Pepe, est une curieuse aventure de bande dessinée. Le héros est un dessinateur : José Gonzáles, alias Pepe pour ses potes et pour la profession. "Un agaçant génie" selon ses confrères. Il dessinait avec une facilité folle, un sens du trait, une vision d’artiste à nulle autre pareille. Ses collègues en étaient tétanisés, d’autant que sa notoriété portait loin : son interprétation de Vampirella était dans toutes les chambres d’adolescents américains des années 1970. Son éditeur américain Warren l’adulait, lui faisait des réceptions pharaoniques. Hollywood même lui était promis...
Mais le dernier à y croire, c’était Pepe lui-même. Fantasque, feignasse quand il ne sentait pas motivé, pas du tout impressionné par la réussite. Bien sûr qu’il lui fallait de l’argent car il aimait se pavaner le soir dans les clubs gays de la ville quitte à se prendre un pain par un de ses amants de passage, mais il trimballait une espèce d’indolence existentielle qui désespérait son employeur, Truffaut alias Josep Toutain, le patron de Selectiones Illustradas, la grande agence d’artistes de Barcelone, mais surtout ses collègues qui imaginaient la fortune qu’ils se feraient s’ils avaient eu le dixième de son talent.
C’est un émouvant portrait d’artiste que nous fait ici Gimenez dans son beau dessin clair qui montre un Pepe aussi généreux que profiteur, aimé par tous et aimant tout le monde sauf lui-même. C’est aussi une magnifique transposition de la réalité du métier de dessinateur, entre incertitude et espoir, en passion et amitié. Un récit unique en son genre.
(par Didier Pasamonik (L’Agence BD))
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