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Nicolas Barral ("Nestor Burma") : "Boulevard... ossements", c’était un travail d’équilibriste.

Par Didier Pasamonik (L’Agence BD) le 27 mai 2013                      Lien  
Dans le milieu russe blanc parisien de l'entre-deux guerres, Nesto Burma enquête sur une histoire de diamants volés. Un récit qui nous vaut quelques portraits de l'immigration russe des années 1920.

Aviez-vous lu Léo Mallet avant de succéder à Moynot et Tardi ?

Oui, Brouillard au pont de Tolbiac m’avait donné envie de lire ses romans que j’ai dévorés ensuite. Non seulement les Nouveaux Mystères de Paris, mais aussi la Trilogie noire : La Vie est dégueulasse (1947), Le Soleil n’est pas pour nous (1949) et Sueur aux tripes (1969).

Comment ce projet d’adaptation à la suite de Moynot et de Tardi est-il arrivé jusqu’à vous ?

J’ai été contacté par Hervé Langlois qui venait d’arriver chez Casterman et que j’avais croisé chez Delcourt à l’époque des Ailes de Plomb. C’est mon travail sur ce polar années 1950 qui lui a fait penser à moi. Moynot souhaitait faire une pause, mais j’ai quand même pris la peine de vérifier auprès du principal intéressé pourquoi il passait la main.

Nicolas Barral ("Nestor Burma") : "Boulevard... ossements", c'était un travail d'équilibriste.
"Boulevard... ossements" par Nicolas Barral d’après Léo Malet et l’univers graphique de Tardi
(c) Casterman
Nestor Burma, croquis inédit de Nicolas Barral
(c) Casterman - Barral - Malet

Moynot avait un peu défriché le terrain, mais succéder à Tardi, c’est terrible, non ?

En fait, non. J’ai vu ça comme un clin d’œil du destin. Je m’explique : Quand j’étais un jeune dessinateur en herbe et mal dégrossi, j’ai lu une interview de Tardi où il expliquait sa méthode de travail, principalement son recours aux repérages photographiques pour Burma. Ça m’a décomplexé et j’ai produit dans la foulée ma première histoire un peu regardable suivant la méthode Tardi. Je me suis donc plongé avec délice dans l’univers du Maître avec quelques années d’expérience en plus pour essayer d’en tirer la substantifique moëlle. Je n’ai pas tenu compte du travail de Moynot pour essayer de rester au plus près de mes émotions de lecteur de Burma.

Je me suis lancé directement dans un découpage graphique, notant au fur et à mesure et précisément les lieux de l’action pour le repérage photo. Je me suis permis quelques coupes et aussi certaines libertés de mise en scène pour dynamiser le récit, le garder le plus possible en mouvement. Par exemple pour les scènes d’intérieur, quand elles se prolongeaient un peu trop, avec un dialogue abondant, je terminais la scène en voix off, montrant Burma au volant ou marchant dans la rue avec Hélène. C’est un procédé auquel Tardi a eu recours lui aussi et qu’il m’a soufflé.

Est-ce que, en vous mettant dans "l’univers graphique de Tardi", comme dit la couverture de l’album, vous ne renoncez pas au "vrai" Nicolas Barral, celui de Dieu a réponse à tout ?

Nicolas Barral a des visages multiples, ce qui peut peut-être troubler certains lecteurs. (mince je me mets à parler de moi à la troisième personne). Mais je crois, j’espère, qu’il pointe le bout de son nez dans Boulevard... ossements, par-ci par-là. C’était un travail d’équilibriste. Je voulais m’inscrire dans le principe de série, mais si possible, rester moi-même. J’ai choisi Boulevard... ossements parce que son début est très drôle, dynamique, et qu’il me permettait un atterrissage en douceur d’avec mes autres séries. Dieu n’a pas réponse à tout, mais aussi Philip et Francis.

"Boulevard... ossements" par Nicolas Barral d’après Léo Malet et l’univers graphique de Tardi
(c) Casterman

À quel niveau interviennent les ayants droits de Léo Mallet et votre éditeur Casterman ?

Je n’ai pas eu affaire aux ayants droits de Léo Malet et mon éditrice, Nadia Gibert a été très bienveillante. Tardi a été le moins interventionniste possible, ce dont je lui sais gré.

Croquis pour "Dieu n’a pas réponse à tout"
(C) N. Barral & Dargaud.

Comment caractériseriez-vous Léo Mallet comme auteur de polar, par rapport à un Simenon ou un Jean-Patrick Manchette par exemple ?

Je crois que Malet voyait Burma comme son Philip Marlowe. J’ai l’impression qu’il mettait plus de légèreté dans ses histoires et pas mal de second degré aussi. On trouve davantage de profondeur dans Brouillard au pont de Tolbiac où il évoque, en filigrane, son passé anarchiste. Il a développé cette veine réaliste et noire dans sa Trilogie noire.

Nicolas Barral est attaché à Nestor Burma ou il a d’autres projets ?

Un deuxième Burma est prévu. Mais, à la manière de Tardi, j’ai du mal à me considérer comme l’homme d’une seule série. Ma collaboration avec Tonino Benacquista continue, qui se concrétisera par la sortie d’un one shot en novembre. Et un troisième Philip et Francis est en chantier. J’espère que le public continuera à me suivre...

Propos recueillis par Didier Pasamonik

Philip & Francis, parodie de Blake & Mortimer pour Dargaud
(c) Dargaud

(par Didier Pasamonik (L’Agence BD))

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Nestor Burma Casterman ✏️ Nicolas Barral
 
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