs de faire des propositions dans d’autres maisons et ainsi de pouvoir être en position d’obtenir des à-valoirs (et là encore, plutôt pour des séries à parution régulière).

          Et oui, naturellement que ce système n’est possible qu’avec une moyenne des ventes par album supérieure à la littérature.

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        • Répondu le 28 décembre 2012 à  14:14 :

          Exact. Une seule règle existe désormais :
          Outre les droits ultérieurs (entre 8 et 12%), pour financer la réalisation d’un projet, un éditeur paie l’auteur en fonction du destin commercial espéré du livre à venir. Et donc en prenant compte les résultats des (éventuels) livres précédents dudit auteur. Presque toujours en avances sur droits. La pagination et la technique graphique n’entrent pas vraiment en compte.
          Au pire, vous aurez donc une avance maigrichonne ; au mieux un prix fixe par page, plus des droits d’auteur.

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  • Aucun auteur n’a envie d’avouer qu’il ne gagne pas sa vie avec son travail, et qu’il n’arrive à faire tourner les frais domestiques et nourrir sa famille grace à son épouse qui, elle, a un vrai métier et un vrai salaire. C’est la honte d’être un auteur reconnu, qui publie, qui vend, qui est invité dans les salons, et qui gagne moins qu’un smicard.

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    • Répondu par Charlicom le 28 décembre 2012 à  08:21 :

      Contrairement à ce que vous avancez, il n’y a pas de honte à être "un auteur reconnu, qui publie, qui vend, qui est invité dans les salons, et qui gagne moins qu’un smicard". La question est de savoir si ce "métier" est choisi pour l’argent, pour la reconnaissance ou pour, dirons-nous, l’amour de l’art. J’imagine qu’aujourd’hui aucun auteur n’a forcément envie de se voir en nouveau Van Gogh, par contre nombreux sont ceux qui apprécient le scintillement des projecteurs, ce qui est tout à fait humain, surtout si cet éclat se retrouve également au fond de leurs poches, artiste maudit mais blindé aussi. D’ailleurs c’est également un excellent argument pour séduire les jeunes auteurs, on ne vous paye pas beaucoup mais on vous offre la notoriété ("Et partout dans la rue j’veux qu’on parle de moi..."). Si vous faites de la BD (ou du dessin en général) pour l’argent, passez votre chemin, ou trouvez un bon parti marital. Ne pas gagner beaucoup d’argent par un travail de qualité est aujourd’hui plutôt un bon repère d’humanité.

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      • Répondu par Polo le 28 décembre 2012 à  09:38 :

        Espérer la "notoriété" en se lançant dans la bande dessinée serait assez naïf. Envisager la "notoriété" comme projet de vie me semble d’ailleurs puéril, mais c’est un autre sujet. La plupart des gens qui se lancent dans la bande dessinée ne le font pas pour ça.
        Pour le reste, vous avez raison : être "un auteur reconnu, qui publie, qui vend, qui est invité dans les salons" n’empêche pas forcément de vivre dans une vraie précarité. Il faut très mal connaître le monde de la bande dessinée pour l’ignorer.

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      • Répondu le 28 décembre 2012 à  10:32 :

        Vous nous dites donc qu’un bon humain est un travailleur pauvre...?

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        • Répondu par Charlicom le 28 décembre 2012 à  22:52 :

          On peut faire du commercial pour vendre, pour faire du chiffre, les recettes sont connues et s’épuisent aussi... Mais un bon projet ne relève pas de ce principe, artistiquement parlant. D’où le fait qu’il y a de très bons auteurs, pauvres de surcroit, car ils n’ont pas soumi leur créativité et inspiration à des ambitions commerciales.

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          • Répondu par Dot le 29 décembre 2012 à  02:01 :

            Vous avez des exemples ?

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            • Répondu par Charlicom le 29 décembre 2012 à  10:51 :

              Trop nombreux pour être tous cités. Juste pour vous éclairer, prenez un projet du style roman graphique dont le tirage se situe autour de 2000 ex, ses droits d’auteur sur ce tirage ne sera même pas au niveau du salaire mensuel d’un cadre, et pour combien de mois de travail ?

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              • Répondu le 29 décembre 2012 à  18:06 :

                On demande pas de tous les citer, juste quelques exemples, parce que sinon vous parlez dans le vide là.

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              • Répondu le 30 décembre 2012 à  00:31 :

                C’est pas compliqué. Tous les salariés des maisons d’éditions, les représ, les distributeurs, imprimeurs, libraires... tous ces gens ont un métier avec ce qui va avec socialement. Les auteurs non. Quel que soit la qualité de leur travail et du temps passé sur un album, ils gagnent leur vie s’ils en vendent pas mal, sinon ils doivent se contenter de leur avance qui est, il est vrai, de plus en plus maigre...

                Dessinateur de BD n’est pas reconnu comme un métier.

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      • Répondu le 28 décembre 2012 à  13:57 :

        - Si vous gagnez plus que ce que votre interlocuteur imagine vous serez un gros connard

        - Si vous gagnez moins que ce qu’il pense, vous serez un pauvre con.

        Alors imaginez si vous lui dites que vous êtes sous-smicard !

        Voilà l’une des raisons pour laquelle les auteurs, les sportifs et autres catégories "variables" ne disent jamais combien ils gagnent...

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        • Répondu par Maiana le 30 décembre 2012 à  15:57 :

          Bonjour à tous,
          je suis la réalisatrice du documentaire "Sous les bulles, l’autre visage du monde de la BD", enquête économique sur le marché de la BD, de 52 minutes qui sera présenté en avant première au festival d’Angoulême cette année. Cet article (et les diverses réponses et commentaires de chacun d’entre vous) sont au coeur du sujet de mon film, dont je suis actuellement en train de finir le montage. J’écris ici pour vous dire que justement, je suis en train de faire pour le film, via facebook, une enquête sur les rémunérations des auteurs. Les auteurs intéressés à participer peuvent me contacter par mail pour obtenir ce questionnaire. J’ai déjà plus d’une soixantaine de réponses, je vise une petite centaine, et je pense que cette petite étude aura des résultats qui en intéresseront plus d’un. N’hésitez pas à me contacter : maianabidegain@gmail.com . Merci et à bientôt.
          PS, dans mon film, je donne la parole aux auteurs, mais aussi aux éditeurs, libraires, imprimeurs, diffuseurs et distributeurs. https://www.facebook.com/SousLesBulles

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  • Bonsoir Didier ! D’où sort ce chiffre ? Peux tu le confirmer (je le trouve pour ma part inattendu !). Amitiés !

    Michel

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    • Répondu le 28 décembre 2012 à  14:30 :

      Le vrai chiffre est 101 milliards. Il est visible sur le site de Carrefour.

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  • Car où vont les titres chassés des grandes surfaces qui font moins de 100 000 ex de vente, est il marqué dans l’article ??

    Avec seulement 4 titres l’an passé ayant dépassé 100.000 ventes (Livres hebdo/Ipsos - ventes 2011 )
    Autant généraliser vos propos à quasi toute la production, non ??

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  • Marché de la BD 2012 : les vraies raisons d’un marasme
    29 décembre 2012 19:53, par Sergio SALMA

    On attend un débat plus large que" qui gagne sa vie ou pas". Le cinéma est aussi une industrie lourde qui génère des millions de dollars chaque jour , qui sacre des stars, qui fait vendre du papier, des produits dérivés etc.. on sait pourtant aussi que 90% des comédiens sont au chômage ou en situation plus que précaire et que des centaines de cinéastes n’arrivent pas à faire leurs films.

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    • Répondu par O.Grusin le 29 décembre 2012 à  20:38 :

      Quel débat attendez-vous alors Mr Salma ?

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      • Répondu par Sergio SALMA le 30 décembre 2012 à  01:17 :

        Je n’attends personnellement aucun débat précis mais l’article de départ traitait d’un grand engorgement, de graves soucis de gestion d’espace, de sorties trop nombreuses etc... Pourquoi un libraire n’intervient-il pas ? Ce serait intéressant. N’y a-t-il pas quelques questions à se poser quant à la concentration des sorties sur les 3 derniers mois de l’année alors que de mai à septembre on s’ennuie ou presque dans les librairies ? Est-ce que la donnée "Noël période bénie" n’est pas en train de devenir synonyme d’enfer pour tout le monde ? Je ne sais pas , je me pose des questions. En venir à débattre du "salaire" et des revenus des auteurs est intéressant aussi mais ce n’était pas le sujet de départ. Même si évidemment tout est imbriqué.

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    • Répondu par Alex le 30 décembre 2012 à  01:30 :

      ÀAbsolument : l’offre est là (éclectique et talentueuse comme rarement dans l’histoire du genre). Le lectorat est segmenté, ce qui pourrait éventuellement expliquer une situation de "saturation"- plutôt que "surproduction" générale. Je pense que l’article approche très bien le problème structurel qui est celui de tous les médias du siècle dernier : qu’en est-il de la distribution classique (librairie ou par comparaison tv) quand tout est accessible et presque cousu sur main pour une tranche précise d’un public particulier. Tout en sachant que la mondialisation peut offrir aussi une exposition internationale. Et sans se tourner la tête il est permis d’espérer qu’un 20.000 ex francophone de naguère pourrait au moins faire ces chiffres sur un marché global- au pire. Il y a là une antinomie car le monde de l’édition est structurellement une grosse machinerie très lourde. Si de nos jours un livre a quelques semaines pour percer sur le marché national, il peut se passer jusqu’à un délai de 3 ans pour que ce produit face son apparition sur le marché étranger (contrats, traductions). Ce n’est bien entendu plus un modèle viable. Bon gré, mal gré la bd est aussi une industrie et se trouve à ce titre sujette aussi aux règles de la globalisation et de la concurrence. On a simplement pas encore trouvé sur tous les fronts le modèle idéal pour tout un éventail de produits culturels. Mais c’est un problème aigu qui en pleine phase de réflexions par tous les acteurs de cette industrie. C’est une période de mutation, pas la fin d’un genre ni la pérennisation d’une poignée de séries fédératrices. Les derniers soubresauts d’une vieille industrie en quelque sorte.

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      • Répondu par JC LEBOURDAIS le 2 janvier 2013 à  17:10 :

        Bienvenue aux auteurs de BD dans le monde des siderurgistes et des medecins. Lorsque ce que je fais dans la vie ne me permet pas de subsister, ca ne s’appelle pas un travail, ca s’appelle un hobby.
        Il est facile de trouver les branches professionnelles qui manquent de bras, et puis de se former. Il est facile de trouver un travail dans un secteur economique ou il y a de la demande en utilisant a peine une fraction de l’energie que certains depensent a se plaindre ou a nier la realite.
        Sauf a vouloir profiter du systeme, des aides et des subsides en tout genre. chacun son truc.

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        • Répondu par Gab le 10 février 2013 à  13:14 :

          Il est facile de trouver un travail dans un secteur economique

          Renseignez vous mon vieux, le chomage est partout.

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  • Marché de la BD 2012 : les vraies raisons d’un marasme
    7 novembre 2013 10:44, par hello les gars

    Dans la BD "Vincent Mil libraire" de Jopa chez Danger Public en 2008, tout était dit... je conseille !

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