Il portait le matricule A 17595. Charles Baron avait été déporté dans le convoi 34, le 18 septembre 1942. Pendant 32 mois, il a été interné dans divers camps de travaux forcés pour Juifs (Z.A.L. fur Juden). Transféré à Auschwitz II-Birkenau en juillet 1944, il y reste jusqu’à sa libération. Mis en camp de quarantaine, il est déplacé, en octobre 1944, à Kaufering-Landsberg, annexe de Dachau, avant de rentrer en France. En 1950, il rencontre Micheline. Ensemble, ils auront deux filles.
C’est grâce à l’une d’elle que je l’avais rencontré : Annie Baron-Carvais, l’auteure du Que-Sais-Je ? sur la bande dessinée (Jack Kirby avait illustré la couverture de sa thèse) avec laquelle je travaillais sur un projet qui n’a jamais vu le jour en raison de son décès inopiné.
Combien de fois suis-je allé chez lui accompagné d’Annie pour lui raconter nos projets ? Nous étions délicieusement reçus par son épouse Micheline, son fervent et solide soutien. Nos conversations l’enthousiasmaient, lui qui aimait tant la bande dessinée. Il avait rencontré Art Spiegelman, Joe Kubert, Ben Katchor, Miryam Katin, Robert et Aline Crumb. Il venait régulièrement à Angoulême, et avait même documenté Pascal Croci pour son album Auschwitz, qu’il avait cependant conseillé de ne pas titrer de cette manière : « Auschwitz, ce n’est pas cela », lui avait-il dit. L’éditeur n’a pas suivi sa recommandation...
Je le voyais de loin en loin, et toujours avec plaisir, comme lors de cette journée de rencontres BD au Mémorial en juin 2015 où cette photo a été prise. Il avait passé du temps à regarder toutes les parutions qui étaient en vente, conversant avec quelques-uns des auteurs présents. Je l’avais vu chez lui voici encore quelques mois.
Alors que le Mémorial s’apprêtait à faire en janvier 2017 une importante rétrospective sur la représentation de la Shoah dans la bande dessinée dont il avait été peu ou prou l’inspirateur, voici qu’il se retire discrètement.
Nos pensées vont à Micheline, à sa fille et à ses petits-enfants qui n’ont jamais manqué de bandes dessinées.
(par Didier Pasamonik (L’Agence BD))
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