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Mort au Tsar, T1 : Le Gouverneur - Par Nury & Robin - Dargaud

Par Tanguy PÂQUES le 8 septembre 2014                      Lien  
Après le diptyque "La Mort de Staline", Fabien Nury et Thierry Robin poursuivent leur exploration de l'histoire russe avec ce premier tome d'un nouveau diptyque qui se penche, en remontant la ligne du temps, sur les prémisses de la révolution russe et à la fin de la dynastie des Romanov, au travers d'un personnage complexe et tourmenté : le grand-duc de Russie, Sergueï Alexandrovitch.

Du haut de son balcon, dominant une foule contenue par ses gardes, Sergueï Alexandrovtich, gouverneur de Moscou et oncle du tsar Nicolas II, laisse tomber son mouchoir blanc sous le coup du projectile végétal qui le frôle. Acte volontaire ou accidentel, peu importe, pour les gardes, c’est le signal : ils font parler la poudre. C’est le massacre. Cet événement le désole, mais vaut à Sergueï Alexandrovitch les louanges de son neveu autant que la haine du peuple. Et dans le contexte prérévolutionnaire de la Russie de 1904, il n’en faut pas plus pour que cela fasse de lui la cible des lanceurs de bombes, soit un mort en sursis.

Si, avec La Mort de Staline, Fabien Nury dépeignait un collectif face à la mort d’un homme puissant, il dresse dans le premier tome de Mort au Tsar le portrait intime et psychologique d’un homme puissant face à la perspective de sa propre mort. Avec son humour noir relevé de surréalisme, Fabien Nury substitue la fable mélancolique et fataliste pour conter les derniers mois d’un homme tiraillé par ses contradictions et ses doutes. Affable et sensible, Sergueï n’a pas les épaules assez larges pour appartenir à la dynastie Romanov. L’homme se débat dans sa fonction, tout et tous lui rappellent que ses jours sont comptés. La tendance est au projectile de nitroglycérine, un charmant cocktail qui lui prédit une mort atroce, loin du "romantisme" de l’assassinat au couteau ou au fusil.

Mort au Tsar, T1 : Le Gouverneur - Par Nury & Robin - Dargaud

Comme à son habitude, Fabien Nury s’imprègne de l’Histoire et d’écrits de contemporains comme ceux de Léonid Andreïev, (Le Gouverneur) et de Boris Savinkov (Le Cheval blême) pour écrire son récit. Il mène cette chronique d’une mort annoncé sans compromission, isolant son protagoniste dans son immense palais comme dans les extérieurs enneigés. Il maintient l’intérêt du lecteur en faisant glisser son personnage de la peur à la révolte et à la résignation, pour aboutir à une forme d’impatience.

Au dessin, Thierry Robin soutient remarquablement de son trait fin et subtil le scénario de Fabien Nury. Son découpage dynamique ne sacrifie rien à la lisibilité et s’appuie sur la plongée et la contre-plongée pour retranscrire graphiquement les émotions contradictoires du protagoniste. Les jeux d’ombres finissent de donner à son travail les apparences oppressantes de l’expressionnisme, mouvement artistique qui s’inscrit précisément au début du vingtième siècle.

Le premier volet de Mort au Tsar confirme, si besoin en était, que le duo Nury/Robin est d’une rare complémentarité. Ils livrent un bien bel ouvrage en forme d’exercice de style que le second tome (Le Terroriste) viendra compléter en présentant le point de vue de l’assassin.

(par Tanguy PÂQUES)

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