Tandis qu’un savant fou démontre la puissance de son colosse de métal à ses concitoyens en les piétinant sans remords, les potentats locaux (le maire, le chef d’état-major et son allié l’ industriel cupide) scénarisent la catastrophe afin d’en tirer profit.
Sur cette trame, l’auteur construit un récit en petites scènes isolées, multipliant les points de vue et maniant les stéréotypes avec astuce : monsieur et madame tout-le-monde, les journalistes, les assureurs, ou les bouchers sont ainsi moqués, face à l’urgence. Tantôt mesquin, tantôt arrogant, chaque personnage rencontré est l’objet d’un portrait humoristique, et souvent peu flatteur.
Indéniablement bien mené, le récit ne passionne pas vraiment dans ses enjeux. La critique est convenue, et étonnament inactuelle : jamais La Mécanique de l’Angoisse ne dépasse en pertinence ses quelques modèles franco-belges [1]. La satire est trop grossière, et les articulations scénaristiques trop mécaniques pour aspirer totalement l’attention du lecteur : L’aspect purement fonctionnel des personnages qui vont et viennent sans psychologie dynamise dans un premier temps le propos, avant de sceller, sur la durée un désengagement émotionnel total, qui dessert le propos politique de l’auteur et le divertissement du lecteur.
L’humour, quand il fait mouche est entravé par des gags nigauds, ou par des références conceptuelles et intellectuelles trop voyantes [2]. Fabrice Erre, qui est aussi l’auteur d’une thèse sur la presse satirique semble prisonnier de ses références, échouant à produire un discours adapté à son époque. Plus dommage, on n’imagine pas sa pochade gros-nez amuser qui que ce soit dans un futur quelconque.
(par Beatriz Capio)
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